Monaco-Matin

« S’il y a une période où il ne faut pas faire grève, c’est celle-là... »

« En 24 ans, ce serait mon premier Noël sans mon fils ! »

- P.-L. P. plpages@varmatin.com CARINE BEKKACHE

Habituelle­ment, Christiane, Varoise résidant à Sainte-Maxime, est plutôt bienveilla­nte envers les mouvements sociaux.

Mais en cette fin d’année 2022, elle avoue « ne pas très bien vivre la grève des contrôleur­s de la SNCF » responsabl­e de nombreuses annulation­s de trains. Et se dit même « écoeurée par un mouvement qui va empêcher plus de 200 000 personnes de retrouver leur famille ».

« Plus de place »

À quelques jours du Réveillon de Noël, elle se faisait une joie de retrouver Théo, son fils de 24 ans, qui travaille comme vendeur dans une boutique du centre commercial de la Part-Dieu à Lyon.

Mais ces retrouvail­les familiales sont compromise­s. « Initialeme­nt, on devait organiser le réveillon dans la famille à Saint-Raphaël, avant de changer pour Cannes. Le premier billet de train n’étant pas modifiable, j’en ai acheté un second. Je me suis dit qu’avec deux billets en main, mon fils aurait plus de chance de passer à travers la grève. Mais j’ai appris en téléphonan­t à la SNCF que ses deux trains étaient finalement annulés. Il ne reste plus aucune place dans ceux qui sont maintenus »,

Mardi soir, lorsque l’écran de son téléphone s’est allumé, Axelle n’imaginait pas recevoir un tel message. « Le texto venait de Ouigo. Il me signifiait que le train que nous avions prévu de prendre dimanche soir, pour revenir chez nous à Nice, était annulé », indique la jeune femme, qui se trouve actuelleme­nt dans sa famille, à Saint-Omer dans le Pas-de-Calais, avec son petit garçon de 7 ans. Une mauvaise surprise, qui a contraint la Niçoise à trouver rapidement une solution de repli.

« Je ne pouvais pas rester sans solution »

« Sans perdre une seconde, j’ai allumé mon ordinateur et je me suis mise à la recherche d’un plan B, poursuit Axelle. Ce message est arrivé suffisamme­nt en amont pour me permettre de me retourner. Mais ça n’a pas été simple. » Après avoir parcouru en vain le site de la SNCF, où tous les trains affichaien­t complets dans les créneaux recherchés, Axelle s’est tournée vers les sites de location de voitures. fulmine Christiane.

Noël en solitaire ?

La quinquagén­aire ne baisse pas les bras pour autant. Bus, covoiturag­e, elle étudie toutes les alternativ­es possibles. « Il travaille dans un grand centre commercial. En cette période de

Sans plus de succès.

« Nuire aux usagers pour se faire entendre »

« Le premier prix était à 300 euros. En ajoutant les frais d’essence et de péages, cela faisait une enveloppe de presque 600 euros. Impossible pour moi. Et en même temps, étant censée être de retour au travail rush, il ne sera libéré que le 24 décembre à 16 heures. L’horaire est un peu trop tardif pour espérer trouver un covoiturag­e. Quant au bus, si c’est pour arriver le lendemain du réveillon… ». Contacté hier par téléphone, Théo se montre plus fataliste. « C’est rageant bien sûr, mais ça arrive tellement souvent les problèmes de train ». Peu optimiste, Théo envisage d’ores et déjà de passer Noël tout seul. « J’essayerai de me préparer un truc à dîner. Peut-être un risotto ».

« Je m’en fous d’être remboursée… »

lundi, je ne pouvais pas rester sans solution. »

Alors Axelle a persisté et, « par miracle », a trouvé un vol dimanche soir, au départ de Lille. « Dans l’attente du remboursem­ent de mes billets de train, je dois encore sortir plus de 200 euros de ma poche, soupire-t-elle. Mais je n’avais pas le choix. » Si elle s’estime

Une idée à laquelle Christiane refuse toujours de se résoudre. « Ce serait la première fois en 24 ans que je passerais Noël sans mon fils. Impossible ! » Et qu’on ne lui parle pas du remboursem­ent - pourtant très avantageux - des billets de train ! « Je m’en fous. Un Noël en famille, ça n’a pas de prix ! », lâchet-elle.

Bien décidée à se battre jusqu’au bout, elle a lancé « une bouteille à la mer sur les réseaux sociaux », et a même trouvé un BlaBlaCar… Entre Lyon et Aix-enProvence. « Tant pis, on ira chercher Théo avant de prendre la route pour Cannes ». « chanceuse », puisque la grève n’aura « pas gâché » ce Noël avec les siens, Axelle songe néanmoins à toutes ces familles qui ne pourront pas se réunir cette année.

« J’avais opté pour un voyage plus écolo »

Avec une certaine amertume : « S’il y a une période où il ne faut pas faire grève, c’est cellelà. Je peux comprendre le combat des grévistes, mais on a vraiment l’impression qu’il y a une volonté de faire pression et de nuire aux usagers pour se faire entendre. Cela s’appelle du chantage et ça n’est pas acceptable. »

Axelle pousse le raisonneme­nt encore plus loin : « J’avais opté pour un voyage en train, moins coûteux et plus écologique. Et finalement, je me retrouve avec une solution plus onéreuse, et moins vertueuse en termes d’empreinte carbone. Contradict­oire, à l’heure où l’on nous incite à faire davantage attention à notre impact sur l’environnem­ent… »

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(Photo Sébastien Botella) Axelle a dû trouver un vol rapidement pour rejoindre la Côte d’Azur après Noël.
 ?? (Photo DR) ?? Théo, 24 ans, risque de passer Noël seul à Lyon, loin de sa famille sur la Côte d’Azur.
(Photo DR) Théo, 24 ans, risque de passer Noël seul à Lyon, loin de sa famille sur la Côte d’Azur.

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