Noël : que mange-t-on à Menton dans la tradition ?
Veille de festivité oblige, focus sur les plats et confiseries que l’on avait pris l’habitude de manger sur le secteur. Entre recettes maigres pour les plats de résistance et desserts divins.
S’il est une chose que la mondialisation n’arrivera pas – tout à fait – à phagocyter, ce sont bien les repas de fête. Qui continuent à répondre, d’année en année, aux traditions dûment installées. Pour la cachafueg, la veillée de Noël, nombreux sont ceux qui souhaitent ainsi perpétuer les habitudes des anciens dans le choix des plats cuisinés. Un trou de mémoire ? Les divers numéros d’Ou Païs mentounasc publiés ces trente dernières années regorgent de descriptifs et d’anecdotes pour s’y conformer.
Dans l’exemplaire de décembre 2007, Marcel Viale soulignait que Noël donnait lieu à un « bon repas en famille où rien ne manquait, excepté les huîtres et le champagne ».
Les treize desserts en provenance des campagnes mentonnaises
Bien qu’installés en bord de mer, les vieux Mentonnais n’en ont jamais mangé par peur de s’empoisonner. « Chaque famille possédant, en grande majorité, un lopin de vigne faisait son vin, rouge en général, quelque peu de blanc réservé aux jours de fête », ajoutait-il. Précisant que les treize desserts provenaient des campagnes mentonnaises : oranges, mandarines, pommes, kakis, noisettes, raisin de framboise. Sans oublier la fougasse que le boulanger offrait, gratuitement, à ses habitués. Jean-Louis Caserio indiquait, quant à lui, en 1996, que ces sucreries se préparent bien souvent dès l’été ou l’automne précédent : « On conserve au grenier les plus belles grappes de muscat blanc, les paquets de sorbes, les pommes rouges et lustrées. Les poires, oranges, mandarines, kakis complètent la liste des fruits frais. Dans un coin du grenier, des sacs de toile blanche bourrés de noix, de noisettes et d’amandes serviront à faire le nougat noir de Noël. Couchées sur un lit de feuilles de laurier, les figues, retirées de la claie de canisse, se sont poudrées d’une fine pellicule de sucre naturelle », détaillait-il. Rappelant à la mémoire des Mentonnais une époque où les enfants recevaient de leurs parrains et marraines des gâteaux en forme de poupée pour les filles et de coq pour les garçons.
« Ces gâteaux étaient confectionnés avec le surplus de la pâte de fougasse. Des dragées formaient la bouche et les yeux. Le corps de ces friandises était parsemé de grains d’anis sucrés. » Les petits se voyaient également offrir des ‘muscardins’. Dans les faits, des graines de coriandre enduites d’une pâte sucrée.
La viande interdite avant la Messe de minuit
Et côté salé ? Grand-mère Laure soulignait dans Ou Païs mentounasc de décembre 1983 que l’on proposait systématiquement des recettes maigres, dans la mesure où la viande était interdite avant la Messe de minuit : cardes à l’anchois, gratin de courge, morue du gros souper, salade de Noël – composée de coeurs de céleris et côtes les plus tendres, truffe râpée, filets d’anchois fondus dans l’huile nouvelle), sans oublier le vin cuit. Avec sa belle plume connue de tous, le regretté Richard Laffite décrivait pour sa part, en 1997, le repas du jour J.
« Le traditionnel déjeuner de Noël était incontestablement bonifié par rapport à l’ordinaire. En entrée, une assiettée de cochonnaille, accompagnée de la classique pichade faite maison. Un tantinet assouvis, nous partions à l’assaut du poulet du dimanche dont le Vert Galant avait assuré la promotion. Légumes et fromages étaient plus ou moins délaissés afin de réserver un coin d’estomac pour les pâtisseries de rigueur et l’inamovible fougasse. Mon père s’accordait une bouteille de bon vin que, une fois n’est pas coutume, il ne coupait pas avec les piquants lithinés du docteur Gustin. »
Les textes ne révèlent pas, en revanche, comment les Mentonnais parvenaient à ne pas prendre de poids après de telles ripailles…