Monaco-Matin

Huit ans après avoir été défiguré, l’espoir d’un procès à Nice Youssef, poignardé au visage, se désespérai­t de voir son agresseur un jour répondre de son acte. Après une série de dysfonctio­nnements judiciaire­s, l’affaire devrait être jugée en mai.

- CHRISTOPHE PERRIN cperrin@nicematin.fr

Chaque jour rappelle à Youssef, 35 ans, ce funeste 1er décembre 2014. Une large balafre lui barre la joue gauche, stigmate d’un coup de couteau d’une brutalité inouïe.

Aux souffrance­s physiques et psychologi­ques est venue s’ajouter l’incompréhe­nsion d’une enquête au ralenti. « J’ai désigné mon agresseur dès ma sortie de l’hôpital mais rien ne s’est passé », se plaint Youssef.

Guet-apens

Le dossier a d’abord dormi dans une armoire du commissari­at de L’Ariane à Nice. La faute, entre autres, à un major de police aux méthodes singulière­s, le même qui a traité avec une incroyable légèreté la plainte de la femme du terroriste du 14-Juillet. L’agression subie par Youssef il y a 8 ans a des allures de guetapens. « On venait de se séparer avec mon ex-compagne qui prétendait avoir été cambriolée, se souvient-il. Elle souhaitait que je vienne constater les dégâts dans l’appartemen­t, rue Maurice-Maccario,

à Nice. Je ne voulais pas. Ma mère a insisté car le bail était à mon nom. J’ai alors quitté mon snack pour me rendre sur place. Je me suis assis sur le canapé en attendant la police. C’est à ce moment-là que Hassen S., accompagné de plusieurs individus, a débarqué et m’a agressé. »

Hassen S., selon les déclaratio­ns de Youssef, le poignarde. Le jeune homme s’écroule, perd connaissan­ce. Dès sa sortie de l’hôpital, la victime, visage barré d’une cicatrice indélébile, dépose plainte. Depuis, il attend désespérém­ent que son agresseur soit puni à la hauteur du préjudice subi.

Des témoins brisent l’omerta

Le suspect numéro un s’est toujours défendu de tout acte répréhensi­ble, soutenu à l’époque par ses proches aux témoignage­s convergent­s. Une plainte avec constituti­on de partie civile n’a rien changé : manifestem­ent, la juge d’instructio­n avait d’autres priorités. Après des années d’une enquête au point mort, le suspect a fini, en 2021, par être placé sous le statut de témoin assisté, malgré ses innombrabl­es versions de l’agression et surtout les revirement­s de certains de ses proches. Deux filles du suspect ont ainsi révélé sur procès-verbal qu’une omerta avait été orchestrée afin de le disculper. « Lui expliquait que je m’étais volontaire­ment mis la tête dans une porte vitrée. Même si l’expertise médicale expliquait que ce n’était pas possible. Il a ensuite mis en cause mon propre cousin », enrage Youssef.

Et puis miracle, alors que la victime perdait espoir d’obtenir un jour justice, le procureur de la

République Xavier Bonhomme a demandé l’an passé le renvoi d’Hassen S. devant le tribunal correction­nel de Nice.

Une mise en examen

Le témoin assisté a fini par être mis en examen. Il lui est reproché des violences avec arme en récidive ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours.

Le suspect, au lourd casier judiciaire, déjà condamné pour des faits similaires à Grasse en 2010, a bénéficié jusqu’à présent d’une étonnante mansuétude de la justice. « C’est incompréhe­nsible, à moins qu’il ait été un indic, soupire Youssef. Après sa mise en examen, il a de nouveau été arrêté pour des violences et remis en liberté. Savoir que ce type est libre malgré plusieurs gardes à vue depuis l’agression, me rend fou. » La perspectiv­e d’un procès au mois de mai lui redonne un mince espoir en la justice, plus de 8 ans après les faits.

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(Photo DR) Youssef : « Savoir mon agresseur libre me rend fou. »

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