Santé : l’ordonnancedu docteur Macron
Le chef de l’État a annoncé hier des mesures sur l’organisation de l’hôpital, la rémunération des médecins, la fin de la tarification à l’acte ou encore sur les médecins traitants. Les syndicats, eux, demandent surtout une hausse des salaires.
C’est peu dire que le chef de l’État était attendu au tournant, hier, lors des voeux aux professionnels de santé. Face à un secteur sinistré et qui fonctionne de manière souvent dégradée, Emmanuel Macron a fait diverses annonces : réorganisation nécessaire de tous les acteurs de santé, valorisation des différentes professions ou encore décloisonnement des professions. Car il le sait et l’a redit, « l’épuisement est collectif » ,la « crise sans fin ».
« Une situation intenable »
Pour le docteur Macron, le diagnostic est simple : le système actuel n’est plus en mesure de répondre aux attentes et aux évolutions de la société. « La crise que nous vivons est multi-factorielle. On doit être lucide. On a formé moins de soignants durant des décennies, perturbé l’hôpital avec les 35 h, la gouvernance s’est alourdie et nous avons un cloisonnement ville-hôpital culturel. Nous sommes un pays qui vieillit et au fond, on a de plus en plus de maladies chroniques, de vulnérabilités à prendre en charge et là où notre système avait été conçu pour des pathologies ponctuelles, le besoin a été plus complexe. Cette situation est intenable. »
Selon lui, il faut s’attendre à « une situation qui va se dégrader en termes d’offres médicales » avec les départs à la retraite de nombreux médecins et des difficultés de recrutement. Le défi ? « Dégager du temps médical pour les médecins et repenser l’organisation collective. »
Du temps médical gagné à la ville et à l’hôpital
Pour aider à dégager du temps médical, Emmanuel Macron souhaite la généralisation des assistants médicaux pour les médecins. 4 000 ont déjà été recrutés. L’objectif est d’en recruter 10 000 l’an prochain, pour « délester les médecins des tâches périphériques » (tâches administratives). Il envisage aussi d’augmenter le taux de téléconsultations, de faire évoluer les compétences des autres professionnels de santé, de développer les infirmiers de pratiques avancées (IPA). À l’hôpital, un chantier sur les évolutions de carrières des praticiens hospitaliers et des paramédicaux sera au programme du prochain PLFSS (Projet de loi de finances de la sécurité sociale), pour « pleinement garder ceux qui sont fragilisés et consolider l’attractivité ».
Sur la problématique du recrutement des infirmiers – dans les écoles, 30 % des élèves arrêtent en cours de route –, le chef de l’Etat veut améliorer Parcoursup pour « mesurer la motivation », réfléchir à une meilleure orientation et revoir l’organisation des études.
Fin de la tarification à l’acte
À la tête des hôpitaux, un tandem administratif-médical sera instauré et une plus grande place sera donnée au conseil d’administration. Enfin, la tarification à l’acte, tant décriée, c’est « finito ». « On sort d’un financement à l’acte pour un financement sur la mission », a indiqué le locataire de l’Elysée.
Emmanuel Macron envisage aussi une réorganisation du travail à l’hôpital en redonnant une réelle autonomie à chaque service. Chacun d’entre eux s’organisera comme il le souhaitera. Pour les urgences, services particulièrement éprouvés, une réflexion sur la rémunération du travail de nuit, du week-end et de la pénibilité des missions, sera engagée.
Médecins de ville mieux rémunérés
Pour permettre une meilleure organisation des soins entre la ville et l’hôpital, le chef de l’État souhaite une « répartition plus juste des tâches ». Les médecins de ville seront mieux rémunérés s’ils assurent une permanence de soins plus larges et s’ils prennent plus de patients. Pour lui, la médecine libérale a des droits mais aussi des devoirs. « Il faut inciter ceux qui veulent travailler ensemble, à le faire ». Il parle de « construire une solidarité » avec des internes en stages chez les médecins généralistes.
Les prescriptions pour les patients
Pour que ces divers chantiers réussissent, « chacun doit prendre sa part, le patient aussi. Notre système a déresponsabilisé nos compatriotes ». Reste que 6 millions de Français n’ont pas de médecin traitant. Et que 600 000 patients souffrent de maladies chroniques et se heurtent à la difficulté de renouveler une ordonnance ou obtenir un rendez-vous. « Ils se verront proposer un médecin traitant d’ici la fin de l’année. » Si le patient n’en a pas, « il doit pouvoir appeler le 15 et être orienté vers les urgences ou un médecin ».
Le diagnostic posé semble le bon. Reste à savoir si les remèdes vont marcher, désormais.