Monaco-Matin

PLUS INSOLENT QUE JAMAIS 33 ANS APRÈS

L’artiste, jadis varois, Piotr Barsony réactive son personnage fantasque et libidineux des 80’s. Abandonnée­s par un éditeur en 2020, voici ses nouvelles aventures enfin publiées.

- LAURENT AMALRIC lamalric@nicematin.fr

Les lecteurs de L’Echo des Savanes se souviennen­t peut-être de cet être bizarre à peau verte et crête de coq jaune, aux penchants un brin scato, qui faisait les 400 coups au tournant des années 1980. Un changement à la tête du magazine BD aura sa tête, orientant alors son géniteur Piotr Barsony vers la peinture. Les premières amours de ce juif hongrois né en 1948 à Toulouse qui deviendra parisien à cheveux longs, tendance communiste, dans les années 1960.

Piotr vit alors entouré de musiciens dont Jacques Higelin, Brigitte Fontaine & co. Installé définitive­ment sur la capitale, il pouponne en 1976 avec Nicole Courtois la petite Maya, demisoeur d’Arthur H (avec lequel il a aussi collaboré) et prospère dans la BD. Revoir son Marc Edito émerger en 2022, plus de trente ans après ses derniers « exploits », promettait soit une plantade anachroniq­ue monumental­e soit des retrouvail­les inespérées. L’animal n’ayant rien perdu de sa superbe, ce sera finalement la seconde impression qui prédomine à la lecture de cet épais opus qui se frotte à tous les tabous de l’époque.

Le pitch

Écrivain et critique pour Art Niouze, Marc Edito se retrouve impuissant, mais voici qu’une mystérieus­e femme en burqa réveille sa libido...

L’interview À quand remonte la réelle réactivati­on de Marc Edito ?

Il y a cinq ans. Une petite maison d’édition [The Hoochie Coochie, ndlr] me cherchait. J’avais récupéré les droits de mon personnage et ils étaient enthousias­tes de le relancer. Finalement ça s’est mal terminé, juste avant l’impression en 2020 à cause d’un post Facebook en soutien à la journalist­e Zineb el Rhazoui... Ça fait quel effet de retrouver un tel personnage plus de trente ans après ?

Je n’en avais pas fini avec lui et j’avais oublié que je le connaissai­s si bien ! Il est un peu ridicule, mais c’est mon Mr. Hyde. Le fait de le faire juif comme moi, m’a libéré. Je l’ai actualisé, même si je pense que pour les jeunes de la culture woke, mon bouquin est illisible... Je vais être le salaud, fasciste, raciste, islamophob­e et antisémite ! J’avais déjà écopé d’une polémique en marge de la Manif pour tous à cause de l’album jeunesse Papa porte une robe [publié en 2004 avec un CD de Bumcello, puis réédité en 2014, ndlr] juste à cause du titre, car en réalité personne ne l’avait lu et il n’y avait pas la moindre dérive dans cette histoire !

Sexe, religion, fatwa, nazi homosexuel..., Ce nouvel album est un cadeau inespéré pour les intolérant­s de tous poils...

(rires) Oui tout le monde va me détester ! En vérité je me situe sur la tartufferi­e. Je m’amuse de tous ces faux “anti-racistes”, faux “tolérants”, ce narcissism­e des bien-pensants, etc. J’espère surtout que les gens vont rire en le lisant !

Que vous inspire la cabale antiBastie­n Vivès ?

Je n’ai pas envie de me mettre dans une polémique qui ne m’intéresse pas. La seule chose, c’est que je suis inquiet de cette politique de la pensée. Cela me rappelle trop les Gardes rouges.

Pourquoi Marc Edito déclare-til: “Saint-Tropez me manque” ?

C’est moi qui parle ! Ma maison de vacances était sur la route de Ramatuelle, domaine de la Pinède... Ma mère l’avait fait construire au début des années 1960. J’ai fini par la vendre dans les années 1990 quand ma BD s’est arrêtée. J’avais besoin d’argent. Quel dommage, car j’aime tellement cette région... Heureuseme­nt, j’ai l’un de mes meilleurs amis qui m’invite chez lui !

Le titre, L’Homme idéal, fait écho à votre série artistique sur la “femme idéale” ?

Elle a débuté il y a trente ans. Pour moi, le nouveau ferment de la rébellion allait passer par les femmes. Mes stickers en forme de silhouette ont été collés dans le monde entier. Ils accompagne­nt l’insurrecti­on féminine.

Vous croquez Beigbeder et Edwy Plenel. Quelle idée derrière ?

La caricature du premier est sympathiqu­e. Quant au second, je le connais très bien, j’ai milité avec lui [à la Ligue communiste révolution­naire, puis au sein du journal Rouge, ndlr]. Le propos est plus politique. Pour moi, il est devenu le tartuffe en chef. Tant mieux s’il prend la mouche et m’attaque ! (rires)

Êtes-vous ressorti essoré ou vivifié de ce pavé de 200 pages ?

La vérité c’est que la BD est un exercice très très dur comparé à la peinture. Alors si ça marche, il est évident que je continuera­i. Peut-être que les deux tomes de 1986 et 1989 seront aussi réédités... Je prévois surtout une grande exposition à Paris avec mes peintures et des planches qui dialoguent, côte à côte. Avec le recul et l’âge, je m’aperçois de la cohérence totale de mon travail.

« Marc Edito est un peu ridicule, mais c’est mon Mr. Hyde »

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