Un djihadiste niçois devant la cour d’assises antiterroriste
Clément Baur, un Niçois de 29 ans, et ses complices présumés sont jugés depuis le début du mois pour projet d’attentat pendant la campagne présidentielle de 2017.
Armes lourdes et gilets pareballes, un impressionnant dispositif de sécurité prend position sur le port de Nice en ce lundi de Pâques 2017. François Fillon est sur le point d’arriver quai Entrecasteaux. Il doit donner un meeting dans la capitale azuréenne.
Alors que la campagne présidentielle bat son plein, le service de sécurité du candidat Les Républicains s’est vu remettre quelques jours plus tôt les photos portraits de deux individus. Deux suspects identifiés par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
La menace serait des plus sérieuses. Ces deux hommes projetteraient de commettre un attentat contre un des candidats à la présidentielle. Elle est d’autant plus crédible en ce lundi de Pâques, à Nice, que l’un des suspects est né ici. Dans cette même ville. C’est là que Clément Baur a grandi, qu’il s’est converti à l’islam et radicalisé alors qu’il n’avait que 14 ans. C’est ici, à Nice, que débute l’errance de ce candidat au djihad faite d’alias et de déménagements de la France vers l’Albanie, de l’Allemagne vers la Belgique…
Arrêtés à Marseille
Jusqu’à son retour dans le Sud. À Marseille, où il sera finalement arrêté. Le lendemain du meeting niçois de François Fillon et à la veille d’une autre réunion politique, que doit donner cette fois Marine Le Pen justement dans la cité phocéenne.
Les enquêteurs restent persuadés que Baur et un ancien compagnon de cellule tunisien étaient sur le point de passer à l’acte. 3e
Même si les deux présumés terroristes s’en défendent devant la cour d’assises spéciale de Paris. Ils comparaissent depuis le début du mois, aux côtés de dix hommes suspectés de leur avoir fourni assistance, pour ce projet d’attentat en pleine campagne présidentielle.
Repérés par un cyber-policier infiltré
Un funeste plan dont les contours restent néanmoins flous. En dépit de quatre années d’instruction.
Le doute est-il néanmoins permis ? Les magistrats rendront leur verdict le 3 février prochain. En attendant, les deux suspects vont devoir s’expliquer. Dès le premier jour du procès, Clément Baur s’est présenté à la Cour comme un « prisonnier politique musulman », victime « d’apparences trompeuses ».
Son complice présumé, Mahiedine Merabet, va jusqu’à justifier la présence de 3,5 kg de TATP, un explosif artisanal, dans l’appartement marseillais où les deux hommes ont été arrêtés le 18 avril 2017 par sa « passion pour la chimie ». Lors de la perquisition, les enquêteurs ont également retrouvé un fusil-mitrailleur de type UZI. Celui-là même qui était exhibé dans une vidéo qui les avaient mis sur la piste une petite semaine au préalable.
On y voyait un message écrit à l’aide de balles 9 mm : « Loi du Talion ». Mais aussi un exemplaire du Monde dont la une était consacrée à la campagne présidentielle. La vidéo avait été postée sur la messagerie cryptée Telegram par Merabet. Le jeune Tunisien pensait converser avec un membre de l’État islamique en Syrie. Il avait affaire en réalité à un cyber-policier infiltré sur les réseaux. Ainsi débute la traque des deux suspects. Elle n’aura pas été aisée. Notamment en raison du profil complexe de Clément Baur, le Niçois. Fils d’un patron de PME et d’une commerçante, il a quitté sa ville natale dès l’âge de 17 ans. Ses parents, inquiets, avaient euxmêmes signalé sa disparition à la gendarmerie de La Trinité.
Ce Niçois qui se faisait passer pour un Tchétchène
Doué pour les langues, le jeune Azuréen a appris en autodidacte le russe et l’arabe. Au point que les deux femmes tchétchènes auxquelles il s’est marié religieusement le pensaient sincèrement originaire du Caucase.
Baur s’est construit une identité fictive de réfugié politique, allant jusqu’à demander l’asile dans son propre pays, la France ! Il a vécu d’alias en alias. En Belgique et en Allemagne, notamment. Il y aurait côtoyé diverses cellules djihadistes. Dont celle du Tunisien Anis Amri, avec lequel il était encore en contact une semaine avant que ce dernier ne tue douze personnes en fonçant à bord d’un camion sur le marché de Noël de Berlin. À Verviers, il aurait fréquenté Magomed-Ali Chamagov, poursuivi en Allemagne pour un projet d’attentat à l’explosif…
Avant de vouloir, lui-même, passer à l’acte ? C’est ce que doit déterminer la cour d’Assises de Paris.