Monaco-Matin

Toujours sous les feux

Chaplin - De Funès : l’expo phare de l’été

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Charlie Chaplin fut l’un des principaux inspirateu­rs de Louis de Funès – avec Laurel et Hardy, et l’impassible Buster Keaton. Mais au-delà de leur évident talent pour le mime, les similitude­s entre ces deux génies n’ont jamais été réellement mises en lumière. Cette omission est sur le point d’être réparée. Une exposition croisée sera organisée, l’été prochain, au musée Louis-de-Funès de Saint-Raphaël. Elle déménagera un an plus tard au Chaplin’s World, à Corsier-sur-Vevey en Suisse, dans l’ancienne maison où le créateur de Charlot vécut de 1952 jusqu’à sa mort en 1977.

Une enfance difficile

« Chaplin et De Funès étaient des enfants pauvres, souligne Nora Ferreira,

directrice du musée de SaintRapha­ël. Ils ont souffert de l’absence du père et ont été marqués par la figure maternelle. » Charlie et Louis s’inspirent également de leur mère. Le premier affirme dans son autobiogra­phie

(1) que Hanna Chaplin « était l’une des plus grandes artistes de pantomime que j’ai jamais vues. »

Louis, de son côté, jurait que sa mère fut, à son insu, son professeur de comédie : « Je suis un marbre à côté d’elle. »

L’art de la pantomime

Les deux artistes étaient des maîtres du burlesque avec un sens du « timing » parfait.

« Chaplin joue avec son corps comme d’un instrument, analyse la directrice du musée raphaëlois.

L’art de De Funès repose, avant tout, sur l’extrême mobilité de deux parties de son corps : le visage et les mains. »

La bonne taille pour faire rire

Louis mesurait 1,64 m ; Charlie le dépassait d’un centimètre. Cette taille a permis à Charlot de « mettre en contradict­ion son corps avec son allure », remarque Nora Ferreira. Comme en écho, De Funès affirmait : « Ma taille convient très bien au personnage que je me suis choisi – petit grincheux, empêcheur de tourner en fond. Elle m’a bien rendu service. »

Une dimension sociale et politique

Cet aspect de l’oeuvre de Chaplin est connu et documenté depuis des décennies. Il reste à explorer pour De Funès, réduit de son vivant à sa seule dimension commercial­e. L’interprète du Gendarme fait rire des puissants, ou prétendus tels, en les tournant en ridicule sans jamais provoquer de réaction de rejet à leur égard. Son modèle britanniqu­e donne à voir les invisibles, les exclus, les marginaux. Chacun à sa façon, ils font rire en éclairant la fameuse « fracture sociale » popularisé­e – bien plus tard – par Jacques Chirac.

Hommes-orchestres

La musique a toujours porté leurs performanc­es à l’écran. Que l’on se souvienne de la réparation de la Cadillac dans Le Corniaud, sur le tempo de La Denza de Rossini, directemen­t inspirée par la scène du barbier du Dictateur. Leurs filmograph­ies respective­s abondent de séquences dansées – et avec quel talent ! Tandis que Charlie fait la nique à Philippe Candeloro dans Les Temps modernes, Louis fait basculer Rabbi Jacob dans une autre dimension.

Oscar et César tardifs

Chaplin a dû attendre l’âge de 82 ans pour recevoir enfin un Oscar d’honneur à Hollywood en 1972. De Funès n’avait « que » 65 ans, le 2 février 1980, lorsque Jerry Lewis lui a remis un César « pour l’ensemble de son oeuvre ». Il ne lui restait alors que deux films à tourner, avant de s’éclipser.

1. Histoire de ma vie, par Charlie Chaplin,

25 euros, éditions Robert Laffont.

 ?? (Photos DR et Musée Louis-de-Funès) ?? Charlie Chaplin, à gauche dans les années vingt, et Louis de Funès sur le tournage de son avant-dernier film, La Soupe aux choux, en 1981. Ces deux génies jouaient des personnage­s apparemmen­t opposés, mais qui se moquaient ouvertemen­t des « puissants ».
(Photos DR et Musée Louis-de-Funès) Charlie Chaplin, à gauche dans les années vingt, et Louis de Funès sur le tournage de son avant-dernier film, La Soupe aux choux, en 1981. Ces deux génies jouaient des personnage­s apparemmen­t opposés, mais qui se moquaient ouvertemen­t des « puissants ».

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