Monaco-Matin

L’Opéra de Monte-

À la tête de l’Opéra de Monte-Carlo depuis le 1er janvier, Cecilia Bartoli se confie pour la première fois sur ce rôle qui marque une étape dans sa carrière et où elle entend à la fois être sur scène et conduire l’institutio­n vers une évolution.

- ENTRETIEN RÉALISÉ PAR CÉDRIC VERANY

Elle a l’accent qui chante, que l’on entend résonner dans les couloirs quand elle est en approche. Des coulisses au plateau, en passant par les bureaux, Cecilia Bartoli est chez elle à l’Opéra de Monte-Carlo depuis le 1er janvier. Maitresse à bord de ce vaisseau culturel dont la princesse de Hanovre lui a confié les clés pour succéder à Jean-Louis Grinda. Une passation qualifiée «en douceur » afin d’écrire une nouvelle partition sur la scène de la Salle Garnier. Dirigée pour la première fois par une grande voix, à la carrière singulière. La mezzo-soprano italienne, en effet, est une star. Dominant sa discipline et sa génération, s’étant produite sur les plus grandes scènes lyriques au monde. La Bartoliman­ia dure depuis trente ans chez les amoureux d’opéra.

Pour sa première interview de directrice, pour autant, elle ne reçoit ni sur scène, ni dans une loge - d’ordinaire terrains de rencontres des artistes mais dans son bureau. Comme pour marquer la transition. Une petite pièce où se font face deux tables : l’une pour elle, l’autre pour son mari Oliver Widmer, nommé directeur délégué dans son sillage. Dans cet espace, rien de glamour. À l’exception d’un horizon

J’ai envie de donner toute mon énergie et toute ma passion”

splendide sur la Méditerran­ée depuis l’unique fenêtre, qui contraste avec un mur à la peinture écaillée, qui doit bientôt être repeint.

Le retour de Rosina

Sur les étagères, comme marqueur de la prolifique carrière artistique de la nouvelle directrice, des piles de ses disques. Lequel la caractéris­e le mieux ? « Cette question est difficile » souffle-t-elle, « en trente ans chez Decca (sa compagnie de disques NDRL) je ne sais même plus combien j’ai fait d’enregistre­ments ». En y réfléchiss­ant, elle cite avec gourmandis­e deux albums qui lui tiennent à coeur. Celui consacré à Vivaldi, paru en 1998. « C’était la première fois que l’on enregistra­it des airs d’opéra de Vivaldi, et nous en avons vendu un million d’exemplaire­s » s’étonne-t-elle encore, un quart de siècle plus tard. L’autre, c’est son hommage à Farinelli, le chanteur castrat icône du XVIIIe siècle « C’était le Michael Jackson de l’époque, dans tous les sens : la grande carrière, les grands cachets, l’extravagan­ce. Ce disque où je lui rends hommage est intéressan­t, on y retrouve sa virtuosité et sa douceur ». Sur la pochette, la diva avait même osé le combo brushing et moustache façon Conchita Wurst pour se rapprocher de l’image de cet artiste androgyne singulier.

Un détail qui atteste de ce goût du jeu et pour l’incarnatio­n de personnage­s que Cecilia Bartoli explore sur scène. Le public monégasque a pu en juger début janvier. Pour ses premiers pas de directrice, la chanteuse s’est distribuée le rôle d’Alcina dans l’opéra éponyme d’Haendel, livrant une performanc­e impériale pour marquer son arrivée en Principaut­é. Elle réitéra en avril, dans une pièce de Rossini cette fois, le célèbre Barbier de Séville. Pour y reprendre le rôle de Rosina, qu’elle tenait en 1989 en foulant pour la première fois les planches de l’Opéra de Monte-Carlo. Le spectacle - comme tous les autres rendezvous de la saison - affiche déjà complet. Un point qui satisfait à la fois l’artiste et la directrice. Les murs de la Salle Garnier, et ses 500 fauteuils ne sont pas extensible­s. « Il faudra se dépêcher à réserver pour la saison prochaine », conseille avec malice, la nouvelle directrice.

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(Photos Fabrice Demessance) Cecilia Bartoli, sous les ors de la Salle Garnier, son nouveau terrain de jeu.

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