Mal-logement en France : un état des lieux inquiétant
Dans son nouveau rapport annuel, la Fondation Abbé Pierre dresse un tableau accablant sur le sujet pour Emmanuel Macron et son second quinquennat. Les femmes sont particulièrement touchées.
L« manque d’ambition », « pas de programme établi », « budget insuffisant »... En gros, la politique d’Emmanuel Macron en matière de logement s’oriente vers un zéro pointé, selon la Fondation Abbé Pierre, qui publie chaque année un état des lieux du mal-logement. Dans son rapport 2023, paru ce mercredi, la Fondation chiffre à 4,1 millions le nombre de personnes mal logées en France. Parmi elles, près d’1,1 million de personnes sont privées de logement personnel. Quant aux personnes sans domicile, elles seraient au nombre de 330 000.
Les chiffres montrent une « dégradation de la situation »
Plus largement, 12,1 millions de personnes seraient touchées, « à des degrés divers » par la crise du logement. Des chiffres qui montrent une « dégradation de la situation ». En effet, selon la Fondation, de plus en plus de ménages seraient impactés par la crise du logement, avec des répercussions sur la vie de famille, la santé, le confort, l’environnement quotidien ou les fins de mois. Pour la Fondation Abbé Pierre, le mal-logement est aussi genré... au féminin. Les femmes célibataires, qui bénéficient de moins bonnes
conditions d’emploi et de revenus, sont moins bien logées. Plus souvent en situation de précarité, les « risques d’habiter dans un logement indigne ou suroccupé, sont plus élevés pour les mères célibataires » .La Fondation souligne à ce titre que les familles monoparentales, constituées à 83 % de femmes seules avec enfants, sont surreprésentées parmi
les familles en difficulté. Plus du tiers d’entre elles (36 %) vit sous le seuil de pauvreté. Elles sont ainsi obligées d’accepter un logement social, avec une seule chambre, « au détriment de l’intimité et du confort ». Et comme pour enfoncer le clou, les clichés associés à la mère célibataire, « irresponsable ou vulnérable », ont la vie dure. Ce qui conduit à « un délai d’attente
» allongé pour accéder à un logement social. Même constat pour les femmes victimes de violences conjugales, un facteur aggravant, car la victime est souvent obligée de quitter son logement.
Et si elle n’est pas titulaire du bail, elle peut être menacée d’expulsion pour « occupation sans droit ni titre ». D’après la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), 80 % des femmes victimes de violence sont hébergées dans des dispositifs qui ne sont pas adaptés à leur situation, et près de 40 % de celles en demande d’hébergement seraient sans solution.
L’orientation sexuelle, un « facteur de vulnérabilité »
De même, la séparation est un « choc » plus important pour les femmes sur le terrain financier. En effet, leurs revenus disponibles chutent « d’environ 20 % après une séparation », tandis que les hommes ne perdent que 2,5 % en moyenne. Autre aspect de la précarisation des femmes en matière de logement, le vieillissement de la population. Les femmes, qui vieillissent plus pauvres et seules, sont « plus nombreuses » que les hommes à ne percevoir ni pension de retraite (en moyenne inférieure de 40 %) ni revenu d’activité. Enfin, l’orientation sexuelle apparaît comme un « facteur de vulnérabilité » face au logement. « L’invisibilisation des personnes LGBTQ + en difficulté est problématique, en ce qu’elle ne permet pas de questionner les mécanismes contribuant à leur précarisation », soulève le rapport.