Monaco-Matin

« Des mots écrits avec le coeur »

Ouvreur à domicile ce week-end, Dominique de Meyer a décidé de tourner la page de la compétitio­n. Le recordman grassois - 127 victoires ! - l’explique de vive voix... et par écrit.

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON

Dominique, pourquoi avoir voulu coucher noir sur blanc ci-contre votre dernier mot de rallyman ?

Ce qui m’a guidé, c’est juste l’envie d’adresser mon témoignage, mon ressenti, aux gens qui aiment le rallye. Leur dire tout ce que le sport auto m’a apporté, les joies, les peines, les découverte­s, les rencontres, tant de souvenirs indélébile­s... Voilà, un soir, chez moi, à Cabris, je me suis mis à la tâche. Et je n’y ai pas passé la nuit. Les mots sont venus vite, naturellem­ent. Des mots écrits avec le coeur.

Le 17 septembre 2022, au départ du Rallye du Pays de Fayence, savezvous qu’il s’agit de votre dernière course ?

34e

Non, je n’ai pas encore pris ma décision. On est proche de la fin, je le sens. Et puis,

durant ces deux jours, l’évidence me saute aux yeux. Je me rends compte que, même si j’ai une vie saine, même si je m’entretiens physiqueme­nt, le corps ne suit plus. À un certain âge, la passion ne suffit plus. C’est dur à accepter, mais il faut l’accepter. Le lendemain, à l’arrivée, je sais que je viens de conclure mon ultime chasse au chrono. Décision prise. Ferme et définitive.

Dans le baquet de cette Alpine A110 RGT bardée d’aides électroniq­ues au pilotage, la frustratio­n avait-elle pris le dessus sur le plaisir ?

Difficile à dire. C’est vrai que je n’ai jamais pris l’habitude de freiner en mode ABS. Globalemen­t, je n’ai pas retrouvé les sensations éprouvées autrefois au volant de la BMW M3 groupe A. Avec la ‘‘Béhème’’, on pouvait contrôler les dérives du train arrière. On maîtrisait. Là, si ça glisse, c’est trop tard. Tête-à-queue garanti !

« Je la caresse souvent du regard »

Vous avez donc vendu votre Alpine de course pour acheter une Porsche 911 GT3 RS de série. Pas vraiment une voiture de retraité...

Une voiture d’occasion sympathiqu­e, magnifique. 500 chevaux, 4 roues directrice­s, boîte 7 vitesses avec mode d’emploi à la carte (automatiqu­e, semiautoma­tique

- palettes au volant - ou séquentiel­le, ndlr). Des assistance­s électroniq­ues que l’on peut débrancher. Le bouton que je préfère, c’est celui qui ouvre les valves de l’échappemen­t. Sans turbo sous le capot, ça donne un son rageur. J’adore !

Elle date de 2016 mais on la croirait neuve.

Ne le répétez pas mais je la caresse souvent du regard, assis sur une chaise, dans le jardin. D’ailleurs, je passe plus de temps dehors que dedans. Depuis son acquisitio­n, voilà trois mois, j’ai dû couvrir 250 bornes grand maximum !

En fait, vous vous êtes offert une cure de jouvence ?

Absolument. On peut parler d’un retour aux sources. Vous ne croyez pas si bien dire car figurez-vous que j’ai disputé une seule et unique course sur Porsche : la première ! Le Tour de France automobile 1970, je m’en souviens comme si c’était hier. Avec l’ami Jacques Lions, on se partageait le volant d’une 911 à moteur 2 litres bien moins puissante. Ce weekend, je vais boucler la boucle, en quelque sorte.

64e

Cette participat­ion au Rallye Pays de Grasse Fleurs et Parfums en tant qu’ouvreur, vous l’avez préparé un peu, beaucoup ou pas du tout ?

Pas question d’arriver les mains dans les poches ! Avec Patrick (Ferré, l’un de ses copilotes « usés jusqu’à

la corde » qui l’épaule hier et aujourd’hui), on a fait les reconnaiss­ances. Certaines spéciales changent de sens. Il faut se mettre à la page. On part 15 minutes avant le premier concurrent de la course moderne. Dans les gros morceaux, col de Bleine (ES 4 et 7), Pont des Miolans (ES 5 et 8), j’espère qu’il ne me rattrapera pas, hein !

Pour conclure, si votre trajectoir­e de recordman jalonnée de 127 victoires était à refaire...

Je ne changerais rien. Aucun regret. Le jour où j’ai rencontré Didier Auriol, je me suis rendu compte que l’on ne faisait pas le même sport. Lui, il roulait sur une autre planète. Moi, je n’avais pas le talent mais ma passion et ma motivation m’ont tout de même permis de parcourir un bon bout de chemin.

 ?? (Photo G. L.) ?? C’est au volant de ce nouveau « joujou extra », une Porsche 911 GT3 RS, et chez lui, à Cabris, terre d’accueil de l’épreuve grassoise hier, que Dominique de Meyer vient d’entamer son autre vie de passionné.
(Photo G. L.) C’est au volant de ce nouveau « joujou extra », une Porsche 911 GT3 RS, et chez lui, à Cabris, terre d’accueil de l’épreuve grassoise hier, que Dominique de Meyer vient d’entamer son autre vie de passionné.

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