Le début de la fin ?
Demain matin, Élisabeth Borne va battre un record. Celui de la longévité d’une femme Première ministre de la République française. Pas de quoi pavoiser tant cet exploit n’a rien de reluisant : tenir 10 mois et 19 jours dans l’enfer de Matignon, soit un jour de plus qu’Édith Cresson (15 mai 1991/2 avril 1992) ne devrait pas l’inciter à sabrer le champagne.
Ce n’est pas le genre de la maison, et elle n’en aura de toute façon pas le temps. Car depuis ce lundi, notre Dame de fer à nous est sur tous les fronts. Sur tous les feux surtout. Une sorte de semaine décisive qui pourrait bien marquer le début de la fin. Mais la fin de quoi ? Celle d’un conflit
social parti pour durer malgré les mains à demi tendues de l’exécutif ? Ou celle d’une Première ministre que la feuille de route en forme d’ultimatum que lui a assigné le président de la République semble condamner ? La Semaine sainte éclairera peut-être les décisions de la cheffe du gouvernement, à condition qu’elle sache... à quel saint se vouer ! Car rien ne lui sera donné, tout lui sera rendu compliqué. À commencer par ses rendez-vous avec les partis politiques qu’elle recevra à Matignon. Enfin, ceux qui ont accepté. Les empêcheurs de tourner en rond du
groupe LIOT - celui d’un Charles de Courson héraut de la baston parlementaire d’il y a deux semaines seront les premiers à croiser le fer avec Élisabeth Borne, suivis mardi par Marine Le Pen qui ne lâchera rien... et l’autre Marine, Tondelier, la patronne des écologistes d’EELV, qui viendra, elle, parler violences policières et bassine de Sainte-Soline, mais pas retraites ! Et puis, faute d’insoumis ou de communistes, qui ont refusé son invitation, la Première
ministre refermera le ban de ses consultations politiques jeudi avec les trois mousquetaires LR (Éric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix) qui vendront chèrement leur peau, con voités qu’ils seront par Élisabeth Borne pour l’aider à poursuivre son programme de gouvernement et élargir sa majorité. Au milieu du gué, mercredi, en guise de plat principal, la Première ministre accueillera une intersyndicale plus remontée que jamais. Et dont les deux têtes de pont (l’expérimenté Laurent Berger de la CFDT, et l’inconnue Sophie Binet, toute fraîche secrétaire générale de la CGT) lui ont déjà promis de quitter les lieux séance tenante si les mots retraite et âge légal ne pouvaient être prononcés... C’est à 8 000 km de là, depuis la Chine où il entame précisément ce mercredi une (opportune ?) visite d’État de trois jours, qu’Emmanuel Macron comptera les points. Avancées, pas de côté ou reculades ? Les additions se paient toujours à la fin du repas. Le chef de l’État saura-t-il attendre le café pour solder celle de sa Première ministre ?
« Les additions se paient toujours à la fin du repas. »