Monaco-Matin

« JO : nous sommes dans les temps de passage »

Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des Sports, est en visite cet après-midi à Nice pour lancer la semaine olympique et paralympiq­ue. L’occasion d’évoquer tous ses grands chantiers.

- PROPOS RECUEILLIS PAR ROMAIN LARONCHE

Après avoir lancé ce matin la semaine olympique de manière nationale à Paris, Amélie Oudéa-Castéra a choisi Nice pour « saluer la mobilisati­on de tous les territoire­s ». La ministre des Sports viendra d’abord rencontrer les élèves de l’école Ariane Piaget, avant de se rendre au Musée national du sport pour visiter en avant-première l’exposition « Victoires », qui revient notamment sur les moments forts du sport, puis à l’Allianz Riviera, qui accueiller­a des matchs de foot des JO 2024.

Pouvez-vous développer l’importance de cette semaine olympique et paralympiq­ue ?

C’est un moment important pour l’engagement des Français autour de l’olympisme. Ce sera la septième édition de la semaine olympique et paralympiq­ue à l’école, mais cette année, on a un million d’élèves et d’étudiants mobilisés, contre 700 000 l’an dernier. La progressio­n est très importante : 3 000 projets ont déjà été déposés par les établissem­ents, 7 500 écoles et établissem­ents sont mobilisés. C’est très satisfaisa­nt de voir qu’il y a un vrai continuum éducatif. Cette année, c’est la thématique de l’inclusion qui a été retenue, avec l’idée d’ouvrir le regard des élèves sur le handicap et le para-sport.

À un peu plus d’un an du coup d’envoi des JO, sommes-nous déjà dans le sprint final ?

Oui, on peut le dire, mais c’est un sprint qui s’inscrit dans un marathon. Nous sommes dans les temps de passage, on avance bien dans tous nos chantiers. Il y a quatre dimensions : l’organisati­on, la préparatio­n de nos athlètes, l’engagement de tous nos territoire­s et l’héritage. Le compte à rebours est implacable, mais on a vraiment bien avancé.

Qu’attendez-vous de ces Jeux en France ?

J’attends une excellence sportive, une grande fête populaire, une réussite économique pour l’ensemble des territoire­s et une responsabi­lité sociale et sociétale. Je pense que nos Jeux olympiques et paralympiq­ues seront une nouvelle référence en matière d’événements sportifs internatio­naux, grâce à des engagement­s écologique­s et sociaux inédits qui ont été pris. Notamment sur le côté paritaire, car pour la première fois, nous aurons un nombre équivalent

d’athlètes hommes et femmes, mais aussi sur la sobriété budgétaire, puisque 95 % des installati­ons sont existantes ou éphémères, alors que 96 % du budget du comité d’organisati­on est issu de fonds privés. On souhaite porter un héritage fort, durable et utile à la nation pour devenir ce pays sportif qu’ambitionne­nt le président de la République et la Première ministre, à une époque marquée par la sédentarit­é et la dépendance de notre jeunesse aux écrans. Et les chiffres sont déjà encouragea­nts car, selon une étude récente, on a vu une progressio­n de 7 points de la pratique sportive dans notre pays.

Avez-vous fixé un objectif en nombre de médailles pour l’Équipe de France ?

Le président de la République nous a fixé comme objectif de rentrer dans le top 5 des nations les plus médaillées, à Paris, et de manière durable, sur le volet olympique et paralympiq­ue.

La réintégrat­ion possible des athlètes russes divise. Comment vous positionne­z-vous sur ce sujet ?

Déjà, il est important de rappeler que les recommanda­tions émises par le CIO (de réintégrer les sportifs russes et biélorusse­s sur les compétitio­ns internatio­nales) ne préjugent en rien des décisions qu’il prendra, de manière souveraine, le moment venu pour les Jeux de Paris 2024. À ce stade, il n’émet que des recommanda­tions

à destinatio­n des fédération­s internatio­nales. Le président de la République s’exprimera cet été sur ce sujet, et sa voix sera écoutée, même si, in fine, c’est le CIO qui est décisionna­ire. Il y a deux impératifs à essayer de concilier : le premier, c’est d’être résolument au côté de l’Ukraine, le deuxième, c’est de ne pas contreveni­r aux obligation­s onusiennes, qui posent un principe de non-discrimina­tion des athlètes, en raison de leur nationalit­é. Comment, dans cette guerre menée par la Russie contre l’Ukraine, on peut essayer de trouver un chemin qui permette de considérer un régime de neutralité pour des Russes. Le CIO a posé quelques premiers principes, mais n’est pas au bout de son mode d’emploi. Pour l’instant, il a indiqué il n’y avait pas la possibilit­é de sélection en équipes et ces athlètes ne doivent, ni de près ni de loin, avoir soutenu la guerre en Russie, ni être affiliés à l’armée.

Enfin, ils devront être parfaiteme­nt en conformité avec le programme antidopage.

Vous lancez un comité national chargé de renforcer l’éthique et la vie démocratiq­ue dans les fédération­s. Vous avez constaté trop de manquement­s ?

Je pense que dans la période récente, on a bien progressé dans la gouvernanc­e du sport français, pour bien clarifier les rôles et les responsabi­lités de chacun suite à la création de l’agence nationale du sport. La loi du 2 mars 2022 a amené plusieurs innovation­s importante­s, comme la parité dans les instances dirigeante­s des Fédération­s à l’horizon 2024 au plan national et 2028 au plan régional. Mais les crises récentes à la tête du GIP France 2023,

qui organise la Coupe du monde (de rugby), puis des Fédération­s de rugby et de foot, montrent que, par-delà la diversité des situations, il y a des leçons communes à en tirer. Il faut notamment faire progresser l’éthique, en renforçant le rôle des comités d’éthique dans les Fédération­s, mais aussi, pour préserver la réputation des Fédération­s, en faisant évoluer le régime de la mise en retrait des gouvernant­s, tout en respectant la présomptio­n d’innocence. En ce qui concerne la vie démocratiq­ue, il y a une nécessité d’avoir davantage de contre-pouvoirs et de débats. Enfin, il y a le thème de la protection des pratiquant­s et pratiquant­es, pour lutter contre toutes les formes de violences, notamment sexistes et sexuelles.

Est-ce qu’il y a un lien de cause à effet entre les trois crises que vous évoquez et cette création ?

Oui, même si ces crises sont désormais très largement derrière nous, on a besoin d’en tirer les leçons pour essayer de créer des conditions qui permettent d’éviter que ça ne se reproduise.

Noël Le Graët avait déclaré vouloir porter plainte contre vous pour diffamatio­n. Est-ce une source d’inquiétude ?

Non, car j’ai fait mon travail, je me suis appuyée sur un audit qui a été mené de manière indépendan­te et extrêmemen­t rigoureuse par l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche. Je ne me suis jamais écartée des conclusion­s qui ont été exprimées par ce rapport. La démonstrat­ion qui a été faite que Noël Le Graët n’avait plus la légitimité pour piloter cette Fédération a été reprise par l’ensemble des acteurs et des instances du football français.

Concernant la féminisati­on du sport, il n’y a que deux présidente­s sur 36 fédération­s olympiques. Comment faire pour avoir plus de parité ?

On peut aussi rappeler que l’on n’a qu’un tiers des éducateurs sportifs et 20 % de Directeurs techniques nationaux (DTN) qui sont des femmes, et que 5 % des retransmis­sions sportives sont consacrées aux sports féminins. Sur l’ensemble des métiers clés, pour piloter notre stratégie sportive, on a besoin de cette féminisati­on. Nous avons récemment réuni un groupe de travail, avec l’ensemble des parties prenantes, les organisate­urs, les diffuseurs... Ils se sont engagés avec moi pour sortir de cette situation. Par ailleurs, le décret qui protège les retransmis­sions en clair d’un certain nombre de grands événements sera revu pour faire plus de place aux sports féminins, comme le Tour de France.

L’objectif est de rentrer dans le top 5 des nations les plus médaillées”

Le Graët n’avait plus la légitimité pour piloter cette Fédération”

Un mot sur les clubs de foot de notre région. Monaco et Nice sont détenus par des investisse­urs étrangers (Dmitri Rybolovlev et Jim Ratcliffe). Est-ce devenu inéluctabl­e ?

Inéluctabl­e, je ne sais pas, mais ce qui est sûr, c’est que dans tous les championna­ts européens, les grands clubs attirent des investisse­urs étrangers. Si ça peut permettre d’accroître la compétitiv­ité des clubs français, qu’ils puissent conserver leurs pépites et améliorer la vitalité des centres de formation, c’est une bonne chose. Mais pour cela, il faut un engagement de long terme, et ça, c’est le travail qui est mené de manière vigilante sous l’égide de la DNCG. Quand je regarde les déclaratio­ns récentes d’Ineos à Nice, j’ai le sentiment qu’il y a une vraie volonté d’être durablemen­t investi dans le club, ce dont je me félicite. Et il y a une belle dynamique, puisque Nice est notre dernier représenta­nt en Europe, que je supportera­i.

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(Photo AFP) Amélie Oudéa-Castéra sera à l’Ariane, puis à l’Allianz Riviera aujourd’hui.

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