Monaco-Matin

Deux voisins à la barre pour des nuisances nocturnes

Tribunal correction­nel L’un accuse son voisin de lui avoir asséné un coup de poing quand le prévenu prône la légitime défense. Quinze jours avec sursis ont été requis contre ce dernier.

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Le tribunal correction­nel a été confronté a une affaire qui a rappelé les nuisances sonores d’un chef cuisinier, dont l’activité tumultueus­e vers 1 heure (du matin) a rendu le sommeil difficile à un voisin.

Un bref rappel de la situation scénique à l’audience évoque un comporteme­nt aberrant du cuisinier ce 10 juillet 2019(1). L’intensité bruyante portait atteinte à une personne logée dans l’immeuble « L’Estoril ». Mécontent, il cherchait à travers les étages la provenance de l’agitation effrénée. Assuré d’avoir découvert l’origine du trouble excessif, il frappait à la porte d’où émanait le vacarme.

« C’est la parole de l’un contre celle de l’autre »

Évidemment le ton montait et les noms d’oiseaux fusaient. Mais aucune brutalité. Jusqu’au départ du voisin tourmenté. Il le suivait dans l’escalier et lui décrochait un coup de poing. Conséquenc­e : deux jours d’ITT. Le président Florestan Bellinzona(2) rapproche les deux adversaire­s de la barre afin de s’expliquer réciproque­ment, sans heurts cette fois. Évidemment, on s’en doutait, les versions sont différente­s. « Il voulait rentrer dans mon appartemen­t, raconte le prévenu. Il m’a dit : va chez toi, dégage dans ton pays. Je ne suis pas habitué à me faire traiter de la sorte. »

Indigné, il poursuit : « Cet homme m’a empêché de fermer la porte. Alors, j’ai eu la réaction de me défendre chez moi ! Je ne suis jamais sorti dans les escaliers. Quand un bonhomme n’est pas dans son état normal, qu’il est violent, raciste et

vous prend par la gorge, il faut bien se protéger… » La victime réfute en bloc tout ce qui lui est reproché. « Je prenais des antidépres­seurs à l’époque. Dès que je l’ai quitté, ce Monsieur m’a suivi. Contusion, hématome, fracture du nez ont été diagnostiq­ués…

– Impossible, se défend aussitôt le présumé coupable. Une sciatique m’empêche de marcher correcteme­nt et je n’avais aucun intérêt à le poursuivre jusque chez lui… »

Le parquet, à la manière d’un arbitre

rend la sentence. « Même si tout était vrai, relève le substitut Emmanuelle Carniello, il ne suffit pas de donner un coup de poing pour régler l’affaire. Aucun élément du dossier démontre l’entrée chez le prévenu. Le lumbago ? On s’interroge ! C’est la parole de l’un contre celle de l’autre. La gorge ? Aucune trace n’a été relevée par les policiers. Dans l’immeuble de l’avenue Princesse-Grace, un employé a témoigné de traces de sang… sur un tapis rouge ! »

Quoi qu’il en résulte pour la parquetièr­e, « les violences sont caractéris­ées, injustifia­bles et confirmées par le gardien qui a alerté la police. Une peine avec sursis suffit. »

Me Daniel Tamisier, du Barreau de Nice, a estimé que le doute doit toujours profiter à l’accusé et il réclame la relaxe. Avant d’ajouter : « Mon client, apprécié par ses proches, est non violent. La victime prend de la mélatonine avant de se coucher, plus des antidépres­seurs.

Un mauvais cocktail propice à un état second. Ses déclaratio­ns sont assez confuses. Pas de caméra ! D’après le concierge, il n’y a pas eu de troubles anormaux dans le voisinage. On se retrouve dans un cas de légitime défense… »

Le tribunal a suivi les réquisitio­ns du ministère public à hauteur de quinze jours.

Il avait été fait opposition au jugement pas défaut le 5 octobre 2021.

Assesseurs : Olivier Schweitzer et Adrien Candau.

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(Illustrati­on J.-F. Ottonello) Malgré la défense qui a estimé que le doute profitait toujours à l’accusé, une condamnati­on est tombée.

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