Nicolas Philibert RENOUE « AVEC LE SOCIAL ET LA VIE »
Récompensé par l’Ours d’or à Berlin, « Sur l’Adamant » permet au réalisateur de s’immiscer dans un hôpital de jour atypique. Il nous en parle.
L’Adamant
« Les architectes qui l’ont conçu ont travaillé avec des patients et des soignants. Ils se sont réunis régulièrement pendant des mois pour imaginer un lieu comme celui-là. Il y avait au départ un centre de jour dans le pôle psychiatrique Paris Centre, sur trois étages, dans des locaux exigus, très chers. Un jour, le responsable, qui vivait sur une péniche, a soulevé ces problèmes et a soumis l’idée de faire un bel endroit sur l’eau, en argumentant que les fous sont toujours dans des bâtiments moches. Cela s’est concrétisé. L’Adamant est relaxant, apaisant, hypnotique… On a l’impression d’être à la fois au coeur de la capitale et en dehors. »
Démarche
« Pour faire un film documentaire, comme en fiction, on est bien obligé d’écrire un scénario… ou plutôt une note d’intention. Ensuite je suis bien obligé de me documenter et de m’imprégner un peu du sujet. Cependant, ce n’est pas cette notion qui m’intéresse car je ne fais pas un film SUR la psychiatrie mais EN psychiatrie. C’est-à-dire que je ne cherche pas à tenir un discours ou dire quoi penser aux spectateurs. Au contraire, je leur propose une rencontre, une expérience. De la même façon, lorsque je me lance dans un projet, je ne sais pas quels seront les protagonistes ni dans quelle direction je vais aller. Mais je ne tiens pas forcément à le savoir ! Mes films sont donc improvisés. Sans rien programmer, je me coule dans un endroit, parmi les gens qui le fréquentent et petit à petit, j’invente le documentaire. Il s’agit aussi de créer des conditions pour que les personnes aient envie de venir vers moi, de dire des choses et non pas d’extorquer des paroles. »
Thérapie
« La guérison passe par l’art, mais aussi par tout un tas d’autres choses. J’ai filmé un atelier dessin, des gens qui chantent… Sur l’Adamant, il s’agit d’une psychiatrie où les patients ne sont pas enfermés dans leur maladie. Ils ne sont pas ramenés à leurs seuls symptômes. Ils aiment aussi regarder le foot à la télé, se balader à la campagne, visiter des expositions, faire de la couture ou de la tapisserie. On s’appuie sur tout ce qui est possible pour les aider à renouer avec le social, la vie, la ville, le monde. On se sert donc des centres d’intérêt éventuels pour aider chaque personne à sortir de sa bulle, de son petit monde fermé. »