Le Château de Crémat replante DU BRAQUET, UN CÉPAGE ENDÉMIQUE
Pour mettre au point son futur vin rosé, le domaine situé sur les hauteurs de Nice plante des vignes en lieu et place de serres à l’abandon.
Ces dernières années, le Château de Crémat a bien changé. Il s’est refait une beauté, d’abord, mais ça, on vous l’a déjà raconté. Et depuis quelques semaines, ça boutiquait sévère aux alentours de la bâtisse, de quoi se demander si, sous les créneaux, ils n’allaient pas creuser des douves, les retenues d’eau étant un sujet à la mode. Point de douves, rassurez-vous. Ici, on reconstitue du patrimoine : « Je veux retrouver le domaine comme il était au début du XXe siècle, comme on peut le voir sur les photos anciennes », explique Thomas Derichebourg, industriel du propre et du traitement des déchets, toqué de bons vins.
Plantations et vendanges manuelles
Alors, petit à petit, il rachète toutes les vieilles serres aux alentours, qui tombaient en décrépitude après que les descendants de familles d’horticulteurs ont renoncé à produire des oeillets sur ces terres agricoles. Et il fait replanter des vignes. Un projet de 2,5 hectares au total, dont plus de la moitié ces derniers jours. Sur les coteaux du château, une pelleteuse s’affaire au terrassement. Ce sera la seule étape mécanisée. Tout le reste ici est fait à la main, de la plantation à la vendange. Et là, c’est le moment de planter. Sur la terre sèche, on distingue à intervalle régulier des bouts de bois, simplement enduits de cire à une extrémité. Ce sont les pieds de vigne, qui seront introduits sous terre à l’aide d’un pal, un outil qui ressemble à un énorme tire-bouchon. « Sous la cire, il y a les yeux, qui donneront les bourgeons. La réserve du bois va leur permettre d’éclore, quand ils auront emmagasiné assez de chaleur. Quand les premières feuilles sortiront, les racines vont commencer à pousser », explique Alain Vallès, maître de chais au Château de Crémat et au domaine de Toasc, également propriété de Derichebourg.
Résistant à la sécheresse
Ce que ces hommes plantent, c’est du braquet. Un cépage endémique des Alpes-Maritimes, qui ne semble guère utilisé au-delà du Var. Mais avec son fort besoin d’ensoleillement, sa résistance à la sécheresse, et sa capacité à garder ce que les professionnels appellent « une belle acidité », il contribue véritablement à l’identité des rosés de l’appellation Bellet.
« On sort des canons de qualité des rosés de Provence. Dans le langage courant, on parle de ‘‘vin rouge’’, de ‘‘vin blanc’’, mais on dit souvent juste ‘‘du rosé’’. Ça a un côté péjoratif. J’aime dire qu’à Bellet, on fait du vin rosé », détaille Alain Vallès. Et pas n’importe lequel : « C’est un vin rosé de gastronomie. Il a un très joli volume en bouche, des notes de roses, de roses fanées [et même de violette, ndlr], qui peuvent aller sur des notes épicées. C’est un vin de garde. Un bellet rosé de 2 ou 3 ans, c’est magnifique. »
Tellement beau, qu’ils sont à sec de rosé ! Le Château de Crémat n’en produisait plus, et la cuvée Tramontane, du domaine de Toasc, constituée de 100 % braquet rencontre un succès ébouriffant, qui a encouragé ce projet de plantations. Sur ces coteaux, en 2023, naissent donc les vignes du futur Château de Crémat rosé, qui verra le jour d’ici quatre ou cinq ans.
« Un très joli volume en bouche, des notes de roses, de roses fanées, et même des notes épicées »