Monaco-Matin

Celui de Cruyff »

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C’est dit

“Ici,

le coach a payé sa première amende dans sa carrière d’entraîneur. Il est arrivé en retard. On n’a pas laissé passer.” “Le

meilleur milieu du monde ? Une base De Bruyne Iniesta. Casemiro pour ses qualités défensives, Kanté pour l’aspect athlétique.”

Vos trois années passées dans le football amateur ?

Ce n’était pas facile. Il y a eu un retour brutal à la normale. Sans accompagne­ment. J’ai dû chercher à la hâte un lycée, retrouver vite un club qui voudrait bien de moi. J’y avais tellement cru jusqu’à la dernière minute que je n’avais rien anticipé. J’ai envisagé plusieurs fois d’arrêter le foot. Sportiveme­nt, ça ne se passait pas bien (à Drancy). J’avais été relégué en B. On m’a convaincu de continuer. Puis pareil l’année suivante. Comme je passais mon bac, il fallait faire un choix. Je voulais stopper en décembre, on m’a presque forcé à rester. Quelques mois plus tard, Strasbourg me repérait.

Vous avez dit à Onze Mondial que vous n’auriez pas misé un euro sur vous. ‘‘ Vous avez vu des potes percer comme Moussa Diaby (Leverkusen).

À ce moment-là, clairement non. Je n’allais pas à l’entraîneme­nt dans l’optique de signer dans un club pro, mais pour m’amuser.

Il gagnait assez bien sa vie pour un jeune joueur. Quand il rentrait au quartier, il voulait faire des activités, bouger. Il était dans une autre mentalité. Quand il nous dit, venez on va manger au resto. Il faut suivre. Je veux bien qu’il nous invite une fois, deux fois mais j’ai aussi de l’ego. Pour me faire un peu d’argent, j’ai livré des pizzas.

Votre premier match en profession­nel ?

Je m’en souviendra­i toujours. C’était à Lyon après la Coupe du monde. Nabil Fekir venait d’être sacré. Il commence sur le banc. Il se lève 30 secondes après moi pour aller s’échauffer. L’ambiance n’était jusque-là pas folle mais le stade se met à exploser. Le coach me rappelle. Je crois que c’est pour me rasseoir mais il me dit « quand il rentre, tu rentres ». En gros, il me fait comprendre que je vais devoir le serrer. Je me suis échauffé avec les frissons. Lors des cinq minutes qu’il joue avant moi, il est trop trop fort, je me suis demandé ce que je faisais ici (rires). Heureuseme­nt, j’ai fait une bonne entrée.

Après Strasbourg, il y a Monaco qui vient vous chercher. C’était une évidence ?

C’était la suite logique. Sans manquer de respect à Strasbourg, Monaco, c’est une autre dimension dans le football français et européen. Je ne voulais pas faire un trop grand pas à une période où beaucoup de joueurs sautaient selon moi des étapes. Je voulais rester dans une progressio­n linéaire. J’ai avancé à ma vitesse, à mon rythme. Ça m’a permis de mûrir. Je veux continuer sur cette pente-là jusqu’à ce que mon corps dise stop. Je ne veux pas d’une carrière en dent de scie.

Vous en êtes à plus de 100 matchs avec l’ASM, vous avez joué l’Europe, êtes devenu internatio­nal. Il est temps de voir autre chose ?

J’entends beaucoup ça à mon propos. Mais pourquoi ne pas rester à Monaco ? En 2017, l’ASM était la grosse équipe du championna­t. Pourquoi ça ne serait pas le cas la saison prochaine ? Et pourquoi pas avec moi ? Tout le monde me dit que c’est le moment de partir ou assure que je vais partir. Mais il y a des joueurs qui sont à leur prime et jouent à Lyon ou Marseille. Je ne m’interdis rien. Honnêtemen­t, je suis la dernière personne à penser à mon avenir.

À quel pourcentag­e de votre potentiel pensezvous être ?

(Il réfléchit). Je dirais 65-70. Allez, 75 %.

Êtes-vous nerveux avant les matchs ?

(Il insiste sur chaque mot) Pas du tout. Il y a une certaine concentrat­ion, une certaine exigence à avoir mais avoir la pression, c’est se mettre des bâtons dans les roues.

Cette insoucianc­e est votre force.

Oui, mais elle peut aussi être ma faiblesse. Je sais que je peux avoir un peu d’excès de confiance. Mais c’est quelque chose que je dois garder. C’est ce qui me préserve de la pression.

Où se situe votre marge de progressio­n ?

Je peux avoir tendance à jouer un peu trop facile ou à l’inverse à trop cogiter. En fait cette marge se situe avant tout dans ma tête. Quand j’aurais progressé là-haut, je me débarrasse­rai de beaucoup de choses.

C’est-à-dire ?

J’estime que quand tu es joueur profession­nel, tu es forcément technique. Donc si tu fais une faute technique, ce n’est pas parce que tu n’as pas de pied mais parce que tu as trop pensé. À chaque erreur que je fais, je sais que c’est avant tout parce que ça a trop tourné dans ma tête. Si j’arrive à régler ça, tout va suivre. Je serai plus juste dans mon jeu, plus serein tactiqueme­nt. Quand je ne réfléchis pas, je gagne plus de ballons dans les duels.

Tactiqueme­nt vous avez progressé ?

Ici, on me dit que je suis devenu fainéant, que je ne cours pas beaucoup (rire).

Moi je pense que c’est surtout parce que je suis souvent mieux placé, dans les bonnes zones, et j’ai moins d’erreurs à rattraper. Je prends ça comme un compliment !

Avez-vous un modèle au milieu de terrain ?

Pas forcément mais quand j’ai commencé à jouer, il me manquait quelques trucs que je voyais chez certains joueurs. On me disait que j’avais le coffre pour casser des lignes avec le ballon et Ndombélé le faisait naturellem­ent. J’aimais regarder comment il le faisait, à quel moment du match. J’observais aussi beaucoup Yaya Touré à City. C’était un faux lent. On avait l’impression qu’il était deux de tension alors qu’il était hyper puissant. Kovacic est un peu comme ça aussi.

“Je fais tout pour qu’on ne me dise pas que j’ai changé.”

Quelle est votre vision du football ?

J’aime bien le football de Cruyff. Il y a quelques années, comment l’Ajax jouait, c’était impeccable. Du jeu de face, deux touches de balle max. Toute l’équipe est touchée, ça part vite au sol. Il n’y a presque pas de un-contre-un, on est toujours dans une recherche du joueur libre avec des courses coordonnée­s.

Ça, c’est mon football (sourire). Je pars du principe que le ballon va toujours plus vite qu’un joueur. J’aime dynamiser le jeu. Si je peux faire la passe en une touche, pourquoi en utiliser trois ? Pour un spectateur, il n’y a rien de plus beau.

Je suis la dernière personne à penser à mon avenir”

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