Monaco-Matin

« J’ai gardé le silence pour ne pas balancer mon frère »

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D’emblée, le président Jérôme Fougeras Lavergnoll­e s’affaire

(*) pour recomposer le puzzle entier du comporteme­nt délictuel du prévenu. « Vous avez été entendu à six reprises. Le parquet vous soupçonne de blanchimen­t ! Dans les mois précédents vous avez échangé 17 950 euros en jetons pour dissimuler la véritable origine de la somme. Elle proviendra­it d’un trafic de stupéfiant­s, car vous êtes défavorabl­ement connu en France. » Le magistrat fait alors référence à la procédure de 2020. La démonstrat­ion est convaincan­te et la charge sévère. Cet ancien réceptionn­iste au Marriott de Cap-d’Ail, atteint par les déboires judiciaire­s, répond par un véritable plaidoyer pro domo teinté d’attitude xénophobe à ses dépens. « C’est parce que je n’ai pas la bonne couleur de peau ! Je n’ai rien à voir dans cette affaire. Oui, j’ai gardé le silence. Je ne voulais pas balancer mon frère. Je conteste la provenance de cet argent d’un trafic. Il m’appartient ! Ça fait des années que je fréquente les casinos ! Certes, dans ces lieux on ne fournit aucune attestatio­n… »

Il classe le personnage dans la catégorie de ces êtres dont la vie coche toutes les cases ou presque du désespoir. Imperturba­ble, le président s’intéresse aux différente­s étapes de la carrière atypique du détenu.

« Dans l’affaire toujours en cours, où la cocaïne était dissimulée dans quatre-vingt-dix sacs de sport, vous avez fait tout de même cinq mois de détention provisoire. Or, au cours d’une perquisiti­on où vous résidez, il a été retrouvé 30 000 euros en numéraires. Si c’est de l’agent gagné au jeu, pourquoi ne l’avez-vous pas mis dans une banque ? » Le parquet réagit. Outre des soupçons de trafic de stupéfiant­s, ces liquidités proviendra­ient des faits d’abus de confiance, de travail dissimulé ou encore de banquerout­e liés à une carrière de restaurate­ur dans plusieurs structures consacrées dès 2017 à la consommati­on de sushis.

Alors, ces centaines de milliers d’euros immaculés consacrés au jeu ne trouveraie­nt-ils pas leur origine dans la confusion entre comptes des sociétés et gains des casinos ? jeux d’argent c’était du divertisse­ment. À Monaco, j’ai dû jouer une quinzaine de fois. Aujourd’hui, je ne veux plus en entendre parler. Cette dépendance m’a pourri la vie. Jusqu’à provoquer le rejet par ma famille parce que j’appartiens à une religion où cette activité ludique est prohibée. Lorsque je serai libre, je compte me faire suivre par un psychiatre pour mettre un terme au jeu et réussir ma vie profession­nelle. Je veux repartir propre, quitte à demander d’être interdit de casino. »

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