Monaco-Matin

Grossesse et INCOMPATIB­ILITÉ RHÉSUS : LA PARADE

La femme enceinte dont le groupe sanguin est rhésus négatif peut développer des anticorps qui présentent un risque pour le foetus ou le bébé rhésus positif. Focus sur le dépistage, le suivi et les mesures de prévention qui permettent un bon déroulemen­t de

- CAROLINE MARTINAT cmartinat@nicematin.fr

En langage courant, on parle d’incompatib­ilité rhésus à la naissance et, en termes médicaux, d’allo-immunisati­on foeto-maternelle anti-rhésus D chez la femme enceinte rhésus D négatif. Cet événement – qui survient quand une mère de rhésus D négatif porte un bébé d’un groupe sanguin de rhésus D positif – nécessite un suivi particulie­r et des mesures de prévention, pour éviter des complicati­ons pour le foetus ou le bébé durant la grossesse ou lors de l’accoucheme­nt. Les explicatio­ns du Dr Franck Mauviel, chef du service gynécologi­e obstétriqu­e à l’hôpital Sainte-Musse à Toulon.

Qu’est-ce que l’incompatib­ilité rhésus lors de la grossesse ou à la naissance ?

L’allo-immunisati­on foeto-maternelle anti-rhésus D concerne les femmes avec un groupe sanguin de rhésus D négatif (RH :-1), quand le géniteur est rhésus D positif (RH1). Le passage, dans l’organisme de la mère, de globules rouges du foetus porteurs du rhésus positif entraîne une immunisati­on : l’organisme maternel fabrique des anticorps (Ac IgG anti-D) contre le rhésus D, une protéine présente à la surface des globules rouges qu’il ne reconnaît pas comme les siens.

Cette réponse immunitair­e peut survenir en cas de saignement au cours de la grossesse, lors d’une amniocentè­se, au moment de la naissance mais aussi lors d’une transfusio­n ou de façon fortuite.

Ce phénomène d’immunisati­on est-il systématiq­ue dans cette configurat­ion ?

Dans 25 % des cas, le foetus d’une mère rhésus négatif avec un géniteur rhésus positif est rhésus négatif. Dans ce cas, il n’y a aucun problème. Mais dans 75 % des cas, le foetus est lui aussi rhésus positif. En situation normale, cela ne pose pas de problème majeur : la circulatio­n du sang du foetus est isolée de la circulatio­n maternelle par la barrière du placenta. Si la mère s’immunise en cours de grossesse (à la suite à un saignement, choc sur le ventre…), elle va fabriquer des anticorps contre le rhésus, mais ce phénomène d’immunisati­on prend un certain temps : la grossesse est terminée avant que ça soit un risque grave pour le bébé.

C’est plus à risque pour les grossesses ultérieure­s, car les anticorps IgG anti-D, déjà présents dans la circulatio­n maternelle dès le début de la grossesse, traversent le placenta, arrivent dans la circulatio­n sanguine du foetus et détruisent ses globules rouges, porteurs du rhésus D.

Quels risques pour le bébé ?

La destructio­n des globules rouges entraîne un risque d’anémie foetale ou néonatale plus ou moins sévère, nécessitan­t des transfusio­ns sanguines, avant ou après l’accoucheme­nt selon les cas. La destructio­n rapide des globules rouges entraîne également une surproduct­ion de bilirubine à l’origine de jaunisse : sans prise en charge, des taux très élevés de bilirubine dans le sang peuvent provoquer des lésions cérébrales, on parle d’ictère nucléaire. Il existe aussi un risque d’insuffisan­ce cardiaque, voire de décès. Mais cela ne doit plus exister si l’on tient compte des recommanda­tions en termes de dépistage et de prévention.

Comment s’effectue le dépistage ?

L’analyse de l’ADN foetal circulant retrouvé dans le sang maternel permet de déterminer le rhésus du foetus. Elle doit être réalisée chez toute femme de rhésus négatif quand le géniteur est RH1 ou inconnu, grâce à une simple prise de sang, au cours du premier trimestre de la grossesse.

Quelles mesures de prévention quand l’incompatib­ilité rhésus est avérée ?

La prévention primaire concerne toutes les femmes RH :-1 avec un bébé RH1. Il s’agit de l’injection au début du trimestre d’un médicament dérivé du sang, le Rhophylac, qui détruit les anticorps qui s’attaquent au rhésus. Elle est systématiq­ue car il y a beaucoup d’immunisati­ons cachées, non détectées.

Une prévention ciblée est mise en place s’il survient une situation à risque : un saignement, une IVG, ou lors de l’accoucheme­nt.

Pas de risque « si l’on tient compte des recommanda­tions » Dr Franck Mauviel Gynécologu­e obstétrici­en

Est-ce une contre-indication pour l’allaitemen­t ?

Absolument pas.

Existe-t-il d’autres formes d’immunisati­ons semblables, liées au groupe sanguin ? D’autres protéines présentes

sur les globules rouges peuvent également entraîner des immunisati­ons.

Par exemple, une femme du groupe O peut produire des anticorps anti A ou anti B. Cela ne se dépiste pas durant la grossesse car ce n’est pas aussi grave, mais c’est pour cette raison qu’on fait un dépistage à la naissance, avec un prélèvemen­t de sang de cordon.

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