Sexualité masculine : COMMENT ÉVITER LA PRÉCIPITATION ?
L’éjaculation prématurée, qu’elle soit présente depuis le début de la vie sexuelle ou secondaire à d’autres troubles, se traite par différentes approches. À condition d’en parler et de consulter.
C’est un trouble relativement répandu – 5 à 10 % des hommes seraient concernés – mais qui a peu l’honneur de la presse grand public. En cause, des tabous persistants autour de la sexualité. Avec des conséquences non négligeables pour les hommes concernés. « Comme souvent en matière de dysfonction sexuelle, les hommes souffrant d’éjaculation prématurée ont beaucoup de difficultés à en parler, et ne savent pas vers quels professionnels se tourner », regrette le Dr Carol Burté, andrologue et sexologue à Cannes et au CHPG, à Monaco. Résultat : le trouble est peu pris en charge, laissant des hommes, des couples, dans la détresse. Pourtant, ce trouble, une fois diagnostiqué, peut bénéficier de thérapies (comportementales et cognitives) efficaces et de traitements médicamenteux. Le point avec le Dr Carol Burté.
Comment définit-on l’éjaculation prématurée ?
Il s’agit d’une éjaculation qui survient avant – ou très vite après – le début de la pénétration vaginale ou d’une autre stimulation sexuelle.
Le contrôle de l’éjaculation est perçu par les hommes concernés comme nul ou faible.
Cela sous-entend-il que l’éjaculation est « contrôlable » ?
On ne peut pas vraiment contrôler une éjaculation ; comme toutes les autres réactions sexuelles, c’est un réflexe, qui par définition échappe à la volonté.
Par contre, on peut différer le moment où elle survient, en gérant le niveau de l’excitation.
Est-ce là que le bât blesse chez les 5 à 10 % d’hommes concernés ?
Lorsqu’il s’agit d’éjaculation prématurée dite primaire (qui existe depuis le premier rapport sexuel), la cause est en effet souvent liée à un mauvais apprentissage de la gestion de l’excitation. C’est différent lorsque ce trouble s’installe chez un homme qui n’avait jusque-là pas de difficulté (éjaculation prématurée dite secondaire) ; dans ce cas, on retrouve plutôt associées une pathologie sous-jacente ou une dysfonction érectile (trouble de l’érection).
Comment les hommes concernés vivent-ils cette dysfonction ?
Même si l’éjaculation prématurée est source de détresse et d'anxiété chez ceux qui en souffrent, mais aussi chez leurs partenaires, il est rare qu’ils en parlent. D’autant que la plupart d’entre eux ne savent pas à qui s’adresser ; ils cherchent des informations sur Internet, tentent de suivre les nombreux conseils qu’on peut y trouver, avec en général des résultats très décevants. D’où un découragement et un renoncement à consulter, d’autant plus regrettable que des solutions existent.
Quelles sont-elles ?
Plusieurs méthodes sont à disposition : depuis les thérapies comportementales et cognitives – qui donnent des résultats très intéressants dans ce domaine – jusqu’aux traitements médicamenteux en passant par la thérapie corporelle, la rééducation, la méditation, la relaxation, l’hypnose, etc.
Comment agissent les médicaments contre l’éjaculation prématurée ?
Ils permettent de différer le moment de l'éjaculation, ce qui amène une amélioration rapide du symptôme. Deux médicaments ont fait la preuve de leur efficacité dans des études cliniques et ont obtenu une AMM :
(1) la dapoxetine (Priligy) qui est un inhibiteur de la recapture de la sérotonine (neuromédiateur principal impliqué dans l'éjaculation) de courte durée d’action.
Il s’agit d’un traitement « à la demande » ; l’homme le prend en prévision d’un rapport sexuel. Du fait de son élimination rapide, s’il y a des effets secondaires (étourdissements, nausées, maux de tête), ils sont très limités dans le temps. Le second est un spray anesthésiant (Fortacin), à pulvériser sur le gland dans la demi-heure qui précède la pénétration. Il est constitué d’un mélange de lidocaïne et prilocaïne. Comme il a un effet local, en dehors de rares allergies ou d’un mauvais dosage, il est bien toléré. Utilisé de façon régulière, il permet d’habituer le cerveau à recevoir des messages moins intenses de cette partie du corps, et contribue ainsi à diminuer l’excitation.
« Le contrôle est perçu comme nul ou faible »
Les médicaments suffisent-ils à traiter le trouble ?
Non. La prise en charge de l'éjaculation prématurée doit être intégrative ; il est important qu’elle combine les approches médicamenteuses et les conseils comportementaux visant à aider les patients à mieux gérer le niveau de l’excitation.
Il s’agit de l’amener à être conscient de ses sensations, à respirer calmement, à relâcher ses muscles, à faire des pauses… Et si l’homme est en couple, il est préférable d’intégrer le ou la partenaire à la prise en charge.