Une exposition sur l’Égypte aux accents mentonnais
L’hôtel des Ambassadeurs accueille dès aujourd’hui le public pour une exposition consacrée à un ouvrage rarissime – La Description de l’Egypte – conservé à Menton grâce au Gal Partouneaux.
Par principe, les plus beaux trésors sont souvent cachés. L’exemplaire complet de La Description de l’Égypte, soigneusement conservé dans les réserves de la bibliothèque de Menton, en est un bel exemple. Mais par principe, aussi, les trésors méritent d’être ponctuellement partagés. C’est pourquoi dès aujourd’hui, et jusqu’au 7 juin, l’hôtel des Ambassadeurs accueille une exposition tournant autour de cet ouvrage exceptionnel. À l’initiative des Grandes conférences de Menton.
Seulement trois exemplaires en France
« La campagne d’Égypte menée par Bonaparte était avant tout militaire. Il voulait contrecarrer les Anglais et ouvrir les portes vers l’Orient. Sur ce plan, ça a été un flop. Mais il était accompagné de 167 savants qui pendant trois ans, dans des conditions affreuses, ont relevé, dessiné, rapporté tout ce qu’ils pouvaient. Car il s’agissait d’une civilisation qu’on regardait mais qu’on ne comprenait pas », explique la présidente de l’association, MarieJosé Rizzi. Insistant sur le fait que l’égyptologie moderne n’aurait pas pu exister sans ce travail de titan. Devenu Napoléon, l’empereur exprime le souhait, dans les années qui suivent, de faire une édition pour centraliser les recherches de chacun. Une édition impériale est tirée à 1 000 exemplaires. « Il n’en
reste plus que 20 dans le monde entier. Trois en France… dont un à Menton ! Les deux autres à la bibliothèque du Sénat et à Polytechnique », souligne Marie-José Rizzi. Précisant que l’ouvrage représente une telle valeur que beaucoup d’exemplaires ont été vendus à la découpe. Comment l’un des rares survivants a-t-il atterri dans la Perle de la France ? La réponse tient en un patronyme : Partouneaux. Car
celui qui a donné son nom à une rue mentonnaise était un compagnon des premières campagnes de Bonaparte. Ce que l’on sait moins, c’est qu’il était l’époux de Louise de Bréa – d’où les attaches locales. « Il reçoit la collection complète de La Description de l’Égypte des mains de Louis XVIII pour services rendus. Ses héritiers en ont fait don à Menton », résume Marie-José Rizzi. L’ouvrage est impressionnant
à plusieurs titres. Du fait de son contenu, mais aussi de son apparence. Déployé, chacun des 23 volumes (treize de planches et dix de texte) mesure en effet… 1,40 mètre ! « Au total nous avons fait 400 photos des planches, et en avons choisi 60 pour l’exposition. » Les reproductions accrochées au mur sont complétées par deux ouvrages d’exception, ajoute la responsable des Grandes conférences. La grammaire égyptienne de Champollion, absolument unique. Et une Encyclopédie de Diderot authentique, naturellement ouverte à la page Égypte.
Questions novatrices
« Les 1 000 exemplaires de La Description de l’Égypte ne comportaient pas l’atlas pour des raisons de secret-défense. Le nôtre est complet précisément parce qu’il s’y trouve », note de son côté l’archéologue Christine Didier, co-organisatrice de l’exposition. Affirmant que les textes sont des mémoires scientifiques importantes : « On fait le point sur une question, à chaque fois novatrice. Il faut dire que Bonaparte avait recruté les meilleurs dans leur domaine dès lors qu’ils étaient volontaires », résume-t-elle. Admirative face aux planches qui demandaient chacune six mois aux graveurs. Et reconnaissante envers la mairie de leur avoir permis d’approcher l’ouvrage pour le photocopier. « Ce serait dommage de ne pas partager un tel patrimoine. C’est une occasion de voir de manière concrète ce que l’on apprend en cours », glisse l’adjointe à la culture, Stéphanie Jacquot. Consciente que les collégiens, dont l’Égypte est au programme, auraient tout intérêt à venir visiter l’exposition. Une expo que les organisatrices souhaiteraient, pour leur part, faire ensuite voyager.