Croissance : “Le Maroc a besoin d’un second souffle pour se battre dans la cour des grands”
La croissance économique au Maroc est-telle repartie à la hausse comme le traduisent les taux annoncés par les dernières notes de conjoncture et notamment de mai 2018 ?
Celle du Ministère des Finances, sur la base des données du mois de mars, affirme qu’après «une année 2017 marquée par l’accélération du niveau de croissance à 4,2%, cette dernière devrait revenir à 3,2% en 2018».
Pour sa part, la DEPF constate que l’activité économique, hors agriculture, devrait afficher une relative accélération tirée par l’amélioration du secteur tertiaire et des activités secondaires exportatrices, sachant que les exportations hors OCP se sont favorablement comportées à fin avril 2018, traduisant une bonne dynamique à l’export de secteurs phares, dont l’automobile et l’aéronautique. Et surtout, l’effort d’investissement devrait se maintenir en rapport avec la poursuite de l’évolution favorable de ces baromètres.
Pourtant, ces bons constats chiffrés ne se traduisent pas au niveau du climat économique, et n’induisent toujours pas une amélioration de la confiance des opérateurs. La question est donc de savoir, partant de ces données, si l’économie marocaine est sortie de la morosité économique de l’après-crise financière de 2007-2008 et, auquel cas, pourquoi le taux de sa croissance n’est toujours pas significatif ? Nous avons vérifié ces constats auprès d’un banquier dont le métier s’exerce au niveau de tous les secteurs économiques. M. Mohamed Agoumi, Directeur Général en charge de la Coordination Internationale à BMCE Bank of Africa et par ailleurs économiste éprouvé, qui considère que :
«Certes, sur les trois ou quatre dernières années, nous étions dans une situation de faible croissance où l’Europe, notre client principal, peinait à retrouver des niveaux de croissance importants.
Mais, fort heureusement, depuis l’année passée, le pays a repris le chemin de la croissance. Avonsnous, pour autant, rattrapé le retard accumulé durant ces années de crise européenne ? Le monde étant ce qu’il est, probablement pas.»
Le poids du passé
Pour M. Agoumi, plusieurs indicateurs d’importance attestent de constat.
Premièrement, les délais de paiement entre les entreprises sont extrêmement longs. Deuxièmement, les défauts de paiement restent importants, preuve en est que le taux de sinistralité du système bancaire a encore augmenté cette année à plus de 7 %. C’est un chiffre élevé pour le Maroc, alors qu’il fut un temps où il se situait tout au plus à 3 %.
Cela signifie éloquemment que l’économie n’est pas encore libérée du poids de cette période récente difficile et que cet état d’esprit général morose, est légitime.
Pour M. Mohamed Agoumi, il y a au moins trois raisons structurelles explicites à cette situation contradictoire :
«La première, dit-il, porte sur le plan administratif parce que l’accélération des décisions n’est pas encore acquise.
Car, la croissance, ce sont deux choses. D’abord, une santé économique, mais surtout, la rapidité d’exécution des transactions économiques. Plus celles-ci sont rapides, plus l’État et les acteurs économiques gagnent de l’argent. C’est ce que l’on appelle la vélocité de la monnaie.»
Il y a des pays où les choses vont beaucoup plus vite. Il est clair qu’il faut un process nouveau pour accélérer le rythme de réalisation des investissements. Certes, on entend des choses intéressantes, mais sans en voir la traduction sur le terrain. Et cela constitue