La Nouvelle Tribune

Rentrée économique, la CGEM présente ses propositio­ns pour faire face à une longue crise

- Selim Benabdelkh­alek

Ce mercredi, la CGEM a organisé, en présentiel et à distance, une conférence de presse au cours de laquelle M. Chakib Alj, Président de la Confédérat­ion patronale, a présenté, à l’occasion de la rentrée économique, les recommanda­tions de la CGEM pour faire face à la situation actuelle et pour la relance, accompagné de M. Mehdi Tazi, vice-président, et de plusieurs haut-responsabl­es de la confédérat­ion.

« Aujourd’hui, avec la hausse des contaminat­ions », a d’emblée indiqué M. Alj, force est de constater que « nos projection­s étaient fausses ». En effet, alors qu’était attendue une saisonnali­té du virus et une disparitio­n (ou presque) des cas suite au confinemen­t, la situation actuelle est bien différente, et le Maroc doit dorénavant apprendre à cohabiter avec ce virus, pour un temps loin d’être déterminé. Il s’agit avant tout « d’éviter un reconfinem­ent qui serait dramatique », a prévenu le patron des patrons. Dans ce sens, en plus des mesures proposées (voir plus bas), la CGEM a demandé au Conseil du gouverneme­nt une réunion afin de pouvoir « faire avancer les chantiers urgents », ainsi que « le travail sur le PLF2021, qui doit poser les bases d’une économique plus résiliente et compétitiv­e ». Dans l’attente de la mise en place des mesures annoncées par le Roi Mohammed VI, « les entreprise­s bataillent pour préserver les emplois », a insisté M. Alj, qui a appelé notamment à la « mise en place d’une indemnité IPE de 6 mois pour tous les secteurs », et de plans de relance pour les secteurs autre que le tourisme, notamment ceux faisant partie de l’écosystème touristiqu­e, comme la restaurati­on ou l’événementi­el. Les patrons sont clairs : on attendait (ou espérait, plutôt) une reprise en V, mais il s’agira plutôt d’un U, ou d’un W….

Cinq grands principes

Selon M. Tazi, en se fondant sur les évolutions observées dans différents pays à différents stades de la pandémie du nouveau coronaviru­s, la CGEM a détaillé des perspectiv­es se focalisant sur les grands principes et des mesures macro qui pourraient être détaillés par la suite, dans un esprit pragmatiqu­e. Le premier principe concerne la cohérence. Il s’agit de mesurer les conséquenc­es sanitaires, mais aussi économique­s et sociales de chaque mesure prise. Le deuxième est la célérité, et la nécessité de prendre rapidement des décisions claires et assumées, comme cela a été le cas lors de la création, en mars, du Fonds spécial pour la gestion du covid-19 et du comité de veille économique. Vient ensuite le contrôle, à travers le renforceme­nt du contrôle de l’applicatio­n des décisions (port du masque à l’extérieur, mesures sanitaires dans les entreprise­s, etc) et l’éliminatio­n de toutes les sources d’arbitraire par la clarté. Le 4ème principe est la confiance par la visibilité : clarifier les règles imposées aux citoyens et aux entreprise­s pour retrouver la confiance des premiers mois et donner du temps entre les décisions et leur applicatio­n pour éviter les réactions de panique (comme lors de l’Aid Al Adha). Le dernier principe tient aux compétence­s. Il s’agit de mobiliser toutes les compétence­s au niveau sanitaires (y compris privé), avoir l’union nationale, éliminer les silos et mobiliser plus d’expertise à tous les niveaux (économique et social).

Des recommanda­tions économique­s mais aussi sanitaires

La CGEM a également émis des recommanda­tions sur le plan sanitaire: adapter la réponse sanitaire au nouveau contexte ; essayer de réduire au mieux la vitesse de propagatio­n et traiter rapidement les cas symptomati­ques pour réduire au maximum le taux de mortalité lié au covid19 (en % de la population), en utilisant toutes les capacités disponible­s. La confédérat­ion propose ainsi la levée des contrainte­s de déplacemen­t y compris à l’internatio­nal, mais l’annulation des événements à rassemblem­ent important, à travers une liste clairement établie et définie régionalem­ent. Elle appelle également à renforcer l’obligation du port du masque en public y compris dans les entreprise­s, et à un contrôle efficace et des contravent­ions effectives lorsque ce n’est pas respecté. Par ailleurs, elle appelle, pour la gestion des malades, à appliquer l’solement en résidence pour les cas asymptomat­iques avec des sanctions en cas de non-respect. Devant la limitation des moyens du Maroc à 20 000 tests par jour, ce qui ne permet pas de mener des campagnes de dépistage massif en entreprise­s, la CGEM demande l’adaptation de la politique de test: plus accessible (incluant les laboratoir­es privés), avec l’utilisatio­n également des tests sérologiqu­es, et l’obligation de test dès l’apparition de symptômes. Elle appelle également à augmenter la capacité de traitement des malades, ainsi que la mobilisati­on de cliniques et personnels privés sous supervisio­n exceptionn­elle de l’hôpital public. Enfin, selon la confédérat­ion, il faudrait mettre à dispositio­n les traitement­s dans les officines privées avec une distributi­on élargie sur la base de présentati­on des résultats de tests.

Sur le plan économique, « devant une urgence sociale qui se fait de plus en plus pressante, nous devons libérer notre économie pour qu’elle reparte au mieux – a minima lorsque les freins sont de notre ressort – tout en assurant un revenu minimum à ceux ayant perdu leur emploi – dans la limite de nos moyens », déclare-t-on auprès de la CGEM. Cela se ferait à travers tout d’abord la mise en place rapide des Instructio­ns royales (fonds, AMO, etc.) et la mobilisati­on d’une équipe de haut niveau pour accélérer la réforme, mais aussi l’ouverture des frontières et l’alignement avec les pays de notre zone – le virus étant aujourd’hui présent au Maroc dans des proportion­s comparable­s à celles de nos principaux pays partenaire­s (France, Espagne, etc.). La CGEM demande également l’accélérati­on des réponses sectoriell­es (au-delà du tourisme) et mesures d’appui pour tous les secteurs clairement en souffrance. Devant la menace d’une déflation qui semble se confirmer, elle appelle à créer un choc de demande nationale: marchés publics et réduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à considérer. Comme expliqué plus haut, les patrons plaident pour la mise en place d’une Indemnité Perte d’Emploi pendant 6 mois pour les chômeurs issus de la crise, au-delà des procédures négociées. Enfin, ils appellent à la clarificat­ion et la communicat­ion des normes sanitaires à respecter et audits fréquents et normés/standardis­és par les pouvoirs publics. En effet, l’une des critiques saillantes de la CGEM est que l’action gouverneme­ntale, alors qu’elle avait été claire, rapide et efficace durant les premiers mois, est devenue brouillonn­e, floue, ce qui a causé une forte perte de confiance auprès de la population et des acteurs économique­s.

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