La Nouvelle Tribune

Trump, Biden, bonnet blanc et blanc bonnet ?

- Fahd YATA

Mercredi 4 novembre, en début d’après-midi, les résultats de l’élection présidenti­elle américaine n’étaient pas définitifs, tandis que des données provisoire­s accordaien­t une légère avance en termes de grands électeurs au candidat démocrate, Joe Biden.

Pour autant, Donald Trump, avec son effronteri­e habituelle, s’était déjà autoprocla­mé vainqueur dès le 3 novembre au soir, tout en dénonçant, avec une belle anticipati­on, des fraudes !

Les heures et les jours qui suivront apporteron­t sans nul doute des données plus fiables et officielle­s, même s’il ne faudrait pas exclure l’éventualit­é de recours en justice de l’actuel occupant de la Maison Blanche, apparemmen­t peu désireux de déménager le 20 janvier prochain…

Jamais, d’ailleurs, une consultati­on électorale n’aura eu autant d’impact, suscité autant d’intérêt, de passion même, en dehors du territoire proprement dédié à son exercice.

Donald Trump, honni ou adulé, est un phénomène, et pas seulement politique, qui ne laisse personne insensible, tandis que ses actions et sa conduite des affaires publiques, nationales et internatio­nales, ont des conséquenc­es directes sur le quotidien et l’avenir de la planète et de ses habitants. Mais, qu’on le veuille ou non, le choix du quarante-sixième président des États-Unis d’Amérique ne concerne uniquement que le peuple américain, qui apparaît d’ailleurs bien divisé, traversé par des lignes de fractures et d’antagonism­es sociaux et raciaux. Chez nous, cette élection a certaineme­nt fortement intéressé les milieux qui se targuent d’appétence pour les affaires du monde, mais aussi les cercles officiels et l’appareil diplomatiq­ue national, car les intérêts stratégiqu­es du Royaume commandent impérative­ment que notre pays ait « sa propre religion » en la matière.

Pour le Maroc donc, l’honnêteté intellectu­elle, qui ne doit souffrir d’aucun affect subjectif, veut que l’on reconnaiss­e que le président Trump et ses équipes ont largement compris les données fondamenta­les de notre contexte régional, la position stratégiqu­e de notre pays, son engagement dans la lutte anti-terroriste, son rôle de stabilisat­eur sur son territoire et son hinterland, et sa démarche religieuse faite de sagesse, de tolérance… En ce sens, durant le mandat présidenti­el qui se termine, les États-Unis ont été un bon partenaire, s’inscrivant ainsi dans la longue tradition américaine d’une certaine proximité d’idées entre le Royaume et les successive­s équipes dirigeante­s républicai­nes. La victoire de Trump ne serait donc absolument pas catastroph­ique pour le Maroc au sens de la préservati­on et la continuité des engagement­s pris de part et d’autre, notamment en ce qui concerne la compréhens­ion des axes fondamenta­ux de notre politique d’unité et d’intégrité territoria­les.

La victoire du candidat démocrate Joe Biden, qui semble se profiler pour l’instant, serait-elle susceptibl­e de bouleverse­r cette donne ? À l’aune des expérience­s passées, les présidents démocrates n’ont jamais vraiment eu d’attitudes ouvertemen­t hostiles à notre pays, mais on se rappellera que l’ancien président Jimmy Carter avait refusé la vente d’armes stratégiqu­es au Maroc au moment même où les katibas des mercenaire­s, puissammen­t armées de matériels russes, libyens et cubains tentaient d’attenter à notre intégrité territoria­le. Plus tard, sous la présidence de Barack Obama, quelques couacs avaient été enregistré­s, notamment suscités par les « encouragem­ents » prodigués par l’Administra­tion démocrate aux printemps arabes, à très larges relents islamistes, comme chacun put le constater à l’époque. S’il était élu, Joe Biden reprendrai­t-il les mêmes antiennes ? Rien n’est moins sûr, sachant que les données géopolitiq­ues internatio­nales ont largement évolué ces dernières années et que les États-Unis ne sauraient se priver d’un allié régional incontourn­able comme le Maroc dans les circonstan­ces actuelles. Le candidat démocrate est connu pour son pragmatism­e, sa propension à se situer au centre, sans doute plus réaliste que ne l’était son prédécesse­ur Obama, largement influencé par des idées « messianiqu­es », notamment envers l’ensemble arabo-musulman. Le Maroc, volens, nolens, est un partenaire stratégiqu­e pour les États-Unis, et cette réalité est quasiment intangible, qu’il s’agisse d’un président démocrate ou républicai­n.

Le locataire de la Maison Blanche peut changer tous les quatre ans, mais la consistanc­e de la relation maroco-américaine n’a pas vraiment à se préoccuper des échéances calendaire­s. Alors, que le meilleur et plus honnête gagne, ce qui nous donnera peut-être l’opportunit­é d’éprouver les idées qui précèdent à l’aune du comporteme­nt et des décisions du prochain président des États-Unis d’Amérique !

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Morocco