Les défis de la mobilité urbaine
La croissance urbaine et l’étalement des villes bouleverse clairement les anciens schémas de mobilité. Aujourd’hui, les populations qui habitent à l’extérieur des villes connaissent des difficultés pour se déplacer et accéder à leur lieu de travail ou toutes autres activités.
Dans nos sociétés actuelles, la mobilité est devenue un droit primordial parce qu’elle conditionne l’accès au logement, à la santé, au travail, à l'éducation, etc. Le huitième webinaire organisé par l’Institut CDG a traité de la thématique : « La mobilité face au défi de la complexité des systèmes urbains ».
Plusieurs questions ont été débattues durant cet événement à savoir : Faut-il repenser la mobilité au sein des villes ? Les transports publics ont-ils un rôle à jouer ? La mobilité est-elle si importante au sein du système urbain ? Quelle serait la meilleure approche pour le futur de nos villes ? Intervenant à cette occasion, Kawtar Benabdelaziz, conseillère technique en transport et climat chez GIZ (Agence allemande de coopération), a rappelé que le secteur du transport au Maroc est dépendant à 99% des énergies fossiles et qu’il constitue le premier consommateur des énergies à 38%. Il est également le deuxième émetteur de Co2 au Maroc à hauteur de 31%. Elle a aussi précisé que 50% de la flotte automobile marocaine circulent entre Casablanca et Rabat avec un taux d’urbanisation qui avoisine les 63,4% en 2020. « Des chiffres alarmants et une preuve qu’il est urgent de repenser nos modes de déplacement en prenant en compte les inégalités sociales, le développement économique, et les questions climatiques pour identifier les pistes d’actions possibles et infléchir les conséquences très lourdes de la mobilité urbaine », a-t-elle affirmé.
De son côté, Thierry Mallet, PDG de transdev, a précisé que le transport public a un rôle essentiel à jouer sur la fracture territoriale, sur l’équité sociale et sur le plan écologique.
Pour lui, pour régler le problème de la mobilité, il est primordial de développer des solutions périphériques : des bus à haut niveau de service, des parcs de rabattement, des parking relais… Il a aussi mis l’accent sur la transition écologique. « On ne la réussira que s’il y a plus de transport public et moins de voitures individuelles, sinon on ne pourra pas réduire de 50% les émissions à l’horizon 2030 », a-t-il souligné. Et d’ajouter : « Passer aux véhicules électriques, n’est pas la solution parce qu’il pourrait y avoir un dédoublement des voitures ».
M. Mallet a également appelé à développer des solutions de transports publics toujours plus efficaces car, selon lui, le choix se fait en fonction du caractère pratique du transport public et pas forcément de son prix. « C’est un enjeux clé si demain, nous voulons avoir des villes apaisées », a-t-il conclu.
Comment repenser la mobilité au sein des villes ?
Pour Kawtar Benabdelaziz, la crise de la Covid-19 a permis d’avoir un aperçu de ce que pourrait être la ville sans le trafic urbain et sans les embouteillages. « Cela a permis de découvrir que plusieurs trajets pouvaient se faire à pieds ou à vélo mais aussi en transport public si la sécurité des rues et des routes le permet », a-t-elle souligné. Et d’ajouter : « La mobilité, c’est l’accès de tout un chacun à la ville et à tout ce qu’elle peut offrir comme activités économiques culturelles et service de santé… Nous devons repenser notre façon de se déplacer et repenser la ville en pensant aux groupes défavorisés et à la façon dont ils vivent dans la ville. Les femmes, les enfants, les personnes âgés et à mobilité réduites doivent tous pouvoirs se déplacer librement ».
Pour se faire, il faut inclure les politiques, la société civile, le secteur privé mais aussi les chercheurs et les centres d’innovation, explique-t-elle. Ces derniers doivent discuter ensemble des différentes étapes de cette transformation, sans négliger la sécurité des citoyens, un des clés pour les pousser à utiliser les moyens en communs, selon Mme Benabdelaziz.
Pour conclure, la conseillère technique en transport et climat a défendu le fait qu’il était primordial de réduire notre utilisation privée, et que ceci ne pouvait pas se faire sans une planification urbaine, une flotte de transports publiques de qualité et sécurité dans les rues. « C’est ce qui fera la différence entre le paradigme classique et le nouveau paradigme de la mobilité urbaine. Tout le monde devrait pourvoir accéder à la ville librement et nous devons développer nos stratégies de transport dans cette optique-là », a-t-elle conclu.