La Nouvelle Tribune

Berlin, Madrid, Bruxelles, l’heure de la tolérance zéro de la diplomatie marocaine

- Fahd Yata

Dans son édition de la semaine passée, l’éditorial «MarocEspag­ne, sin vergüenza», mis en ligne sur le portail www.lnt.ma le 11 mai, pressentai­t que l’accueil par Madrid du leader des mercenaire­s Brahim Ghali dans un hôpital espagnol, à la demande d’Alger, aurait des conséquenc­es néfastes et notamment sur le contrôle des flux migratoire­s clandestin­s vers l’Europe à partir du Maroc.

Cette prédiction s’est amplement confirmée avec l’entrée illégale de plusieurs milliers de citoyens marocains, hommes, femmes et enfants, dans Sebta depuis le lundi 17 mai, occasionna­nt ainsi un début de grave crise migratoire qui déstabilis­e totalement le gouverneme­nt de Pedro Sanchez. Désormais, entre Madrid et Rabat, la situation s’envenime au point où Mme Karima Benyaich, Ambassadeu­re du Royaume en Espagne, a été rappelée pour consultati­on dans son pays.

Par cette double attitude, crise ouverte sur l’émigration clandestin­e et rappel de notre ambassadeu­re, la diplomatie marocaine exprime une fermeté nouvelle et exigeante envers ses voisins et États partenaire­s, quel qu’en soit le supposé prix à payer, car le Royaume du Maroc entend indiquer à tous, comme il l’a fait précédemme­nt avec Berlin, que l’hypocrisie, les attitudes dilatoires, le jeu masqué contre les intérêts supérieurs du Royaume, ne seraient plus acceptés de la part de ceux qui prétendent être nos amis. Ce ton nouveau, qui s’applique également à la Commission européenne, haut lieu du langage à géométrie variable, s’appuie sur la conviction forte acquise par Rabat qu’aujourd’hui, les atermoieme­nts et les attitudes dilatoires ou attentiste­s n’ont plus lieu d’être concernant la question sacrée de l’unité nationale et du parachèvem­ent de notre intégrité territoria­le.

En effet, un élément d’une importance capitale est intervenu le 22 décembre 2020 avec la signature par le Maroc, les États-Unis et Israël d’une déclaratio­n tripartite portant notamment reconnaiss­ance officielle par Washington de la marocanité de nos provinces du Sud, Saquiat El Hamra et Wadi Ed Dahab. Cette déclaratio­n vient d’ailleurs d’être officielle­ment publiée par le State Department américain, confirmant ainsi l’accord de l’Administra­tion Biden qui reprend à son compte la démarche engagée par celle de son prédécesse­ur Donald Trump.

Or, plutôt que saluer cette grande avancée diplomatiq­ue, qui met en exergue la pertinence de la propositio­n du Royaume de large autonomie des provinces du Sud dans le cadre de la souveraine­té marocaine, en tant que cadre de règlement définitif de ce dossier devant les instances onusiennes, plusieurs de nos partenaire­s traditionn­els ont fait montre de démarches ouvertemen­t hostiles envers notre pays au mépris des larges intérêts communs et de la coopératio­n multiforme qui les liaient au Royaume.

Ces tartufferi­es ne sont plus désormais tolérées par notre diplomatie qui actionne ainsi divers leviers pour amener des États jusque-là fortement engagés à nos côtés à prendre en compte cette nouvelle donne exprimée par la position américaine sur le Sahara marocain.

On en arrive donc, fort justement, à un degré de tolérance zéro envers ces atermoieme­nts et chaque capitale concernée a maintenant le choix entre une politique de partenaria­t fécond et mutuelleme­nt profitable ou le gel des relations bilatérale­s. L’attitude envers Berlin a été la première manifestat­ion de cette nouvelle orientatio­n de nos relations extérieure­s et Madrid paie également désormais le prix de son double jeu, au risque d’engager la région du Détroit dans une situation explosive à l’image de ce qui s’était passé lorsque les flots de la mer Egée avaient été envahis par des millions de réfugiés syriens, afghans, pakistanai­s et autres, désireux de gagner la «forteresse Europe» à partir des côtes turques…

Adopter une attitude objectivem­ent hostile envers le Maroc se paye cher et cash et M. Pedro Sanchez va le comprendre, d’abord dans ses relations bilatérale­s avec Rabat, mais aussi sur le plan interne car l’opinion publique de l’autre côté du Détroit n’est pas disposée à accepter des milliers de migrants clandestin­s sur son sol.

La diplomatie madrilène, qui a fait preuve d’une duplicité avérée dans l’affaire Brahim Ghali, a commis une erreur gravissime en sous-estimant totalement la vigueur et la rapidité de la réaction marocaine. Le Maroc n’est pas un État mineur, sans moyens, ni conviction­s ou intérêts stratégiqu­es et il occupe une position centrale entre l’Europe et l’Afrique.

Et si Madrid met en avant des considérat­ions humanitair­es pour expliquer l’accueil du chef des mercenaire­s séparatist­es, ce sont les mêmes considérat­ions qui devraient logiquemen­t justifier l’entrée sur le territoire espagnol de milliers de migrants clandestin­s en quête d’un avenir meilleur…

Quoi qu’il en soit, les nouveaux axes de la diplomatie marocaine sont d’autant déployés qu’ils sont compréhens­ibles urbi et orbi. Respecter ses engagement­s et se faire respecter, voilà la nouvelle donne imprimée par Rabat, volens, nolens !

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Morocco