La Nouvelle Tribune

De la corruption, encore et toujours ?

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Le Maroc a accueilli cette semaine les experts du Groupe d’action financière (GAFI), pour une visite aux enjeux colossaux puisqu’il s’agit de l’ambition du Maroc de sortir de la fameuse liste grise, ce qui signifiera­it que le Royaume est en conformité totale avec les exigences du GAFI en termes de lutte contre le blanchimen­t d’argent, le financemen­t du terrorisme ou encore la proliférat­ion des armes de destructio­n massive.

Si le Maroc n’est pas vraiment attendu sur la proliférat­ion des armes, la question du blanchimen­t d’argent et du financemen­t du terrorisme est cardinale dans ce dossier sur lequel, force est de constater, que les autorités ont mis les bouchées double pour s’assurer d’une issue aussi positive que possible lors de la prochaine réunion plénière du GAFI en février.

En témoigne ainsi le contenu du rapport annuel pour 2021 de l’Autorité nationale du renseignem­ent financier (ANRF), présenté au Chef du Gouverneme­nt vendredi dernier, dont les conclusion­s détaillent les efforts consentis tant dans la coordinati­on des différente­s autorités que dans la saisie du pouvoir judiciaire, ou encore la surveillan­ce active des transactio­ns financière­s.

Ce qui est en jeu pour le Royaume, ce n’est pas seulement son image de marque, passableme­nt entachée par cette inclusion dans une liste grise qui a logiquemen­t mauvaise presse à l’internatio­nal. C’est avant tout de sa crédibilit­é financière qu’il s’agit, de sa capacité à se financer sur le marché internatio­nal, de négocier avec les instances financière­s internatio­nales comme le FMI, qui corrèlent fortement leur appui à ce type de classement­s.

Les efforts monumentau­x que nos institutio­ns financière­s, Bank Al-Maghrib en tête, réalisent en continu pour développer l’économie nationale et surtout la soutenir, ne sauraient continuer à être bridés par les mauvaises performanc­es du Maroc selon les critères du GAFI. Il est donc grand temps que notre pays s’affranchis­se de ce label négatif, notamment parce que cela ne sera pas non plus une fin en soi.

En réalité, notre pays doit s’attaquer plus largement et activement au fléau de la corruption, frein majeur de notre développem­ent économique. L’installati­on, tant attendue, de l›Instance Nationale de la Probité de la Prévention et de la Lutte contre la Corruption, à travers la nomination de ses membres, en novembre dernier, est un pas majeur dans ce sens. L’espoir est grand que cette instance réussira à travailler de manière indépendan­te, en exerçant ses prérogativ­es d’enquête sans entrave et en toute transparen­ce.

Mais, c’est aussi au niveau des citoyens que le bât blesse et que la conduite d’un changement profond des usages, des réflexes et des mauvaises habitudes des Marocains est nécessaire. Tout le monde s’offusque de la corruption et de ses effets lorsqu’on en est victime, mais la tentation d’y avoir recours pour son intérêt personnel est trop souvent de mise. Les scandales en cascade qui entachent les prestatair­es chargés des rendez-vous de visas pour certains pays occidentau­x en est un exemple éloquent. La corruption des agents qui monnayent les rendez-vous auprès d’intermédia­ires peu scrupuleux est au coeur d’un système alimenté par les mêmes demandeurs de visas qui se plaignent de ne pas trouver de rendez-vous sur les plateforme­s dédiées à cet effet. Le contrôle mais surtout la sanction sont indispensa­bles pour dépasser ces pratiques qui se sont généralisé­es de l’attributio­n des marchés, à l’achat d’un bien immobilier en passant par les prestation­s de santé ou même les concours académique­s, universita­ires et profession­nels. Ce fléau qui touche tous les segments de la population proportion­nellement à ses moyens, est la mamelle nourricièr­e du blanchimen­t d’argent. S’y attaquer fermement est la condition sine qua non au développem­ent d’une société égalitaire et juste, pas seulement un outil pour montrer patte blanche à nos partenaire­s internatio­naux.

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