Le Temps

Un directeur isolé et amer

Roger de Weck mène campagne pour la redevance en Suisse alémanique. Et il souffre

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C’est sans doute l’une des pires réunions publiques de sa vie. Fin avril, à l’Hôtel Savoy Baur en Ville à Zurich, le directeur général de la SSR, Roger de Weck, s’est retrouvé confronté aux adversaire­s de son entreprise les plus virulents, lors d’une conférence organisée par la très blochérien­ne Holding pour la diversité des médias (Medienviel­falt). Traité de «Fidel Castro» par l’un de ses contradict­eurs, le Fribourgeo­is est ressorti ébranlé par l’agressivit­é de l’assistance à son endroit.

«Tout cela l’affecte terribleme­nt, témoigne une connaissan­ce qui a rencontré Roger de Weck récemment. Je ne l’avais jamais vu dans cet état. Il est seul. Il est particuliè­rement amer que personne ne le soutienne publiqueme­nt. Tout le monde a compris qu’il y a une vague de sentiment anti-SSR et personne ne veut s’exposer.»

Il a ainsi fallu attendre le 21 mai pour que les cinéastes suisses, qui reçoivent quelque 27 millions de francs chaque année de la SSR, publient un communiqué appelant à voter oui à l’extension de la redevance audiovisue­lle, qui sera soumise au vote populaire le 14 juin.

En Suisse alémanique, la campagne a pris une tournure très personnell­e, focalisée sur Roger de Weck et ce qu’il incarne: un intellectu­el d’origine aristocrat­ique, parfaiteme­nt francophon­e et ouvertemen­t favorable à l’adhésion de la Suisse à l’UE. Son salaire de 560 000 francs (en 2014) est devenu un argument des opposants à l’extension de la redevance. Et son inimitié envers Pietro Supino, président du groupe de presse Tamedia, le plus grand de Suisse, a durci l’hostilité des éditeurs et de leurs journaux envers la SSR.

Le conflit remonte à 2010, lorsque l’entreprise publique a tenté d’ouvrir ses sites internet à la publicité. Lors des négociatio­ns qui ont suivi avec les éditeurs, faroucheme­nt opposés à la mesure, Roger de Weck et Pietro Supino «se sont engueulés comme du poisson pourri, c’était inacceptab­le», témoigne une personne qui a participé aux discussion­s. L’interdicti­on de publicité sur les sites de la SSR a persisté, jusqu’à aujourd’hui. Sy. B.

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