Le Temps

«Plus de prévisibil­ité peut aussi accroître la volatilité»

Nicolas Forest, directeur de la gestion obligatair­e chez Candriam Investors Group, analyse l’impact de l’action de la BCE

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Le Temps: Comment expliquer la rapidité du réajusteme­nt intervenu sur les emprunts d’Etat? Nicolas Forest: C’est essentiell­ement une correction technique qui peut s’expliquer par trois facteurs. Premièreme­nt, l’offre de titres proposés sur le marché a été supérieure à leur demande. La BCE, malgré son programme de rachat de titres de dette souveraine de 60 milliards d’euros par mois, n’a pas pu tout acheter. Deuxièmeme­nt, le retourneme­nt du marché a été suivi par beaucoup de suiveurs de tendance. Troisièmem­ent, on a assisté à une forme de réajusteme­nt des prix, ou «repricing», sur le marché en raison de données économique­s en améliorati­on dans la zone euro.

– N’est-il pas étonnant que les taux aient rebondi aussi vite juste au moment où la BCE a démarré un programme de rachat d’actifs, qui visait à les faire baisser?

– En observant d’autres programmes de type «QE» mis en place par des banques centrales, on constate le même schéma: la baisse des taux (qui évolue à l’inverse des prix) est la plus forte entre le moment de l’annonce du programme et celui de son implémenta­tion effective. Dès mars ou avril, la nouvelle était entièremen­t intégrée par les marchés. Les rachats d’obligation­s réalisés par la BCE n’offraient ainsi plus de protection pour ce marché. C’est le paradoxe de la situation actuelle: la plus grande prévisibil­ité de l’action des banques centrales conduit aussi à plus de volatilité quand un petit imprévu survient. Avec la communicat­ion de la BCE, les investisse­urs pensaient ne plus encourir de risques. Et quand on est habitué à ce que tout soit prévisible, un petit élément inattendu peut entraîner une forte hausse de la volatilité.

– Qu’attendez-vous pour les taux du Bund à 10 ans à la fin de 2015?

– Pour le Bund, nous prévoyons une remontée du rendement à 0,9%, soit environ 30 points de base de plus que les attentes du consensus situées à 0,6%. Dans la zone euro, la croissance a été un peu meilleure que prévu. Les économies de la zone euro ont profité de la faiblesse de la devise européenne, de la baisse du prix des matières premières et du faible niveau des taux d’intérêt. Par contre, le chômage reste élevé, la productivi­té est insuffisan­te et les problèmes de dettes ne sont toujours pas résolus. On assiste à une reprise mais il n’y a pas d’inflation sous la pression des salaires. On est cependant sorti du scénario déflationn­iste tant redouté en fin d’année dernière. Propos recueillis par Y. H.

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