«Champions!» fait grincer des dents
Lambiel, Baker… Même avec des stars dans un méga-show pour le CIO, on peut creuser un trou financier important. Les citoyens passeront à la caisse, et les politiques s’invectivent
«Merci au public lausannois!» venu applaudir Stéphane Lambiel et Bastian Baker. Et «bravo à tous les artistes et techniciens […] qui ont permis aux 12000 spectateurs de la place de la Riponne de vivre un moment de pure magie», lit-on encore sur le site de Champions!, le spectacle organisé en novembre dernier à l’occasion des 100 ans du CIO à Lausanne ( letemps.ch des 18 et 22.11.2015).
Ce méga-show qui représentait, selon la promotion, «l’une des plus grandes projections architecturales du monde» s’est donc finalement bouclé sur un important déficit, de l’ordre d’un million de francs, soit environ la moitié du budget. L’association organisatrice, De Feu et de Glace, s’est tournée la semaine dernière vers le canton de Vaud et la Ville de Lausanne pour leur demander de combler le trou. Demande en cours de traitement. Et à Genève, l’avocat et économiste Yves-Michel Baechler (@ ymbaechler sur Twitter) ironise: «100 ans du CIO: pour quel résultat?»
Les organisateurs ont de bonnes excuses: délais, technique, météo, «effet dissuasif» des attentats de Paris: tout semblait maudit dans cette affaire que beaucoup ont perçue comme un brin mégalomaniaque sur les réseaux. Alors aujourd’hui, «on interpelle tous les bords, de tous bords», comme le dit le quotidien 24 heures, car si «le spectacle a été grandiose, le déficit l’est aussi», officiellement imputé à «la complexité de la manifestation».
Une complexité «qui a été mal évaluée», notamment par le dicastère concerné, celui de Marc Vuilleumier, qu’un internaute du quotidien vaudois fusille: «M. le municipal popiste […] marque de son empreinte l’histoire de Lausanne. Son empreinte = son inefficacité!» A quelques jours des élections communales vaudoises, cela tombe très mal. Le fiasco a fait réagir certains politiciens sur les réseaux sociaux. 20 minutes dit que cela «fait jaser». Sur Twitter, @MeystreGilles, conseiller communal PLR candidat à une réélection, parle par exemple du «dernier cadeau de Marc Vuilleumier aux contribuables lausannois» avant son retrait.
Le député socialiste Nicolas Rochat Fernandez, qui a interpellé le Grand Conseil et poste sur sa page Facebook sa réaction devant les micros de La Télé, n’est pas plus tendre: «CHF 100 000.– [de subvention] prévus initialement, c’est au moins cinq fois plus que le contribuable vaudois devra payer! (…) Toute la lumière devra être faite. Et depuis quand un conseiller d’Etat dispose-t-il d’une base légale pour être membre d’une association et ainsi engager l’Etat pour combler les déficits du spectacle?»
Faut-il comprendre: avec Marc Vuilleumier et le conseiller d’Etat Philippe Leuba à la présidence de De Feu et de Glace, avons-nous des autorités «dépassées par les événements » et en situation de conflit d’intérêts? Quant aux lecteurs du quotidien gratuit, ils ne mâchent pas leurs mots: «Ce spectacle a été inadmissible à tout point de vue: privatisation de l’espace public, prix prohibitif et maintenant, ils veulent que nos impôts paient leurs frais?»
Ou alors: «A vouloir jouer dans la cour des grands! Paf!»; «Rien que l’idée de donner de l’argent à Lambiel est complètement aberrante! Ce gamin arrogant… » ; «Médaille de plomb du management»; «Peu importe Leuba, la fête fut belle, et il faut bien préparer son entrée au CIO et la sortie du communiste!» Sans compter cette dernière pique envers le socialiste pressenti à la future syndicature de Lausanne: «Avec [Grégoire] Junod, on va doubler les impôts.»