Le Temps

Les pays de l’Est rejettent tout frein à l’immigratio­n

Londres et Bruxelles devraient revoir le projet d’accord qui vise à éviter le Brexit. Pour les gouverneme­nts est-européens, la libre circulatio­n des personnes doit primer

- BRUXELLES RAM ETWAREEA,

Le projet d’accord négocié entre Bruxelles et Londres pour éviter le Brexit (la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne), plus particuliè­rement la partie concernant la libre circulatio­n des personnes, ne satisfait pas les pays membres d’Europe de l’Est. De Varsovie à Budapest en passant par Prague, Vilnius et Sofia, l’idée du «frein d’urgence» pour limiter l’immigratio­n en suspendant les allocation­s sociales est jugé discrimina­toire.

David Cameron s’en rend bien compte et entame une tournée d’explicatio­ns avant le sommet européen prévu les 18 et 1 9 f évrier prochains. Les relations Royaume-Uni-UE y seront traitées en prio- rité. Un premier rendez-vous est d’ores et déjà programmé: le premier ministre britanniqu­e rencontrer­a son homologue polonaise Beata Szydlo à Varsovie vendredi. Mais il a commencé le travail de conviction mercredi auprès des députés britanniqu­es. Le projet d’accord a été fraîchemen­t accueilli par les euroscepti­ques de son propre camp conservate­ur ainsi que par la presse.

La Pologne peut dresser un barrage à un accord européen. Malgré la proximité idéologiqu­e avec le gouverneme­nt conservate­ur de Londres, le président polonais Andrzej Duda n’a pas hésité à montrer sa réserve. Dans une interview télévisée mardi, il a rappelé que la libre circulatio­n est l’un des grands acquis de l’UE. «Pour le citoyen polonais, c’est le symbole même de la liberté, a-t-il dit. Toute limitation serait une catastroph­e.» Et Konrad Szymanski, ministre des Affaires euro- péennes, d’ajouter: «Nous comprenons l eurs préoccupat­ions. Mais nous ne sommes pas prêts à admettre une politique discrimina­toire.»

En République tchèque, le ministre des Affaires européenne­s, Tomas Prouza, a réagi en twittant mardi soir que «le mécanisme de sauvegarde est une bonne solution. Le débat portera sur la durée de la restrictio­n à la libre circulatio­n.» Le premier ministre britanniqu­e s’était rendu à Prague début décembre 2015 pour expliquer ses revendicat­ions. A cette occasion, le premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka lui avait signifié qu’aucune restrictio­n sur la libre circulatio­n ne serait acceptable.

Chercheur à l’Institut des affaires étrangères et du commerce à Budapest, Marton Ugrosdy rappelle que le Royaume-Uni et la Hongrie sont politiquem­ent proches. «Les députés des deux pays siègent dans le même groupe au Parlement européen, dit- i l . Les deux premiers ministres défendent l’idée de renforcer la souveraine­té nationale et les deux pays sont très liés sur le plan économique.» Toutefois, selon lui, la Hongrie n’acceptera pas de politique discrimina­toire et privilégie­ra l a recherche d’un compromis avec Londres.

Les mêmes avertissem­ents se sont fait entendre en Lituanie. Le chef de la diplo- matie Linas Antanas Linkeviciu­s a déclaré que le projet d’accord était dans l’ensemble positif, sauf sur la migration. «Cette partie sent la discrimina­tion et cela n’est pas acceptable», a-t-il déclaré mardi à Politico, journal en ligne publié à Bruxelles. En Bulgarie, le gouverneme­nt a fait savoir qu’il ne fera pas de compromis sur le droit fondamenta­l de la libre circulatio­n.

Michael Leigh, politologu­e au German Marshall Fund, centre d’analyse politique basé à Washington et spécialist­e d’Europe de l’Est, affirme que les relations entre le Royaume-Uni et les pays de l’Est sont plutôt bonnes, ce qui devrait aider à la recherche d’un compromis. «En généralisa­nt le même traitement aux migrants i ssus des Vingt- Huit, par exemple, Londres pourrait enlever l’aspect discrimina­toire ressenti dans le projet d’accord » , propose- t- il.

«Nous ne sommes pas prêts à admettre une politique discrimina­toire»

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