Le Temps

Une manne fédérale pour former davantage de médecins en Suisse

Le Conseil fédéral veut débloquer 100 millions de francs pour aider les hautes écoles à augmenter la capacité d’accueil des études de médecine. Il s’agit de passer de 800 à 1300 diplômes par an à l’horizon 2025

- CATHERINE DUBOULOZ

Le timing ne doit rien au hasard. Quelques jours avant le 9 février, jour qui va marquer les deux ans de l’acceptatio­n en votation de l’initiative de l’UDC «Contre l’immigratio­n de masse», le Conseil fédéral a annoncé mercredi qu’il entend allouer un crédit de 100 millions de francs pour la formation des médecins. « Nous sommes en situation de grande dépendance vis-à-vis des compétence­s étrangères, la relève médicale indigène doit être davantage promue», explique le président de la Confédérat­ion et ministre de l ’ Economie, Johann Schneider-Ammann. Traduction en chiffres: la Suisse ne formant pas assez de praticiens, plus de 30% des médecins qui exercent dans le pays sont titulaires d’un diplôme étranger; la proportion s’élève à plus de 40% dans les hôpitaux.

Cela fait plusieurs années que la pénurie de médecins et plus généraleme­nt de profession­nels de la santé préoccupe le gouverneme­nt. «Et avec le vieillisse­ment de la population, l es besoins vont encore croître», ajoute le responsabl­e du Départemen­t de l’intérieur, Alain Berset. Les université­s ont déjà étoffé leur offre de formation, l’enveloppe fédérale doit permettre de donner une impulsion supplément­aire pour financer, durant les années 2017 à 2020, un programme spécial conçu avec la Conférence suisse des hautes écoles. Actuelleme­nt, les Université­s de Bâle, Berne, Genève, Lausanne et Zurich forment 800 à 900 médecins par an. Le Conseil fédéral a fixé un objectif de 1300 masters annuels à l’horizon 2025.

Les 100 millions supplément­aires s’inscrivent dans le cadre des mesures accompagna­nt la mise en oeuvre de l’initiative «Contre l’immigratio­n de masse» et des actions plus globales visant à combattre la pénurie de personnel qualifié. Ils feront partie du message sur l’encouragem­ent de la formation, de la recherche et de l’innovation qui devrait être transmis aux Chambres en mars 2016.

La manne fédérale ouvrira sans aucun doute des appétits et attisera des ambitions. Actuelleme­nt, cinq université­s offrent des cursus complets en médecine humaine. Fribourg ne propose que le bachelor, Neuchâtel uniquement la première année de bachelor. D’ici à quelques années, le paysage de la formation médicale devrait considérab­lement évoluer.

Dans un rapport rédigé il y a quelques mois sur mandat du Secrétaria­t d’Etat à la formation, l’ancien recteur de l’Université de Bâle Antonio Loprieno rappelait que la constellat­ion académique, stable depuis des dizaines d’années, «est défiée par des phénomènes nouveaux», notamment celui-ci: les écoles polytechni­ques fédérales, « pour des raisons d’ordre scientifiq­ue», et plusieurs cantons, «dans un souci de développem­ent de leurs pôles universita­ires», «souhaitent prendre pied dans la formation médicale». L’EPFZ a annoncé un bachelor en sciences médicales; Fribourg compte mettre sur pied un master. L’Université de Suisse italienne, ainsi que Saint-Gall et Lucerne, ont des projets du côté de la formation clinique en collaborat­ion avec leurs hôpitaux. Des modèles de partenaria­t devront être développés.

Dans s on communiqué, l e Conseil fédéral précise d’ailleurs que l’augmentati­on du nombre de diplômes devra se faire «dans une démarche coordonnée au niveau national». La Conférence des recteurs des hautes écoles mettra sur pied un train de mesures avec les hautes écoles universita­ires.

Le Conseil fédéral a également parlé de la formation des profession­nels des soins, où sévit aussi l a pénurie. « Le nombre de diplômes décernés en Suisse ne cesse de croître depuis 2007», se félicite le gouverneme­nt qui note que 84% du besoin de relève des assistants en soins et santé communauta­ire est couvert. Le nombre de diplômes a plus que doublé entre 2007 et 2015, passant de 1500 à 3700. Dans la nouvelle formation d’aide en soins et accompagne­ment, plus de 880 contrats d’apprentiss­age ont été conclus en 2014. Dans les soins infirmiers enfin, le nombre de diplômés de degré tertiaire est en hausse: plus de la moitié des besoins estimés à un peu plus de 4500 sont couverts. Les inscriptio­ns dans les filières d’études ont progressé de 2600 en 2011 à 3000 en 2014.

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(PETER KLAUNZER/KEYSTONE) Alain Berset et Johann Schneider-Ammann.

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