Un beau gâchis
Malgré les propos rassurants des dirigeants de Syngenta, il est difficile de se réjouir de l’achat du groupe bâlois par ChemChina. Les actionnaires anglo-saxons qui ont déstabilisé Syngenta au printemps dernier pour obtenir une forte plus value en cas de fusion avec le concurrent historique Monsanto sont contents. Ils perdent leur qualité d’actionnaires, puisque Syngenta disparaîtra de la bourse suisse, mais ils touchent le jackpot. L’argent n’a pas d’odeur. Peu leur importe qu’une grande partie des milliards de dollars promis par ChemChina proviendra de fonds d’investissement gouvernementaux chinois.
L’impatience d’un groupe d’actionnaires, en mal de rendement rapide malgré la conjoncture défavorable des taux de change et des matières premières, aura eu raison d’un fleuron de l’agrochimie suisse. Que valent les garanties de stabilité données aujourd’hui à Syngenta? Dans quelques années, elles ne pèseront pas lourd face aux ambitions agricoles locales chinoises. L’agrochimie n’a rien à voir avec la fabrication de pneus ou l’industrie des machines, domaines où ChemChina a investi à l’étranger. La liberté laissée, dans ces cas, aux sociétés achetées n’assure pas un comportement identique dans un domaine stratégique chinois. Le risque de déplacement d’actifs suisses est majeur.
Monsanto, avec son offre obéissant à des motifs fiscaux, a joué avec le feu et déstabilisé le secteur. Syngenta, malgré un récent passage à vide, a fourni une croissance annuelle moyenne de 17%. Le groupe bâlois en est bien mal récompensé.