La start-up genevoise qui pourrait torpiller Amazon et iTunes
La start-up genevoise lance un réseau décentralisé de diffusion de vidéos, musique et textes, basé sur le principe de la blockchain et reposant sur sa propre cryptomonnaie. De quoi remettre en cause quelques modèles d’affaires bien établis
Une entreprise genevoise inaugure un réseau de diffusion de contenus numériques décentralisé grâce à la blockchain. Un modèle qui supprime les intermédiaires et pourrait faire de l’ombre aux géants américains
La start-up Decent, basée à Genève, lance un réseau décentralisé de diffusion de vidéos, de musiques et de textes, basé sur le principe de la blockchain, reposant sur sa propre cryptomonnaie. Une idée qui pourrait permettre à chacun d’acheter et de partager des contenus numériques librement et de manière sécurisée en s’affranchissant des restrictions imposées par les intermédiaires.
«Nous voulons libérer le monde du partage et de la diffusion de contenus numériques des intermédiaires qui ne sont plus nécessaires», explique Matej Michalko, l’un des trois fondateurs de la société. En clair, cela remettrait en question le modèle d’affaires de géants comme Apple, Google ou Amazon. Cette dernière entreprise prélève des commissions comprises entre 8 et 45%. Avec le modèle de Decent, l’auteur d’un e-book recevrait 100% du prix fixé.
Pour y parvenir, la fondation à but non lucratif créée en 2015 et qui emploie une vingtaine de personnes va développer sa propre cryptomonnaie d’échange Decent, à l’exemple du bitcoin ou de l’ether. Le cadre législatif suisse favorise l’émergence de ce type d’innovation. La commercialisation de la version finale du réseau devrait se faire en 2017.
Apple, Google ou Amazon ont-ils du souci à se faire? A Genève, la start-up Decent s’apprête à inaugurer le premier réseau de diffusion de contenus numériques décentralisé grâce à la blockchain. Il s’agit de la technologie algorithmique sur laquelle reposent les cryptomonnaies comme le bitcoin ou l’ether. L’ambition de Decent est claire: «Nous voulons libérer le monde du partage et de la diffusion de contenus numériques des intermédiaires qui ne sont plus nécessaires» affirme Matej Michalko, l’un des trois fondateurs. En d’autres termes, la jeune pousse veut permettre à chacun d’acheter et de partager des textes, de la musique, de la vidéo ou des logiciels librement, de manière sécurisée dans un système décentralisé. Donc affranchi des restrictions imposées par les intermédiaires. Un plan plus facilement réalisable en Suisse grâce à un cadre législatif plus ouvert qu’ailleurs.
Amazon par exemple. «Aujourd’hui, si je veux publier un e-book sur Amazon, je dois d’abord accepter les conditions générales d’utilisation de l’entreprise, détaille Matej Michalko. C’est elle qui fixe le prix et elle prend une commission de 40% à 50% sur chaque vente [la marge d’Amazon varie entre 8% et 45% selon le type d’article vendu ndlr].» Selon le cofondateur de Decent, ce modèle d’affaires est «dépassé. Un auteur doit pouvoir publier un e-book, fixer son prix et recevoir le 100% de son chiffre d’affaires.» Tout cela reste encore très théorique, car la start-up genevoise fondée en 2015 n’a pas encore lancé son réseau décentralisé.
Pour l’heure, Decent vient d’accomplir avec succès toute une série de tests sur sa version alpha. Ce dimanche, elle a lancé les ventes de son logiciel. C’està-dire que les premiers intéressés ont pu acheter sur le site sale.decent.ch des jetons (tokens) DCT, soit la cryptomonnaie d’échange de Decent (comme le bitcoin ou l’ether) qui doit leur permettre d’acheter, vendre et partager du contenu numérique. Le premier prix d’achat est fixé à 1 bitcoin (620 francs selon le dernier cours) pour 5000 DCT. Pour la commercialisation de la version finale du réseau Decent, il faudra patienter jusqu’en 2017.
La blockchain, au-delà d’un usage monétaire
C’est encore nébuleux? Le système décentralisé de Decent étudie les potentialités des protocoles de cryptage au-delà d’un usage purement monétaire. Le tout dans un écosystème décentralisé qui ne dépend pas de la compétence d’une autorité unique, d’un gouvernement ou d’une entreprise. En d’autres termes, ce que la monnaie virtuelle bitcoin est à l’argent, le DTC de Decent l’est pour le partage de contenu.
Cette cryptomonnaie fonctionne comme la quasi-totalité des monnaies virtuelles. Celles-ci s’échangent de gré à gré via des plateformes internet contre des devises réelles. Leur gestion évolue dans un système décentralisé. Aucune banque, donc, ni billet. L’argent est créé en résolvant des algorithmes par un logiciel, dont la puissance de calcul est partagée en réseau. La communauté gère les transactions et la création de la monnaie. Personne ne les possède, ni ne les contrôle. A l’image d’Amazon, la plateforme de Decent joue donc le rôle de l’intermédiaire à la grande différence que tout est géré par la blockchain, donc l’algorithme.
Decent propose donc aux utilisateurs de télécharger et de partager du contenu à travers la blockchain. En outre, les développeurs tiers seront libres de mettre au point leur propre app reposant sur le protocole opensource de la start-up. Matej Michalko les encourage. «Nous sommes en train de mettre sur pied des applications mobile Decent pour Android et iOS, mais aussi sur desktop. Les développeurs sont invités à créer de nouvelles applications basées sur le réseau Decent.» La start-up genevoise est une fondation à but non lucratif. Pour financer ses opérations et le développement du projet, elle conserve 10% de DCT sur la totalité des DCT vendus pour du minage.
L’engouement du marché chinois
Depuis sa naissance en 2015, la start-up suisse, qui comptabilise une vingtaine de personnes sur ses sites de Genève et de Bratislava, a déjà levé plus de 500000 francs grâce à des investisseurs aux Etats-Unis et en Malaisie. C’est d’ailleurs en Asie que son regard se tourne. En Chine plus précisément, «où l’engouement pour la diffusion de contenus numériques décentralisée est le plus fort», rappelle Matej Michalko. Le cofondateur de Decent nous répond lors de son séjour en Chine. «C’est d’ailleurs une entreprise chinoise qui va fabriquer notre logiciel de vidéo en streaming. Il s’agit d’un Netflix décentralisé qui sera commercialisé en octobre.»
Decent veut donc se débarrasser des intermédiaires. Mais qu’en pensent des mastodontes comme Apple ou Google? Matej Michalko avoue ne «pas avoir encore discuté avec eux. En Chine, cela ne pose pas de problème, on compte bien plus d’acteurs qu’en Europe ou aux Etats-Unis.» Mais si la start-up veut développer des applications mobiles sur iOS et Android, il faudra bien qu’elle traite avec les deux sociétés californiennes.