Philipp Müller revoit son modèle à la baisse
L’élu PLR voulait plafonner la part d’étrangers à 18%. Aujourd’hui, il défend son modèle de mise en oeuvre du 9 février, le modèle du 1%
Il aime les chiffres, en parsème ses interventions, comme mercredi au Conseil des Etats, lors du débat d’entrée en matière sur la mise en oeuvre de l’initiative «Contre l’immigration de masse». Il les aime sans doute davantage que les surnoms qui lui collent à la peau. Après avoir été souvent raillé comme le «Monsieur 18%» de la Suisse, Philipp Müller, ancien président du PLR, défend un modèle d’application du vote du 9 février qui porte son nom et a de bonnes chances jeudi, lors de la suite des débats au Conseil des Etats.
Pourquoi 18%? C’est la part d’étrangers dans la population suisse qui aurait dû ne pas être dépassée si une initiative populaire portée par Philipp Müller n’avait pas été sèchement rejetée en septembre 2000. Le conseiller aux Etats argovien a tourné la page mais est resté croché aux questions d’immigration. Désormais, il a un autre chiffre en tête pour convaincre que son modèle de mise en oeuvre n’est pas trop bureaucratique: 1%, comme la part de recrutements qui serait concernée par son système chaque année. Des exemples précis
Son modèle, vu comme un monstre bureaucratique aux contours flous par de nombreux milieux économiques et une frange du PLR, consiste en un mécanisme, qui doit se déclencher à partir du moment où un groupe de professions enregistre un taux de chômage supérieur à la moyenne. Dans ces groupes d’activité, les employeurs devraient alors annoncer les postes vacants aux offices de placement, auditionner les candidats désignés par les offices et se
PHILIPP MÜLLER PLR
justifier en cas de refus d’engager. Trop bureaucratique? «Cela ne concernerait que 1% de tous les recrutements sur un an», répète Philipp Müller.
Il donne des exemples, des chiffres encore. Il y avait dans le domaine de la restauration en Suisse 17 000 chômeurs en octobre. «Mais toute la branche de la restauration n’est pas touchée de la même manière», relève Philipp Müller. Des groupes d’activité – la plonge, l’accueil, l’économie domestique – sont davantage concernés. Idem dans la construction, qui comptait 10770 chômeurs en octobre. Or dans ces deux domaines, 10600 travailleurs européens ont été embauchés en Suisse en 2015. Un rouleau compresseur
C’est là que Philipp Müller veut intervenir. Une étude réalisée par le Service cantonal zurichois de l’économie et du travail, sur mandat de l’Union patronale suisse et du canton de Zurich, présentée en septembre dernier, permet de mieux cerner les professions qui seraient concernées par le concept de l’Argovien. Personnel de vente, de secrétariat, de guichet, chauffeurs, comptables ou encore concierges sont des activités dans lesquelles on ne constate, dans le canton de Zurich en tout cas, aucune pénurie de main-d’oeuvre indigène, au contraire.
Philipp Müller en est convaincu: son modèle, en ciblant des groupes de professions à partir d’un seul indicateur – le taux de chômage – est le plus efficace. Et tant pis pour l’affront fait au passage au travail de son collègue de parti Kurt Fluri au Conseil national. Tant pis aussi pour Petra Gössi qui lui a succédé à la présidence du PLR et est devenue invisible dans ce débat politique majeur.
Direct, goûtant peu à la critique sur des détails, le plâtrier-peintre a dû quand même préciser son concept mercredi au Conseil des Etats. Avec plus ou moins de clarté. Que signifie, par exemple, «un taux de chômage supérieur à la moyenne» à partir duquel son mécanisme s’enclenche? «On part du principe qu’il ne s’agit pas d’une différence marginale, mais d’une importante différence avec la moyenne», tente Philipp Müller. Le conseiller aux Etats affirme aussi que les demandeurs d’emploi dont le profil ne correspond pas au poste vacant ne devront pas être entendus par les employeurs. «Le Conseil fédéral précisera les détails dans une ordonnance, notamment ce qu’on entend par profil correspondant.» Philipp Müller reste plus à l’aise avec les chiffres qu’avec les mots.■
«Cela ne concernerait que 1% de tous les recrutements sur un an»