Un requin de Wall Street au service de Trump
Le banquier Steven Mnuchin sera le nouveau secrétaire d’Etat américain au Trésor. Wilbur Ross, lui, est nommé au Commerce. Il est chargé de réindustrialiser les Etats-Unis
Steven Mnuchin, banquier de Wall Street et ancien haut dirigeant de la banque d’affaires Goldman Sachs, a été confirmé au poste de secrétaire d’Etat au Trésor dans la nouvelle administration américaine qui entrera en fonction fin janvier 2017. Une nomination pour le moins paradoxale. Lors de sa campagne électorale, le président élu Donald Trump n’avait pas arrêté de mépriser son adversaire Hillary Clinton et de l’associer avec les «élites de la finance».
Mais, désormais, les deux hommes se connaissent. En mai dernier, le financier avait participé à la fête marquant la nomination de Donald Trump à l’investiture républicaine. Le lendemain, le candidat l’avait chargé du financement de son élection. Steven Mnuchin (53 ans) a coiffé au poteau deux prétendants: Jamie Dimon, patron de JPMorgan Chase, et Jeb Hensarling, président de la commission des finances de la Chambre des représentants. Il succédera à Jack Lew, nommé en 2013 en remplacement de Timothy Geithner, le premier secrétaire au Trésor de Barack Obama.
«La tâche de Steven Mnuchin ne sera pas aisée, analyse Cédric Tille, professeur d’économie à l’Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID) à Genève, et qui connaît bien les Etats-Unis pour avoir travaillé pendant neuf ans à la Federal Reserve Bank of New York. Il devra revoir, comme l’a souhaité le président élu, la loi Sarbanes-Oxley qui avait été conçue comme la réponse aux multiples scandales financiers.» Selon Cédric Tille, le secrétaire au Trésor devra gérer ce retour en arrière.
Autre priorité: la gestion de la dette américaine. «Donald Trump a promis à cor et à cri d’une part de baisser les impôts, et d’autre part d’augmenter les dépenses publiques, relève Cédric Tille. Il ne sera pas évident de trouver l’équilibre même si le renouvellement nécessaire des infrastructures publiques peut être financé avec des emprunts aux taux d’intérêt très bas.» L’économiste genevois craint aussi que la formule partenariat public-privé pour l’aménagement des infrastructures ne profite qu’aux amis du président élu.
Steven Mnuchin n’a aucune expérience de l’administration publique. Au Trésor, il sera à la tête d’une armée de 86000 fonctionnaires. Tout au plus a-t-il été chargé d’une équipe de 5000 salariés lorsqu’il dirigeait la division «Technologies» à la banque Goldman Sachs. C’est là qu’il avait commencé sa carrière en 1985, sur les traces de son père. Il a fait fortune lorsque la banque est entrée en bourse en 1999.
En 2002, Steven Mnuchin quitte Goldman Sachs pour travailler dans un fonds d’investissement, avec le financier américain George Soros. En 2004, il fonde Dune Capital Management, un fonds de fonds. Il découvre alors les opportunités à Hollywood et financera plusieurs blockbusters dont Avatar. En bon opportuniste, l’homme d’affaires a aussi profité de l’explosion de la bulle immobilière en 2008 en achetant une banque en faillite, puis en la revendant à bon prix lorsqu’une partie de la dette eut été reprise par un service gouvernemental.
Le Commerce à un patron de fonds d’investissement
Steven Mnuchin n’est pas le seul homme d’affaires qui a rejoint l’équipe de Donald Trump mercredi. Wilbur Ross, 79 ans et patron d’un fonds d’investissement spécialisé dans le redressement d’entreprises en difficulté, a été confirmé à la tête du département du Commerce, qui est chargé de la politique industrielle américaine. C’est à lui qu’incombera la tâche de réindustrialiser les Etats-Unis et de ramener les entreprises américaines installées à l’étranger au pays. C’est lui qui a convaincu Donald Trump de rompre l’accord de libre-échange avec le Mexique.