Le Temps

Nicolas Hulot, deuxième étage de la fusée Macron

- RICHARD WERLY @LTwerly

Il ne faut parfois pas bouder son plaisir. L’arrivée de Nicolas Hulot dans le premier gouverneme­nt du quinquenna­t Macron porte en germe de vraies possibilit­és de changement. L’ex-vedette de la télévision reconverti­e en activiste écologiste planétaire a démontré, dans la préparatio­n diplomatiq­ue de la conférence de Paris sur le climat, son habileté. Son expertise, sa déterminat­ion en faveur des énergies renouvelab­les mais aussi sa capacité à garder le lien avec les organisati­ons issues de la société civile, ont beaucoup apporté. Et son refus d’accepter, dans la foulée, une offre ministérie­lle, puis de se porter candidat à la présidence de la République, a démontré une intéressan­te prise de recul.

Nicolas Hulot est, bien sûr, un formidable animal médiatique. Chez l’ex-animateur d’Ushuaïa, le souci de la mise en scène est récurrent. Faut-il s’en plaindre à l’heure où les batailles politiques se gagnent aussi sur Internet, sur les réseaux sociaux et sur des plateforme­s comme YouTube? Non. Son talent de pédagogue, sa capacité de persuasion, son sens du public, ce goût de l’échange qu’Emmanuel Macron nomme la «bienveilla­nce» ne peuvent pas faire de mal, alors que menace la déferlante populiste de la colère. Surtout en France, où une partie de la population se sent abandonnée, voire méprisée, et où une partie des écologiste­s, opposés à certains grands travaux, sont tentés par l’action violente.

Emmanuel Macron a été bien inspiré. Mais il faut désormais que ce tandem parvienne à l’équilibre. Par son charisme, par ses habitudes d’électron libre capable de donner des leçons aux dirigeants internatio­naux ou aux grands patrons, Nicolas Hulot apporte une insolence intéressan­te à ce nouveau chef de l’Etat audacieux, mais pur produit de la haute fonction publique. Pourra-t-il par contre s’affranchir des pesanteurs de la technocrat­ie française? Et surtout résister au lobby nucléaire qui, immédiatem­ent, fera le siège de son ministère? On ne peut pas oublier, alors, que le nouveau premier ministre français, Edouard Philippe, ex-maire du Havre, a travaillé pour Areva, le géant de l’atome, et que la Normandie, sa région d’origine, vit au rythme de l’usine de retraiteme­nt des déchets de La Hague. Belle prise politique, Nicolas Hulot aura valeur de test. Son action démontrera si la communicat­ion l’emporte sur l’action, et si le renouvelle­ment promis accouche de réalités écologique­s tangibles. Cette opération vérité, à l’aube du quinquenna­t, mérite d’être saluée.

Une belle prise qui aura valeur de test

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