Le Temps

Une méthode révolution­naire pour apprendre à mieux respirer

SANTÉ A la suite d’une extinction de voix, Yann Lambiel a découvert une méthode qui a changé sa manière de respirer, un tournant décisif pour sa carrière d’humoriste. Zoom sur «la coordinati­on respiratoi­re»

- ANNE-CHARLOTTE MANCEBO www.breathingc­oordinatio­n.ch

Quiconque passe par le sous-sol du Cazard à Lausanne en ressort transformé. Dans un petit local équipé d’une table de massage et d’un piano à queue, Robin De Haas reçoit des patients qui ont besoin d’apprendre à mieux respirer. Sa méthode, appelée «la coordinati­on respiratoi­re», a fait ses preuves auprès d’insomniaqu­es, de chanteurs, de sportifs, d’orateurs, ou de comédiens, si bien que le carnet de rendez-vous du consultant vocal de 37 ans est complet sur une année. Cette méthode se veut différente des autres utilisées communémen­t dans les cours de chant. «Il ne s’agit pas d’appliquer des principes tout faits comme de respirer par le ventre ou de chanter dans le «masque». Là, on change de paradigme et on réfléchit à ce dont l’individu a besoin. Si la personne est crispée au niveau des épaules, il ne sert à rien de lui dire de respirer par le ventre. C’est une révolution car on place l’individu au centre.»

Un géant aux pieds d’argile

Pour résumer, la méthode consiste à détendre tous les muscles qui sont liés de près ou de loin au diaphragme dans le but de faire fonctionne­r le système respiratoi­re avec une efficacité maximale pour un minimum d’efforts. Elle a été inventée de manière intuitive par l’Américain Carl Stough en 1950, puis approfondi­e par son disciple Lynn Martin. Mais c’est Robin De Haas qui l’a formalisée pour pouvoir l’enseigner à d’autres. Depuis 2011, il forme des praticiens qui exercent en Suisse, en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Slovénie et à Los Angeles. Ils sont au nombre de 50 dans le monde, dont 25 en Suisse, et se réuniront ce week-end à Lausanne.

«La respiratio­n est comme un géant aux pieds d’argile, reprend Robin De Haas. Quoi qu’on fasse, le système nous permet de survivre, mais un seul petit facteur peut limiter notre potentiel.» Et cette limite, Yann Lambiel l’a vécue. A la suite d’une extinction de voix, l’humoriste a été dirigé par le CHUV vers Robin De Haas. Une rencontre décisive pour sa carrière. «Dans mes spectacles, j’imite 40 voix de chanteurs en moins de huit minutes. Certaines, comme celle de Renaud, me faisaient mal à la gorge. Je n’ai jamais voulu prendre de cours de chant car j’avais peur de ne plus pouvoir alterner ma voix. Avec Robin De Haas, j’ai appris à respirer, à ouvrir ma voix et avoir du coffre. Il m’a fait comprendre ce que je faisais de faux. Maintenant, je ne suis plus essoufflé, je n’ai plus mal et je peux même chanter du lyrique», se réjouit l’humoriste, qui s’apprête à fêter ses 20 ans de scène au Théâtre de Beaulieu le 20 mai et à monter sur les planches du Maxi-Rires Festival de Champéry trois jours plus tard.

Yann Lambiel n’est pas le seul à avoir découvert le filon. Amandine Rapin, gagnante de The Voice en 2016, a entendu parler de Robin De Haas dans la presse, quelques années auparavant, alors qu’elle donnait des cours de musique dans les écoles primaires. «Ma voix se fatiguait. Je me suis mise à la recherche d’un bon prof de chant qui ne soit pas un charlatan. J’ai commencé avec lui il y a environ deux ans et je n’ai pas été déçue. C’est quelqu’un qui a appris à écouter les gens, il a l’oreille pour repérer tout de suite ce qui bloque la voix», raconte-elle.

De l’autre côté de l’Atlantique, Crystal Barron, coach vocal pour Brennley Brown (l’une des huit finalistes de «The Voice» aux Etats-Unis) est à tel point convaincue qu’elle s’est formée avec Robin De Haas pour donner des cours de chant plus efficaces. La méthode n’attire pas que les chanteurs mais aussi les sportifs, qui peuvent augmenter leurs performanc­es grâce à leur manière de respirer. Si l’oxygène est mieux renouvelé, le rythme cardiaque diminue. Andreja Sterle Podobnik a gagné l’Everest Trail en 2016, alors qu’elle faisait la course dans la catégorie amateur. Depuis qu’elle prend des cours avec une praticienn­e slovène formée par Robin De Haas, elle n’est plus du tout essoufflée dans les marathons et semi-marathons auxquels elle participe.

Un muscle détendu prend de l’ampleur

Mais comment ça marche? Le principe de la méthode est d’identifier les limitation­s de mouvement dans la cage thoracique, puis de stimuler l’endroit pour qu’il bouge de nouveau. Lors de la séance, la personne est allongée sur une table de massage. Robin De Haas manipule ou exerce une légère pression sur les muscles des jambes, des épaules, de la nuque, de la poitrine et de la cage thoracique. Le but est de créer un nouveau référentie­l pour que le patient expériment­e la façon juste de respirer et qu’il s’en souvienne. «Le mouvement correct est agréable. Quand le muscle se détend, il prend de l’ampleur», souligne le coach vocal.

Avec Robin De Haas, j’ai appris à respirer, à ouvrir ma voix et avoir du coffre. Il m’a fait comprendre ce que je faisais de faux

YANN LAMBIEL

Dans la deuxième phase de la consultati­on, le patient travaille ses besoins spécifique­s (chant, parole…). Grâce aux exercices donnés à la fin du cours, il pourra retrouver la bonne manière de respirer. «On ne sort pas des séances en se disant que l’on a appris quelque chose, précise Yann Lambiel. Le cerveau assimile au fur et à mesure la nouveauté. Pour ma part, il m’a fallu près d’un an pour commencer à ressentir la différence.» Pour en savoir plus sur la méthode, une soirée publique de présentati­on sera organisée le 12 octobre dans la grande salle du Cazard, à 20h.

 ?? (KEYSTONE / THOMAS DELLEY) ?? Yann Lambiel au gala du FC Sion, en février dernier.
(KEYSTONE / THOMAS DELLEY) Yann Lambiel au gala du FC Sion, en février dernier.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland