Le Temps

L’amour des classiques, l’exemple genevois

- A. DF

La scène lausannois­e s’enflamme, sous le coup d’une colère longtemps retenue. Molière, Tchekhov, Feydeau seraient sacrifiés, condamnés aujourd’hui à jouer les faire-valoir de programmat­ions high-tech. C’est du moins le point de vue d’acteurs romands tel qu’il s’est exprimé récemment dans le journal 24 heures.

Ont-ils tout faux? Non. Un certain théâtre du verbe, de facture classique pour dire vite, souffre d’une forme de disgrâce dans la ville de Benjamin Constant.

Mais ce n’est pas au Théâtre de Vidy de combler cette lacune. D’abord parce que les auteurs canoniques y sont bien présents, de Faulkner à Shakespear­e, de Tchekhov à Molière. Ensuite parce que Vincent Baudriller développe depuis 2014 un projet pour lequel il a été choisi, à la fois cohérent et passionnan­t par son ouverture sur des formes souvent joueuses, par son attention à la scène internatio­nale, par son obsession surtout de valoriser la vitalité des artistes suisses et romands. Sa maison ne pourrait-elle pas prétendre au titre de théâtre national?

Alors que faire pour satisfaire cette demande de classiques, sensible chez les spectateur­s comme chez les profession­nels? Augmenter par exemple les moyens du TKM où rayonne Omar Porras, cet artiste marqué à jamais par Benno Besson et Ariane Mnouchkine. Des créateurs de la région ou d’ailleurs pourraient y défendre la grande cause des tréteaux.

Facile à dire? D’accord, mais pas impossible. Genève, qui est loin d’être un modèle en matière de politique théâtrale, a pourtant réussi cela. La Comédie, le Théâtre Saint-Gervais et le Poche affirment une ligne contempora­ine. A l’autre extrémité de l’échiquier, le Théâtre de Carouge et son patron Jean Liermier chérissent Feydeau, Marivaux et Sophocle. Cette distributi­on des rôles a le mérite de la clarté et de la pédagogie. C’est souvent en passant par Molière qu’on s’ouvre à l’inconnu.

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