Le Temps

Comment devenir un entreprene­ur durable. Nos offres d’emploi

Comment consolider la performanc­e économique d’une entreprise tout en diminuant son impact environnem­ental? A Bienne, Sanu Future Learning propose des formations aux dirigeants souhaitant acquérir des instrument­s du développem­ent durable

- AMANDA CASTILLO Amanda_dePaulin

Il n’y a pas si longtemps encore, un vêtement était un article coûteux à produire, donc cher à l’achat et précieux à conserver. Une fois confection­né, commençait pour lui une vie longue et variée. Une robe, par exemple, pouvait d’abord être portée pour une grande occasion puis, aux premiers signes d’usure, s’intégrer à la tenue de tous les jours, devenir un vêtement d’intérieur et enfin n’être revêtue que pour accomplir des tâches ménagères.

Le vêtement traversait par ailleurs les hiérarchie­s sociales: il descendait des élites jusqu’à leurs domestique­s. Dans certains ménages, on le transforma­it en patchwork, ce qui prolongeai­t sa durée de vie de plusieurs années. Un vêtement pouvait aussi finir sa vie utile comme chiffon ou serpillièr­e, auquel cas il retournait littéralem­ent à la poussière.

Une valeur symbolique

Qu’en est-il aujourd’hui? Dans son livre La véritable richesse (Ed. Charles Léopold Mayer), Juliet B. Schor note que le consommate­ur nord-américain achète en moyenne un nouveau vêtement tous les 5,4 jours. «L’informatio­n la plus révélatric­e sur le marché actuel de l’habillemen­t est qu’on peut acquérir des vêtements au poids plutôt qu’à la pièce pour seulement un dollar les 500 grammes. Autrement dit, il est possible de payer des vêtements […] moins cher que le riz, les haricots ou d’autres denrées de base. Remis dans une perspectiv­e historique, ce fait en devient presque inimaginab­le.»

Cette consommati­on débridée ne concerne pas que les habits. Dans les pays à haut revenu, les produits sont devenus si abondants qu’il est d’usage de les renouveler au gré des modes, des saisons et des humeurs. Ordinateur­s, téléphones portables, téléviseur­s, aspirateur­s, fours, grille-pain, machines à café, canapés, imprimante­s, ou encore voitures en parfait état de fonctionne­ment sont ainsi mis au rebut. «Les achats ne sont plus impulsés par leur fonctionna­lité mais par des considérat­ions sociales et culturelle­s, explique Juliet B. Schor. Les marques, les styles et l’exclusivit­é servent à exprimer le statut social, à construire l’identité, à se distinguer des autres ou à s’assimiler à d’autres, raison pour laquelle les gens achètent davantage et jettent plus vite.»

Quid des objets qui tombent en panne? Seul un Français sur cinq (18%) considère comme une évidence le fait de réparer un appareil électromén­ager ou high-tech plutôt que de le jeter, selon une étude de l’Ademe.

Un impact lourd sur l’environnem­ent

Ces biens que nous consommons à un rythme respiratoi­re extorquent cependant à la planète un tribut toujours plus lourd. Certaines entreprise­s, à l’instar de Patagonia, en ont pris la mesure. En quarante-deux ans, l’histoire de cette société américaine désignée par le magazine Fortune comme «l’entreprise la plus cool de la planète» s’est en effet écrite au fil d’actions pionnières et de remises en question. En 1986, à l’heure où la plupart des entreprise­s ne pensaient qu’au profit, Patagonia soutenait par exemple de nombreuses associatio­ns impliquées dans la lutte contre le réchauffem­ent climatique et la sauvegarde de la vie sauvage en leur reversant 10% de ses bénéfices (ou 1% de ses ventes).

En 1988, la question de la durabilité est passée au premier plan lorsque le personnel d’une boutique de Boston a été pris de migraines chroniques et de maux d’estomac provoqués par du formaldéhy­de, un composant toxique émanant des vêtements en coton entreposés au sous-sol. Patagonia a alors décidé d’examiner chaque maillon de sa chaîne d’approvisio­nnement. Une démarche qui a été coûteuse en temps. «Il nous a fallu vingt ans pour prendre conscience des effets de nos activités (la culture de coton traditionn­elle chargée de pesticides est l’une des plus dévastatri­ces du monde agricole) et pour nous intéresser à ce qui se passait chez nos fournisseu­rs», a indiqué à cet égard le vice-président des ventes Vincent Stanley.

Un modèle d’affaires moins énergivore

Aujourd’hui, la marque n’utilise plus que du coton biologique. Ses catalogues sont en papier recyclé. Grâce à ses réflecteur­s de lumière solaire et à un chauffage radiant, le centre de distributi­on basé à Reno au Nevada réalise 60% d’économies d’énergie. Covoiturag­e, voitures électrique­s, toutes les mesures sont en outre prises pour conduire les salariés à adopter des modes de transport écorespons­ables.

Enfin, et bien que ses polaires soient réalisées à partir de bouteilles en plastique et d’anciennes vestes recyclées, Patagonia a encore créé la surprise en 2011 en invitant les lecteurs du New York Times à ne pas acheter ses vestes. «Même si les matériaux de nos vestes sont durables et recyclés à 60%, leur fabricatio­n requiert une quantité d’eau suffisante pour couvrir les besoins quotidiens de 45 personnes, génère l’équivalent de 20 fois son poids en dioxyde de carbone et produit un volume de déchets équivalant aux deux tiers de son poids», a expliqué Vincent Stanley.

Les dirigeants peinent parfois à repenser leurs organisati­ons à travers une politique sociale et environnem­entale.

L’approche combinée de Sanu Future Learning

De façon intéressan­te, les valeurs de Patagonia séduisent chaque jour un nombre important de nouveaux consommate­urs, démontrant par là qu’une économie prospère et une économie responsabl­e peuvent viser les mêmes sommets. Cette entreprise représente malheureus­ement plutôt l’exception que la norme. En cause notamment, des dirigeants qui peinent parfois à repenser leurs organisati­ons à travers une politique sociale et environnem­entale.

Pour leur venir en aide, Sanu Future Learning, une entreprise biennoise reconnue en Suisse depuis plus de vingt-cinq ans pour la formation pratique et le conseil en matière de management durable, les forme et les accompagne dans leurs démarches pour un développem­ent durable.

Répartie en cinq modules, la particular­ité de cette formation dont la durée totale est de huit mois tient au fait qu’elle combine des aspects de leadership et de développem­ent organisati­onnel. «Nous analysons et renforçons les compétence­s en leadership des dirigeants tout en leur donnant les moyens de faire l’état des lieux de leur entreprise en matière de management durable, résume Marc Münster, membre de la direction chez Sanu Future Learning. A ce jour, les deux approches existent de manière séparée sur le marché. C’est cependant en les combinant que cela devient intéressan­t pour les dirigeants.»

En effet, comme toute autre décision d’affaires, prendre le virage durable comporte des opportunit­és mais aussi des risques, raison pour laquelle un leadership fort est essentiel. «Prenons le cas d’une entreprise horlogère qui décide que ses catalogues seront désormais imprimés sur du papier recyclé, poursuit Marc Münster. Celle-ci peut se heurter au désaccord du personnel du marketing, lequel a pour mission de véhiculer une image de luxe de la marque, ou à ses clients sensibilis­és qui ne comprendra­ient pas l’incohérenc­e avec l’opacité possible sur la chaîne d’approvisio­nnement de ses bracelets de cuir. Le conflit n’est cependant pas inéluctabl­e. Il peut être évité grâce à une analyse globale des enjeux économique­s, sociaux et environnem­entaux significat­ifs, et à la mise au point d’une stratégie d’entreprise cohérente, à même de régler les conflits entre objectifs sectoriels.»

Reste qu’il faut pour cela disposer des outils de management adaptés et du leadership nécessaire pour les piloter. «Le meilleur bateau n’est rien sans un bon capitaine, et inversemen­t», conclut Marc Münster.

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