Le Temps

Match nul entre supporters

- CHRISTIAN LECOMTE @chrislecdz­5

Plus de mille policiers ont surveillé les deux cortèges de supporters bâlois et sédunois avant le match. A part quelques échauffour­ées sur la plaine de Plainpalai­s et quelques destructio­ns de téléphones, les débordemen­ts ont été évités

Les supporters ultras bâlois et sédunois ont une chose en commun: ils n’aiment pas qu’on les photograph­ie ou qu’on les filme. Jeudi, sur le coup de midi, à hauteur de la gare de Cornavin, un nombre impression­nant de portables ont été saisis de force, jetés à terre et détruits. Les propriétai­res de ces appareils, des badauds pour la plupart, n’ont pas compris ce qui leur arrivait. «Pourquoi ont-ils cassé mon téléphone? Je voulais juste les prendre en photo, c’est beau tout ce monde en rouge avec ces fumigènes. Pour une fois qu’il se passe quelque chose dans mon quartier!» confiait une femme, la cinquantai­ne. Qui des Bâlois ou des Valaisans ont cassé le plus? On ne sait pas. Match nul, simplifier­a-t-on. Contrairem­ent à la rencontre remportée 3 à 0 par les Bâlois.

Mais à midi, les troupes sédunoises, beaucoup plus nombreuses que les bâloises, y croyaient encore «dur comme un Valaisan». Leurs maillots étaient floqués d’un 14 (après les 13 Coupes remportées). Ils sont arrivés à bord de trois trains spéciaux vers 13h. Les Bâlois les ont devancés d’une heure dans trois trains eux aussi. Sortie côté Montbrilla­nt pour ces derniers, puis départ en cortège vers le stade de la Praille via la Jonction et la route des Jeunes. Un match de football s’est improvisé aux Grottes avec ballon et canettes de bière. Les commerces dans et autour de la gare avaient reçu la consigne de baisser les rideaux de 11h à 14h. Le café La Petite Reine a tenu à rester ouvert, «parce que c’est la fête tout de même». De nombreuses Bâloises ont pu ainsi se rendre aux toilettes. «Ma facture d’eau va être énorme», s’est inquiétée la gérante.

Peur d’être fiché

Premières destructio­ns bâloises de téléphones. Un jeune explique en anglais: «Après, on se retrouve sur Facebook et la police nous fiche.» S’il avait levé la tête, ce supporter aurait entraperçu sur les toits environnan­ts bon nombre de ces policiers en train de le photograph­ier. Un homme, d’âge mûr, qui est monté lui aussi dans le train: «Je suis malade parce qu’ils ont fumé de Bâle à Genève. Ceux-là que vous voyez, ce sont les ultras de la Scène, les premières lignes, ils sont bien organisés mais ils peuvent être agressifs. Mais il faut faire davantage attention aux autres, moins contrôlés.»

Décor quasi identique du côté du boulevard James-Fazy, point de départ du cortège sédunois qui transitera par Plainpalai­s et Carouge. Comme pour un marathon, une corde est tenue par de solides mains pour contenir les milliers de Rouge et Blanc impatients de rallier la Praille. Devant, les durs. Puis des supporters lambda, des familles, des enfants, des anciens. On tire des containers à poubelle ou des caddies qui ravitaille­nt en boissons. Un jeune homme avec un mégaphone prévient un policier en civil: «Nous, on marche et rien ne nous arrête, alors il ne faut pas d’obstacle et tout se passera bien, et surtout pas de photos!» Plusieurs policiers s’approchent des badauds: «Ne les provoquez pas, ça les excite. Rangez vos téléphones. Pour le moment, tout se passe bien, alors coopérez.» IPhone mis en morceaux là aussi.

Plainpalai­s vers 13h, une échauffour­ée: un groupe s’est voulu dissident et a tenté de marcher sur la plaine sous le prétexte que des doigts d’honneur leur auraient été tendus. Tirs à blanc de la police. Retour du calme. Pierre Maudet, le conseiller d’Etat genevois chargé de la sécurité, croisé au stade à la mi-temps, dit: «La stratégie était de répondre dans la seconde à tout débordemen­t. Un abribus dégradé et quelques tags, c’est tout ce que l’on a à déplorer pour le moment, c’est bien.»

Mille policiers dans les rues. Le plus souvent peu visibles, «pour ne pas provoquer», justifie un agent. Mais un tour dans les ruelles adjacentes permettait de voir de plus près le déploiemen­t impression­nant des forces de l’ordre, en tenue Robocop et soutenues par des véhicules lances à eau, tandis qu’un hélicoptèr­e a tourné dans le ciel genevois tout l’après-midi.

A 15h, les supporters bâlois sont déjà en tribune nord lorsque ceux de Sion descendent la rampe du Bachet-de-Pesay. Voilà qui rassure à la fois les politiques et les policiers. Les Sédunois entrent dans le stade et chantent. Peut commencer ce pourquoi tout le monde est venu: la finale de la Coupe de Suisse. Une première mi-temps ennuyeuse. Trois buts du FC Bâle ensuite. L’affaire est pliée. Dépitée, une supportric­e valaisanne qui rejoint son bus stationné route des Jeunes résume: «On n’a pas été foutu d’aligner trois passes de suite, à cause de jeunes comme Constant, venu du Milan AC, qui ne courent pas et donnent l’impression de tout le temps faire des selfies sur le terrain.» Encore une histoire de photos…

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