Le football sur sa planète
Récemment, Jacky Delapierre, l’organisateur du meeting Athletissima, nous a fait cette réflexion: «Il y a le sport, et il y a le football. Ce sont deux réalités à part.» C’était dit sans volonté de dénigrer le football, simplement pour bien faire comprendre que le sport le plus populaire au monde se situe, question chiffres, sur une autre planète.
L’actualité récente est en passe d’en faire une nouvelle démonstration. Les tentatives du Paris Saint-Germain pour acquérir l’attaquant brésilien du FC Barcelone Neymar font état d’une négociation autour des 220 millions d’euros, salaire non compris. A peine moins ahurissant, le Real Madrid a formulé une offre de 160 millions d’euros (plus des bonus) pour recruter la nouvelle pépite de l’AS Monaco, Kylian Mbappé, 18 ans.
Ces transactions aboutiront ou pas, mais dans les deux cas les clubs acquéreurs sont prêts à payer ces sommes vertigineuses. L’une comme l’autre dépasserait de très loin le précédent record (105 millions d’euros pour Paul Pogba à Manchester United), lui-même établi l’été dernier seulement, luimême déjà considéré comme inouï, excessif, déraisonnable, lui-même déjà très supérieur au précédent record, lequel avait en son temps aussi fait scandale.
Les sommes déboursées pour les joueurs de football ont toujours suscité la polémique. Elles n’ont jamais cessé d’augmenter. Depuis quatre à cinq ans, le mouvement s’est brutalement accéléré. Une étude publiée en début d’année par l’UEFA a montré que les grands clubs européens sont désormais six fois plus riches qu’il y a vingt ans et deux fois plus qu’en 2004. Ce sont pourtant les mêmes depuis toujours: Bayern Munich, Manchester United, Real Madrid, Juventus de Turin, Liverpool, FC Barcelone.
Le football était un sport universel, il est devenu une industrie mondialisée qui s’est organisée en un système pyramidal au sommet duquel une douzaine de clubs se sont lentement transformés en géants du divertissement. Cette petite oligarchie capte l’essentiel des ressources et de l’intérêt générés par le football. Elle intéresse désormais des investisseurs américains, des sponsors chinois, des supporters australiens, des marques indiennes, des fonds d’investissement saoudiens, des télévisions thaïlandaises.
Ces clubs aux moyens quasi illimités ont besoin de grands joueurs pour gagner des matches et des marchés. Plus encore le PSG, douloureusement éliminé de la Ligue des champions ce printemps 6-1 par le Barça de… Neymar. Outre ses qualités footballistiques, le Brésilien est une star planétaire, plus suivi sur les réseaux sociaux que le PSG et l’ensemble de ses joueurs. C’est tout cela qui entre dans la facture et porte l’addition à 220 millions. Double champion d’Europe en titre, le Real Madrid est dans une autre posture. Il n’a pas de marché à conquérir mais une place à préserver. S’il parvient à enrôler celui que l’on présente comme le successeur de Cristiano Ronaldo, il estimera que 160 millions, ça n’est pas cher payé.
Ces clubs aux moyens quasi illimités ont besoin de grands joueurs pour gagner des matches et des marchés