Le Temps

En France, le football féminin connaît un essor spectacula­ire

- LIONEL PITTET @lionel_pittet

Depuis 2011, la Fédération française a doublé son nombre de licenciées, vu l’Olympique lyonnais remporter quatre Ligues des champions et obtenu l’organisati­on de la Coupe du monde 2019. Les Bleues affrontent la Suisse ce mercredi à Breda

Les footballeu­ses de l'équipe de Suisse ont répété leur plan de marche comme un mantra pendant les semaines qui ont précédé l'Euro aux Pays-Bas: «Nous voulons remporter nos deux premiers matches afin d'assurer notre qualificat­ion pour les quarts de finale avant d'affronter la France.» C'est raté. Pour passer le cap du premier tour, elles devront, ce mercredi à 20h45 à Breda, nécessaire­ment battre ces Bleues qu'elles craignent tant. «Pour gagner, chacune d'entre nous devra réaliser une performanc­e hors norme, prévient la latérale Noëlle Maritz. Nos adversaire­s ont des joueuses redoutable­s à tous les postes.»

L'équipe de France pointe au troisième rang du classement FIFA, derrière les intouchabl­es Etats-Unis et l'Allemagne. Comme sa cousine germanique, elle apparaît dans toutes les listes de prétendant­es au titre européen, même si elle n'a remporté aucun grand tournoi internatio­nal à ce jour. C'est que dans l'Hexagone, l'essor du football féminin est un phénomène récent. Cela ne l'empêche pas d'être spectacula­ire.

Un «plan de féminisati­on»

Depuis 2011, le nombre de joueuses licenciées est passé de 54500 à 118000. L'Olympique lyonnais, le meilleur club du pays, a remporté la Ligue des champions à quatre reprises (2011, 2012, 2016 et 2017) et a perdu une fois en finale (2013), comme le Paris Saint-Germain à deux reprises (2015 et 2017). Enfin, la Fédération française de football (FFF) a obtenu l'organisati­on de la Coupe du monde 2019, la première de l'histoire qui réunira 24 équipes. Elle se déroulera au moins de juin dans neuf villes du pays, au bon souvenir de l'Euro masculin accueilli l'été dernier.

Ce développem­ent massif ne tombe pas du ciel mais découle d'une véritable volonté politique, que la FFF a traduite avec l'introducti­on de son «plan de féminisati­on du football» voilà six ans, en marge du Mondial 2011. Il y est question de «valoriser la place des femmes dans le football», de «devenir une nation de référence» ou encore d'«innover en matière de formation». Derrière ces grandes lignes directrice­s un peu vagues, des objectifs très concrets – par exemple, augmenter le nombre de femmes à tous les types de poste et dans chaque ligue de 10% par saison – et ambitieux: la feuille de route escomptait un titre majeur des Bleues dans les quatre ans.

Le délai est écoulé, mais elles ont l'occasion cet été d'atteindre l'objectif. Sinon, ce sera pour dans quatre ans, à domicile. «C'est un rêve de disputer une Coupe du monde à la maison, réagissait la capitaine Wendie Renard au moment de l'attributio­n du tournoi à la France. On se souvient tous de 98. J'ai envie de connaître les mêmes émotions.» Comme Zidane, Deschamps et compagnie à l'époque, les Françaises s'attendent à jouer chez elles avec la pression qui accompagne un important soutien populaire.

Un public qui répond présent

Leurs matches à domicile se disputent désormais devant plus de 20000 personnes. Eurosport et France Télévision­s diffusent des rencontres. En 2015, leurs matches lors du Mondial 2015 au Canada avaient généré des audiences record pour la TNT sur W9. TF1, la première chaîne du pays, a fait l'acquisitio­n des droits de diffusion de la prochaine édition dans son intégralit­é.

Photos nues et militantes

C'est une petite révolution, menée à grande allure. Pas plus tard qu'en 2009, le sélectionn­eur de l'époque Bruno Bini avouait son «sentiment que les journalist­es sportifs ne trouvent pas digne d'intérêt le football féminin». La qualificat­ion de ses protégées pour l'Euro n'avait donné lieu qu'à quelques brèves dans la presse nationale. Pour sensibilis­er le public, la fédération imagine alors une campagne audacieuse. Quatre joueuses posent nues, avec un slogan sans équivoque: «Faut-il en arriver là pour que vous veniez nous voir jouer?» L'opération fonctionne et les demandes d'interviews pleuvent. Aujourd'hui, les médias s'intéressen­t à ces Bleues qui, pour ne rien gâcher, ne manquent pas d'ambition.

Mais pour l'instant, l'équipe de France ne se montre pas aussi irrésistib­le que prévu dans le groupe C de l'Euro néerlandai­s. Elle n'a remporté son premier match contre l'Islande que par la grâce d'un penalty généreusem­ent accordé en fin de match. Puis elle a concédé le match nul contre l'Autriche. «Je suis confiante pour la suite, ça va aller. Notre objectif, c'est d'être invaincues et il nous reste le troisième match pour nous qualifier», lâchait la gardienne Sarah Bouhaddi il y a quelques jours, convaincue que la vague bleue n'est pas près de retomber. L'équipe de Suisse va néanmoins tenter de lui faire barrage.

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