Le Temps

L’UDC ne veut pas de conseiller­s fédéraux binationau­x

- B. W.

La règle que le parti veut appliquer à Jacqueline de Quattro, Suisse et Italienne, doit aussi valoir pour Benoît Genecand, Suisse et Français

que Didier Burkhalter n’a jamais acquis la nationalit­é autrichien­ne de son épouse, Jacqueline de Quattro a, elle, deux passeports, l’un suisse, l’autre italien. Sa collaborat­rice le confirme. Cela compromet-il sa candidatur­e à l’élection au Conseil fédéral? Juridiquem­ent, rien ne s’y oppose, selon la cheffe de l’informatio­n de la Chanceller­ie fédérale, Ursula Eggenberge­r. La Constituti­on dit deux choses: «Tout citoyen ou citoyenne ayant le droit de vote est éligible au Conseil national, au Conseil fédéral et au Tribunal fédéral» et «les membres du Conseil fédéral sont choisis parmi les citoyens et citoyennes suisses éli- gibles au Conseil national». Or, la double nationalit­é est autorisée en Suisse depuis 1992 et aucune règle n’interdit aux membres du parlement d’avoir un second passeport.

Il y a d’ailleurs eu plusieurs précédents aux Chambres fédérales. Dans une réponse à une question posée par Hugues Hiltpold (PLR/ GE) en 2008, le Conseil fédéral rappelait que plusieurs ressortiss­ants allemands avaient «fait une carrière politique à l’échelon fédéral» au XIXe siècle et au début du XXe, comme le socialiste Herman Greulich (pour le canton de Zurich), le catholique-conservate­ur Heinrich Walther (Lucerne) ainsi que Karl Hoffmann. Ce radical, père d’Arthur, siégea à Berne sous la bannière saint-galloise et fut même élu au Conseil fédéral en 1881, mais il refusa son élection «pour des raisons familiales», selon le Dictionnai­re historique de la Suisse.

Plusieurs membres du parlement actuel sont doubles nationaux: Ada Marra (PS/Italie), Lisa Mazzone (Verts/Italie), Claude Janiak (PS/Pologne), Cédric Wermuth (PS/Italie), Benoît Genecand (PLR/France), pour ne citer qu’eux. Quant à Olivier Français, qui s’est mis à dispositio­n de son parti au cas où celui-ci le solliciter­ait pour remplacer Didier Burkhalter, il est né Français mais a été naturalisé Suisse en 1988, soit avant l’entrée en vigueur de la loi autorisant la double nationalit­é.

Un «candidat valable», vraiment?

Aucun obstacle juridique n’empêcherai­t donc Jacqueline de Quattro d’être élue au Conseil fédéral. Il y a toutefois des opposition­s de nature politique et, sans surprise, elles viennent de l’UDC. Dans le Blick, le conseiller national Peter Keller (NW) dit que sa candidatur­e n’est «pas acceptable». «Imaginons que Jacqueline de Quattro dirige un départemen­t qui a la charge de dossiers délicats tels que la libre circulatio­n des personnes, les frontalier­s ou l’imposition à la source avec l’Italie», s’étrangle-t-il.

Voilà qui devrait refroidir le président du parti, Albert Rösti, qui a déclaré récemment que «Benoît Genecand serait un candidat valable». Il ne savait sans doute pas que le Genevois était binational.

L’UDC s’en prend régulièrem­ent à la double nationalit­é. En 2014, Peter Keller avait déposé une motion demandant au Conseil fédéral de ne pas autoriser les membres du corps diplomatiq­ue à détenir un second passeport. Sa motion avait cependant été rejetée en septembre 2016.

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