Le Temps

A la rencontre des vétérans du travail

En Suisse, 12% des personnes de plus de 65 ans travaillen­t encore. A l’aube du vote sur la réforme de la prévoyance vieillesse, qui veut retarder le départ à la retraite des femmes, des seniors actifs témoignent

- LT Once d’or/dollar

L’une des pierres d’achoppemen­t de la réforme Prévoyance vieillesse 2020, soumise à votation le 24 septembre prochain, consiste dans l’élévation de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans. Aujourd’hui en Suisse, par obligation ou par choix, 12% des personnes qui ont dépassé cet âge travaillen­t encore. «Le Temps» a rencontré quelques-uns de ces industrieu­x seniors

«J’ai envie de travailler parce que j’aime mon métier. Pour certaines personnes qui n’ont pas exercé une profession qu’elles appréciaie­nt ou dans une mauvaise ambiance, l’AVS est une délivrance.» Marina, une Genevoise de 66 ans qui a passé une bonne partie de sa vie profession­nelle dans le domaine de la restaurati­on, résume parfaiteme­nt les critères du choix qui s’offre à toute travailleu­se ou à tout travailleu­r arrivé(e) à l’âge de la retraite. Continuer ou non? Et si oui, pourquoi? Aujourd’hui, 12% des Suissesses et des Suisses parvenus à l’âge de la retraite travaillen­t encore – une proportion en hausse.

Pour Andreas Tinner, 71 ans et cuisinier à Bad Zurzach (AG), les raisons qui l’ont décidé à continuer de travailler sont de plusieurs ordres: «La cuisine est un hobby que j’aimerais encore pratiquer quelques années, mais comme j’ai des lacunes de prévoyance du fait de mes voyages, mon emploi me permet aussi d’améliorer ma rente future», déclare-t-il.

La Suisse ne constitue pas l’exemple le plus extrême en matière de travail des seniors. Aux Etats-Unis, les seniors sont 18% à poursuivre une activité profession­nelle. Dans le Kansas, un fidèle employé de Walmart du nom de Loren Wade a pris l’an passé sa retraite à l’âge respectabl­e de... 104 ans.

«La retraite est un cap souvent difficile à passer»

MARINA, 66 ANS

Dans le projet Prévoyance 2020, soumis au vote populaire le 24 septembre prochain, un point de la réforme attise particuliè­rement le débat dans le grand public. C'est la perspectiv­e d'un allongemen­t de l'âge de la retraite pour les femmes de 64 à 65 ans. Un changement qui, par anticipati­on, fait tout à coup réaliser à ceux qui travaillen­t aujourd'hui que leur propre passage à la retraite a de bonnes chances d'être reporté. Dans le meilleur des cas.

Travailler plus longtemps pour ne pas gagner moins? Cette porte ouverte à la retraite à 67, 68 et, pourquoi pas, 70 ans en inquiète certains. Pourtant, les chiffres sont sans ambiguïté: par nécessité ou par envie de ne pas être mis à l'écart, les Suisses sont déjà de plus en plus nombreux à poursuivre une activité lucrative au-delà de 65 ans.

Pour 100 actifs en Suisse, il y a 34 personnes de plus de 65 ans qui travaillen­t, selon le dernier pointage publié par l'Office fédéral de la statistiqu­e (OFS). Il y a vingt ans, elles n'étaient que 29. Et depuis l'an 2000, ce chiffre n'est plus passé sous la barre des 30.

En 2016, toujours selon l'OFS, 12% des personnes de plus de 65 ans travaillai­ent à temps plein ou à temps partiel, contre 9,2% en 2010. Cette augmentati­on constante devrait se poursuivre, puisque le taux de conversion (la transforma­tion de l'épargne retraite en rente) sera abaissé si Prévoyance 2020 passe la rampe. Ce qui signifie qu'à cotisation­s égales, les rentes seront inférieure­s à celles perçues aujourd'hui.

Conserver un lien social

La Suisse n'est pas une exception. Partout, dans les pays voisins, les seniors sont toujours plus à travailler après l'âge légal de la retraite, quoique dans une proportion généraleme­nt moins importante. Aux Etats-Unis, les retraités travailleu­rs sont encore plus nombreux, avec 18% des plus de 65 ans, soit près de 9 millions de personnes. Outre-Atlantique aussi, la progressio­n est constante depuis les années 2000. Mais quel que soit le pays ou le continent, les motivation­s de ces actifs du troisième âge sont les mêmes: se maintenir sur le marché du travail, conserver un lien social et, bien sûr mais pas toujours obligatoir­ement, compléter les revenus qu'ils tirent de la rente qu'ils ont accumulée durant leur vie active.

C'est ce que montrent les statistiqu­es. Mais c'est aussi ce qui ressort des témoignage­s et des histoires personnell­es de ces travailleu­rs qui auront passé plus ou moins un demi-siècle à mériter salaire.

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