Le califat? Un bien piètre gestionnaire
Toutes choses égales par ailleurs, l'Etat islamique aurait fait chuter d'un quart le revenu des villes sous son contrôle...
Alors qu’il est aujourd’hui pratiquement en ruine et, au-delà des innombrables souffrances humaines, le «califat» mis en place par l’Etat islamique représente-t-il néanmoins un bon modèle économique? La RAND Corporation s’est livrée à l’étonnant exercice de répondre à cette question. S’appuyant notamment sur des données issues de photos satellite, elle parvient à une conclusion chiffrée: sous leur contrôle, les principales villes du «califat» auraient connu une chute du PIB de 23%.
A son apogée, l’Etat islamique engrangerait des revenus estimés à quelque 2 à 3 millions de dollars par jour. Cependant, note la RAND, son économie a montré «de clairs signes d’effondrement» dans de multiples secteurs, que ce soit sur les marchés locaux, dans le domaine de l’électricité ou de l’agriculture. Le groupe a néanmoins consacré «des ressources significatives» à gouverner ses deux capitales en Syrie et en Irak, soit Raqqa et Mossoul. Au point que ses estimations semblent montrer que ces deux villes ont plutôt «fait mieux», juste après la prise de pouvoir de l’EI, par rapport à des périodes précédentes du conflit.
Pour justifier son étude, la RAND rappelle que l’EI avait lié la création de son «califat» à une promesse de prospérité. Or, il s’est montré incapable de soutenir l’économie ailleurs, dans des territoires moins sûrs ou plus contestés de son territoire. «Cette incapacité de soutenir un proto-Etat prospère représente un échec institutionnel», note l’auteur du rapport.
Presque autant que sur cette conclusion, le rapport insiste cependant sur la méthode employée, une première jusqu’ici. Tandis que les territoires de l’EI étaient inaccessibles, et que l’on ne dispose évidemment d’aucune statistique, les chercheurs se sont basés sur des images satellite pour mesurer par exemple la production agricole, le trafic commercial ou l’activité industrielle. «L’Etat islamique n’a pas trouvé les moyens de capitaliser dans un vaste territoire, face à des gouvernements historiquement faibles et à une population locale qui, potentiellement, pouvait adhérer à ses idées», dit encore le rapport.
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«Cette incapacité de soutenir un proto-Etat prospère représente un échec institutionnel»
LE RAPPORT DE LA RAND CORPORATION