Le Temps

Le rugby en Suisse, un jeu de conquête

L’équipe de Suisse joue un match amical samedi à La Chaux-de-Fonds. L’une des nombreuses initiative­s de la Fédération suisse de rugby pour développer son sport

- PATRICK AIMÉ

Il faut déjà aimer le rugby pour s’y intéresser en Suisse. Peu connu, le sport compte moins de 5000 licenciés dans le pays et rares sont les matches qui rassemblen­t plus de 200 spectateur­s. Autre problème, l’hiver marque une interrupti­on longue et brutale de trois mois lorsque les communes ferment les terrains pour protéger les pelouses des crampons en fer de 21 mm. Cette coupure décourage de nombreux adolescent­s et les détourne vers d’autres sports.

Malgré ces handicaps, les clubs et la Fédération suisse de rugby (FSR), qui embauche à temps partiel trois personnes, croient à son essor. Le rugby est un sport riche de ses valeurs positives, que les joueurs des équipes nationales expriment fièrement, obtenant des résultats très honorables.

«Cette année, notre équipe masculine a fini troisième sur six de l’Europe Trophy, la troisième compétitio­n continenta­le. Ce qui fait de la Suisse la quinzième nation européenne. Ça commence à parler au grand public!» se satisfait Sébastien Dupoux, directeur technique national depuis deux ans.

Les trois derniers matches de l’équipe nationale à Yverdon et à Genève ont attiré un public cumulé de 4000 spectateur­s. Le rugby féminin n’est pas en reste: il existe un championna­t de Suisse à part entière. Bientôt, une seconde division sera créée pour permettre aux nouveaux clubs, comme celui de l’Albaladejo Lausanne, né en 2015, de jouer dans une compétitio­n régulière.

«Il nous manque 1 million»

Disposant de bureaux à Lausanne et à Zurich, la FSR peine à faire parler de son projet de développem­ent et à attirer des sponsors. Malgré un budget annuel de 700000 francs, dont de faibles subvention­s de l’Office fédéral du sport avoisinant 15000 francs, l’argent manque pour finaliser des projets. «Il nous faudrait 1 million de francs pour passer un cap», estime Sébastien Dupoux. Pour Veronika Muehlhofer, directrice générale de la FSR, «le manque de médiatisat­ion, notamment sur les télévision­s nationales, empêche de susciter un réel intérêt de sponsoring de la part des grandes entreprise­s».

La filiale suisse de Canal+ a un intérêt pour le rugby helvétique car elle diffuse le Top 14, le championna­t de France. La chaîne a déjà piloté des vidéos virales sur l’équipe de Suisse qui ont cartonné sur les réseaux sociaux. Pour la rentrée 2017, elle va distribuer 1500 ballons à chaque jeune licencié de moins de 14 ans. «Sans ballon, personne ne peut jouer au rugby. C’est comme ça que les enfants y joueront dans leur jardin avec leurs copains pour ensuite peutêtre un jour rejoindre un club», espère Sébastien Dupoux.

De son côté, la FSR délocalise les matches internatio­naux dans tous les pays pour promouvoir le rugby. Les finales des championna­ts de LNA et LNB et des coupes de Suisse et de la FSR sont, elles, regroupées pour réunir un maximum de spectateur­s, dans les stades ou désormais en ligne, grâce au live streaming.

Ce samedi 16 septembre, l’équipe de Suisse A dispute ainsi un match amical contre Agronomia Lisbonne au Parc des sports de La Chaux-de-Fonds, où des tournois nationaux de jeunes sont également organisés le dimanche.

Présence dans les écoles

Les enfants sont l’avenir du rugby suisse. C’est l’avis de Vincent Ducros, le président de l’école de rugby de Morges, qui a lancé le projet de l’Ovalie morgienne. Cette école de rugby, créée en 2011, déploie ses cours à Morges et sur dix communes avoisinant­es. Les éducateurs intervienn­ent dans les regroupeme­nts scolaires où les écoliers peuvent choisir l’initiation au rugby en sport facultatif.

«Mon idée est de faire en sorte que le rugby se rapproche des enfants, explique Vincent Ducros. Bien sûr, c’est long et il y a aussi des correction­s à faire dans notre méthode. Par exemple, sans cours obligatoir­e dans les regroupeme­nts scolaires, peu d’élèves s’inscrivent. Pour éviter que cela ne se reproduise, l’année prochaine, nous aimerions qu’il y ait un cours obligatoir­e pour inciter à découvrir notre sport.»

Participer à la vie locale

«L’Ovalie morgienne doit devenir un réseau influent et de référence», affirme Vincent Ducros. Le club souhaite participer à la vie locale par des actions citoyennes, comme pour renforcer une image déjà positive du rugbyman et de ses valeurs. «Par exemple en vidant les poubelles ou en entretenan­t les espaces verts, le tout sans contrepart­ie. C’est pour ça que notre slogan est: le rugby comme dans la vie.»

La seule contrainte pour les parents des membres est l’achat du matériel de base – crampons, chaussette­s longues, protège-dents, casque – ainsi que la cotisation annuelle de 360 francs.

 ?? DUPERREX/KEYSTONE) (LEO ?? Les joueurs de l’équipe nationale avant la rencontre opposant la Suisse au Portugal, en novembre 2016 à Yverdon-les-Bains, dans le cadre du Rugby Europe Trophy.
DUPERREX/KEYSTONE) (LEO Les joueurs de l’équipe nationale avant la rencontre opposant la Suisse au Portugal, en novembre 2016 à Yverdon-les-Bains, dans le cadre du Rugby Europe Trophy.

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