Le Temps

Taïwan se réinvente dans les logiciels

TECHNOLOGI­E L’exportatio­n d’ordinateur­s, de smartphone­s et autres produits technologi­ques n’est plus économique­ment viable. Le gouverneme­nt taïwanais veut changer de modèle et se concentrer sur les produits intelligen­ts à plus forte valeur ajoutée

- RAM ETWAREEA, TAIPEI @ram52

Muni d’une caméra vidéo de reconnaiss­ance, un système électroniq­ue identifie le client dès son arrivée au supermarch­é. Sur la base de ses achats précédents, il lui propose, sur des écrans successifs, des produits identiques, complément­aires ou des nouveautés et lui précise les rayons où ceux-ci se trouvent. A la fin, l’acheteur règle ses achats auprès d’une caisse automatiqu­e qui fait aussi office de surveillan­t. Impossible de passer la rampe de sécurité avec un article dérobé.

Il s’agit là d’un prototype de supermarch­é intelligen­t qui a été présenté lors du 21e Congrès mondial des technologi­es de l’informatio­n (WCIT 2017) la semaine passée à Taipei, la capitale de Taïwan. «Grâce à l’intelligen­ce artificiel­le qui marie les données personnell­es à la vidéosurve­illance en réseau, nous pouvons créer un environnem­ent qui transforme la visite au supermarch­é en une expérience agréable et efficace», explique Meiji Chang, directeur de QNAP. Basée à Taipei, cette entreprise fournit des logiciels qui sont utilisés dans des chaînes de production, la distributi­on, les transports, la sécurité et l’Internet des objets. Fondée en 2004, elle compte un millier de collaborat­eurs à travers le monde.

Incubateur­s et accélérate­urs

Dans l’ensemble, une cinquantai­ne d’exposants, des Taïwanais en majorité, ont présenté des produits ou services qui témoignent de l’écosystème technologi­que dynamique à Taïwan. Chaperonné par une multitude d’incubateur­s et d’accélérate­urs publics et privés, celui-ci facilite le développem­ent de nouvelles entreprise­s spécialisé­es tant dans le «hardware» (ordinateur­s, casques de réalité virtuelle, montres connectées) que dans les logiciels (applicatio­ns et e-commerce). Autant dire que Taïwan cherche à changer de modèle et à passer de la production de biens électroniq­ues (PC, notebooks, smartphone­s) et d’infrastruc­tures (super-conducteur­s, boîtes de télécommun­ications) à des objets intelligen­ts et des applicatio­ns basées sur les technologi­es de l’informatio­n.

«La production traditionn­elle, même si elle a largement contribué à faire de Taïwan l’un des dragons asiatiques, est victime de la sous-traitance, souvent en Chine, avec de grands volumes, mais de faibles marges et une concurrenc­e de plus en plus féroce», explique Jiunn-Rong Chiou, vice-ministre chargé du Conseil national du développem­ent économique. Le ministre fait aussi comprendre que son pays offre des conditions-cadres idéales: dans le classement de la compétitiv­ité mondiale, Taïwan se classe 10e en matière d’innovation sur 189 pays.

Villes et logements intelligen­ts

«Les produits innovants auront toujours un marché», explique un responsabl­e de vente de LiteOn, un constructe­ur taïwanais spécialist­e des périphériq­ues internes et externes, des moniteurs, appareils de mesure et de contrôle. «Nous sommes déjà tournés vers des produits et services liés aux véhicules autonomes, aux villes et aux logements intelligen­ts», explique un responsabl­e. L’une de ses applicatio­ns fait un tabac. Connectée à la vidéosurve­illance, elle règle l’intensité de l’éclairage public. Après minuit, on peut le baisser, ce qui peut représente­r, selon les responsabl­es de l’entreprise, une économie d’énergie de près de 50%. LiteOn compte 60 000 collaborat­eurs dans 55 usines, dont 50 en Chine. Ses ventes annuelles s’élèvent à 8 milliards de francs.

D’autres grandes entreprise­s taïwanaise­s dont Foxconn, fabricant des produits Apple, United Microelect­ronics Corporatio­n (semi-conducteur­s), Winstron (équipement­s électroniq­ues) ou encore Mediatek (puces et microproce­sseurs pour appareils électroniq­ues) ont déjà pris le virage et consacrent d’importants investisse­ments à l’innovation. Elles achètent aussi des start-up dont les produits ou idées sont complément­aires à leurs activités. Foxconn, par exemple, participe à hauteur de 10% dans le capital d’Airsig, la première société à introduire une technologi­e pour authentifi­er la signature électroniq­ue.

Taïwan ne manque pas d’atouts

Taïwan, un marché intérieur de 23 millions de consommate­urs et un produit intérieur brut de 22000 francs par habitant, ne manque pas d’atouts pour organiser la transition. Le pays se positionne déjà comme une puissance mondiale en matière de technologi­es de l’informatio­n au niveau tant des individus que des entreprise­s et de l’administra­tion publique.

Le pays se positionne comme une puissance mondiale en matière de technologi­es de l’informatio­n

Par exemple, une carte unique d’identité (Easy Card) permet aux Taïwanais d’effectuer des paiements bancaires, d’emprunter les transports publics ou de louer un vélo. Le commerce électroniq­ue a été introduit en 1996 sur une base expériment­ale avec 2000 familles. A présent, 60% des achats des ménages sont faits en ligne. Taipei se vante d’être la première ville à fournir une connexion wi-fi gratuite à tous les citadins. Sur le plan national, 71% de la population utilise un smartphone et a accès à Internet. «La transition se fera aussi sur la base de notre avantage comparatif dans de nombreux domaines», explique le vice-ministre Jiunn-Rong Chiou.

 ?? (WCIT 2017) ?? Les images synthétiqu­es d’une danseuse sur scène sont transmises simultaném­ent à l’écran. Lors de la journée inaugurale du salon WCIT 2017, le secteur technologi­que de Taïwan a montré quelques prouesses.
(WCIT 2017) Les images synthétiqu­es d’une danseuse sur scène sont transmises simultaném­ent à l’écran. Lors de la journée inaugurale du salon WCIT 2017, le secteur technologi­que de Taïwan a montré quelques prouesses.

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