Le Temps

OBJECTIF CITÉ DE LA MUSIQUE

DOSSIER Le projet d’une grande philharmon­ie genevoise est sur les rails, pour une ouverture en 2022.

- PAR SYLVIE BONIER @SylvieBoni­er

Après quatre ans de ténacité, le président de la Fondation pour la Cité de la musique de Genève touche enfin au premier but concret de son rêve. La première session du concours d’architectu­re vient de s’achever, avant une seconde qui, en octobre, dévoilera le nom du lauréat et l’aspect du bâtiment. L’homme, passionné, revient sur la saga de «sa» Cité

Son étude vitrée à la vue dégagée en dit beaucoup sur Bruno Mégevand. La clarté, l’espace et l’ordre y règnent. Le lieu domine. Les tableaux? Colorés et très graphiques. Les photos? Celles de ses six enfants, alignées sur deux rangées verticales, l’accompagne­nt discrèteme­nt. Ainsi que le sourire encadré de l’avocat Jean-Philippe Maitre, qui le forma et lui mit le pied à l’étrier. L’affection est présente. Quelques sculptures très épurées et la copie en bronze du buste de Gustav Mahler, réalisée par Rodin, achèvent de rendre au bureau des allures de galerie d’art moderne.

A 60 ans tout juste, l’avocat genevois entame une nouvelle phase euphorisan­te. La Cité de la musique de Genève (CGM), qu’il a rêvée il y a quatre ans et initiée rapidement dans la foulée, va voir le jour grâce à sa ténacité et à son énergie. Si tout va bien, l’inaugurati­on devrait avoir lieu en décembre 2022 avec l’Orchestre de la Suisse romande (OSR) et Jonathan Nott dans un programme où Gustav Mahler aura sa place.

Quels sentiments vous animent à cette étape fondamenta­le d’un projet que personne n’osait imaginer il

y a quatre ans? Très impatient, excité, euphorique et ému. Cette étape est décisive parce qu’on va enfin visualiser cette Cité, qui, je l’espère, va marquer Genève pour les cent cinquante ans à venir au moins. Un ouvrage architectu­ral marquant, voulu comme symbole pour la ville. Mais aussi une institutio­n musicale et pédagogiqu­e majeure. Au niveau de la concrétisa­tion du rêve, ce moment est génial. Ce n’est plus un fantôme, une Arlésienne. On va découvrir un objet, une articulati­on. Du concret pour la première fois.

Comment visualisez-vous cette Cité?

Architectu­ralement, mes goûts vont du côté des lignes pures et droites. J’ai un penchant naturel pour ce qui est orthogonal et goûte peu les courbes. J’apprécie les formes élégantes et épurées, les matériaux légers qui vieillisse­nt bien. La lourdeur me déplaît. J’ai toujours rêvé d’une Cité qui permette au public et aux visiteurs d’avoir des foyers et des terrasses ouvrant sur les Alpes, avec la vue sur le Léman et le Mont-Blanc. Je ne la voyais pas dirigée vers le Jura. J’imagine une soirée de juin, dans la Cité ou son parc attenant. La douceur du soir, avec la beauté d’un coucher de soleil sur les montagnes et quelques bateaux sur le lac. A l’occasion d’un concert, ou pas.

Quand la première étincelle a-t-elle

jailli dans votre esprit? En fait, tout ça, à l’origine, c’est la faute de Mahler. Lorsque, pourtant mélomane averti, j’ignorais tout de lui et suis tombé dans sa marmite en 2003. Un peu comme Claudel, la nuit de Noël 1886, foudroyé devant le deuxième pilier de Notre-Dame!

Vous êtes président de la Société Gustav Mahler de Genève que vous avez créée en 2009. D’où vous vient cette

passion? En zappant un dimanche sur Arte. A la fin de la première mi-temps d’un match de foot, sport que j’aime bien, je tombe sur un concert. Claudio Abbado dirige une oeuvre que je ne connais pas. Je suis tétanisé. Arrivent des choeurs et je me mets à pleurer tant que je peux. Encore maintenant, d’y penser me bouleverse. Je ne sais pas ce qui s’est passé. A la fin, je vois: Festival de Lucerne, 2e symphonie de Mahler La Résurrecti­on, 2002, KKL. Il existe un fameux DVD de ce concert où l’on voit Abbado totalement bouleversé à la fin du dernier mouvement. Il s’est passé ce soir-là quelque chose d’invraisemb­lable, d’après tous les musiciens. Le lendemain je vais acheter le CD, je l’écoute, scotché. Arrive la fin et je repleure comme un enfant, même sans l’image. C’est de là que tout est parti. Depuis lors j’ai acheté tout ce que je pouvais de Mahler, en disque ou en livre. Je dois avoir cinq cents CD, je pense. Et j’ai créé la Société Mahler.

Où et quand le lien avec la Cité de la

musique s’est-il noué? Depuis plus de dix ans, je vais chaque année au Festival de Lucerne, principale­ment pour Mahler. Et là, je m’interrogea­is systématiq­uement. Pourquoi et comment cette petite ville de 70000 habitants a-t-elle réussi à construire un pareil KKL, avec une telle ouverture sur la musique classique et la création d’un festival exceptionn­el? Ce geste architectu­ral, si puissant pour la cité, apporte une ouverture et une valeur ajoutée incroyable­s, des retombées énormes pour le commerce et l’hôtellerie, une immense renommée internatio­nale. Genevois amoureux de mon canton, je déplorais qu’on ne dispose pas d’une infrastruc­ture pareille. Donc je me suis dit qu’il fallait tenter quelque chose, comme pour la société Mahler. Le moteur est là. Il y avait une idée sous jacente. Si elle s’est concrétisé­e, c’est grâce au KKL et à Mahler.

Et la première étincelle du projet? En août 2013, dans le bureau de mon chalet de Chamonix. J’ai posé sur un papier les premières idées d’une philharmon­ie. Une salle de concert pour Genève avec toutes les infrastruc­tures, comme à Lucerne. J’ai pointé les avantages, les inconvénie­nts et les écueils à éviter. C’est le document fondateur. Puis j’ai lancé quelques coups de sondes informels autour de moi pour savoir si cela pouvait avoir un sens ou si c’était une idée complèteme­nt loufoque.

Le financemen­t n’était pas le moindre

des écueils… Avant même de parler de Cité, je savais que si on voulait se donner une chance que ce projet voie le jour, il fallait tenter d’éviter de mettre les finances publiques à contributi­on: les budgets sont serrés et consacrés à des tâches peutêtre plus prioritair­es. Donc il fallait se débrouille­r seul. Or à Genève lorsqu’on veut créer un projet d’envergure, on se tourne naturellem­ent vers une importante Fondation privée de la place, ce que j’ai fait.

Comment a été reçue votre demande?

Lorsque j’ai évoqué le projet avec une première ébauche de budget, je voulais savoir si la fondation estimait que c’était envisageab­le ou si c’était une idée trop irréaliste. Il m’a été demandé de revenir avec un projet plus précis et élaboré. Lors d’une présentati­on ultérieure

«Sans la musique, la vie serait, peut-être pas une erreur, comme disait Nietzsche, mais beaucoup moins belle, sûrement»

plus affinée, j’ai entendu: «On y croit, on pourra vous aider», ce qui a été pour moi un moment magique. Lorsqu’on a enfin pu proposer le projet complet à la Fondation, en juillet 2015, j’ai ensuite reçu une lettre absolument superbe m’assurant un soutien financier qui représente environ 75% du budget. Il nous reste aujourd’hui encore plusieurs dizaines de millions à trouver. Nous organisero­ns une grande soirée pour les mécènes potentiels le 19 octobre, après le résultat du concours, afin qu’ils puissent découvrir en primeur le projet vainqueur. Je suis confiant dans notre capacité à lever ces fonds manquants.

Tout s’est concrétisé très vite… Oui, c’est incroyable. Nous avons créé, à quatre, la Fondation en septembre 2014. Son Conseil comprend aujourd’hui six membres: Steve Roger de Caecilia, Magali Rousseau et Sylvie Buaghiar de l’OSR, François Abbé-Decarroux de la HES-SO et le duo de la présidence. Puis après un parcours du combattant que je vous épargnerai ici, on a enfin su que la Cité pourrait s’ériger principale­ment sur un terrain appartenan­t à l’ONU. Il a fallu attendre deux votes de l’Assemblée générale de New York, en décembre 2015 et 2016. Le premier concernait l’autorisati­on, donnée par les pays membres à l’ONU Genève, de négocier avec nous. Une année plus tard, l’acceptatio­n de la transactio­n nous a permis d’avoir un accord de principe sur le droit de superficie du terrain, sa durée, la constructi­on d’une Cité de la musique et le prix, qui sera concrétisé par un acte notarié.

Quelles ont été pour vous les plus

grandes émotions de cette saga? Le soutien la Fondation privée, sans laquelle je n’aurais rien plus faire. Ensuite, le téléphone du directeur général de l’Office des Nations unies à Genève, Michael Møller. Le 23 décembre 2016 à 19h50, il m’annonce «c’est bon». Si ça n’avait pas été le cas, c’était un an de travail à l’eau avec toute la préparatio­n du Concours d’architectu­re qui se noyait, soit 80% des efforts consacrés à son organisati­on jetés à la poubelle. Le deuxième grand moment, c’est en juin 2016. Après la sélection de 18 bureaux du monde entier sur 80, quand j’ai reçu dans les deux semaines suivant mes lettres d’invitation­s 18 réponses positives de New York, Tokyo, Oslo, Londres, Copenhague, Genève, Zurich ou Gènes, ça a été très fort. Quant aux larmes, c’était le 11 août passé, jour où le délai du concours expirait. Lorsque à 17h09, Sacha Kortus du Bureau Brodbeck-Roulet m’a appelé pour me dire que les 18 projets, planches et maquettes, avaient été rendus. Là, les vannes se sont ouvertes… Pourquoi la CMG est-elle nécessaire? Qu’est-ce qui en justifie l’existence? La musique est une partie tellement importante de ma vie, depuis si longtemps, que je voulais partager cette beauté, l’ouvrir à des gens qui n’ont jamais l’occasion d’aller à un concert, faire découvrir ces bonheurs indicibles, allumer une étincelle. Sans la musique, la vieserait, peut-être pas une erreur, comme disait Nietzche, mais beaucoup moins belle, sûrement. Pour rester sur mes sentiments, j’estime que l’art en général est essentiel, la musique étant pour moi le paroxysme de la beauté. De façon très intime, je trouve qu’il y a là quelque chose de transcenda­nt, de mystique. Sur le sujet, trois citations accompagne­nt ma vie: «La beauté, c’est la splendeur de l’ordre», de saint Thomas d’Aquin, et «La création, c’est la protestati­on contre l’anarchie et le néant» dans une lettre d’Igor Stravinski en 1930. Pour moi, cette splendeur de l’ordre, c’est celle de l’équilibre, le yin et le yang, l’harmonie totale. Elevé catholique mais aujourd’hui ne pratiquant plus, je crois que je suis croyant… Mais je suis en tout cas déiste, profondéme­nt convaincu que le monde a un sens. Dans cette dimension verticale, la musique est phénoménal­e. Elle en est l’expression la plus parfaite. La plus belle citation de toutes: «La musique creuse le ciel», de Baudelaire dans le chapitre «Fusées» de ses Cahiers intimes, que j’ai encore relus cet été à Chamonix, car la poésie est aussi importante dans mon existence. La musique creuse le ciel. Et qui y a-t-il derrière? On va vers l’ineffable… A notre tout petit niveau, avec la CGM, nous contribuon­s à creuser le ciel. Et ça me touche énormément.

Votre Cité idéale, c’est quoi? Un édifice symbolique pour Genève et la Suisse romande, ouvert sur la ville et le monde, où, pourquoi pas, créer aussi un festival. Je refais le parallèle avec Lucerne, mais sans idée de concurrenc­e: c’est extraordin­aire de voir comment cette ville est en fête à ce moment-là. Il faut qu’on bouge, pour Genève. Qu’on fasse quelque chose qui permette aux habitants du Grand Genève et plus loin, de partager cette ivresse. Et que ma ville, que j’aime, continue à sortir de sa léthargie, comme elle a magnifique­ment et enfin commencé à le faire.

Que faut-il pour qu’elle soit viable?

A partir du moment où elle existera, il faut faire le maximum pour qu’elle soit utilisée à plein. On aura un outil magnifique, et j’aimerais que sa fréquentat­ion soit optimale. Qu’elle se remplisse d’orchestres, que les trois autres salles dévolues prioritair­ement à la HEM débordent, que ce soit un lieu de vie. Sur le plan économique, il y aura les organisate­urs et agents, comme Caecilia notamment, mais aussi les restaurant­s, quelques arcades… Il faudra une direction de salle et une programmat­ion bien répartie, un partage des activités très équilibré et organisé de façon pointue. Nous avons déjà commencé à travailler sur des projets de budgets d’exploitati­on. Mais, tant que le bâtiment qui abritera la Cité de la musique n’est pas connu, c’est quasiment impossible. Nos travaux à ce sujet vont donc se poursuivre dans les mois qui viennent.

Qu’a apporté votre métier d’avocat à

la CMG? Beaucoup de critères à étudier se situent dans mon domaine de compétence: le droit immobilier, la planificat­ion et l’aménagemen­t du territoire. Je connais aussi bien les politiques publiques pour avoir été maire de la commune d’Avusy. En plus, avec plus de trente ans de métier et d’activités de tous ordres, mon réseau permet assurément de gagner du temps, de faciliter certaines démarches et Dieu sait si dans un projet pareil, elles sont innombrabl­es. Tout ça m’a bien sûr énormément aidé à repérer les écueils et à opter pour des solutions réalisable­s le plus rapidement possible.

Que représente quantitati­vement

votre travail à la CMG? Un jour par semaine environ, depuis quatre ans, bénévole bien évidemment. Avec l’aide très précieuse et constante de David Lachat, qui est mon alter ego. Nous formons un tandem parfait.

Dans vos activités parallèles, le sport

compte beaucoup… Oui. J’ai fait plus jeune passableme­nt de foot puis du tennis. Mais, depuis trentecinq ans, surtout de la course à pied. Sans être un forcené, je cours très régulièrem­ent, une heure tous les jeudis, et une heure et demie tous les dimanches, très souvent en montagne. En moyenne 25 km par semaine. Ça me fait un bien extraordin­aire, précieux pour mon équilibre. Et si vous saviez le nombre de discours, quand j’étais maire, et de choses pour l’étude que j’ai conçues en courant, c’est impression­nant. Parce que je suis là dans une détente incroyable. La course me vide à la fois et m’aide à réfléchir car tout y est paisible. Elle libère et structure ma pensée. J’adore courir sous la pluie. Vous avez six enfants, dont les deux derniers adoptés, ce n’est pas banal… Je suis issu de famille nombreuse. Nous étions quatre et mes parents sept, de chaque côté. J’ai 38 cousins germains, je crois… J’aime les grandes familles. J’ai eu quatre enfants puis nous en avons adopté deux. Une petite Brésilienn­e, et une petite Indienne que nous sommes allés chercher chez Mère Teresa. L’adoption, c’était vraiment l’idée d’aider, de se dire que si on peut sortir un enfant du ruisseau, puis un deuxième, c’est déjà pas mal.

Y a-t-il de grandes personnali­tés qui

vous inspirent? Non. Franchemen­t je n’ai pas d’idole ou de modèle, même s’il y a des personnage­s magnifique­s. Mon moteur, c’est la beauté du monde, je le répète. J’ai 60ans, je suis en bonne santé, j’ai une famille magnifique, des projets incroyable­s partout… Parfois, ça me submerge d’émotion. La vie nous réserve aussi des épreuves, parfois gigantesqu­es. Je n’ai pas été épargné non plus. Mais cette résilience face aux difficulté­s et cette faculté que je crois avoir de rebondir et de m’émerveille­r sont un moteur extraordin­aire. Souvent lorsque je cours seul en montagne, j’ouvre les bras: je rends grâce à la vie, je la respire à plein poumons, et je dis merci.

Vous êtes impliqué dans des fondations, le besoin d’être utile vous

importe? J’ai eu la chance de beaucoup recevoir, alors je donne à mon tour maintenant.

Le pouvoir ou la puissance vous

motivent-ils? Certaineme­nt pas. Autre chose est la façon de mener un projet. Parfois, je considère que si on ne fait pas les choses soimême et qu’on compte sur les autres, on n’avance pas, ou en tout cas pas au même rythme. Je connais mes limites mais aussi ma force de travail, et je sais ce que je peux faire pour mener à bien un projet. Autre chose aussi est l’ego: ce serait mentir de dire que ça ne fait pas plaisir d’être reconnu. Mais une quelconque soif de puissance ou de pouvoir ne joue aucun rôle dans mes activités. A la tête de la Fondation pour la Cité de la musique de Genève, quel est mon pouvoir? Aucun. J’ai conçu le projet et je le mène en équipe, uniquement dans le but d’arriver à sa concrétisa­tion. Ça ne me donne pas de pouvoir ou de contrôle sur qui que ce soit. Ce projet de Cité de la musique démontre une chose importante pour moi: il ne faut jamais cesser de rêver, et de tenter de vivre ses rêves. Les seules entreprise­s dont on est certain qu’elles vont échouer sont celles qu’on ne tente pas… L’essentiel est de créer du mouvement et de semer. J’espère que cette aventure permettra de susciter d’autres vocations.

Quand il vous reste du temps, qu’en

faites-vous? Je lis beaucoup. De littératur­e mais aussi de poésie. Particuliè­rement Rimbaud, Baudelaire, Philippe Jaccottet… J’ai découvert cet été une poétesse russe sublime: Anna Akhmatova. Je suis aussi sensible à l’architectu­re. La Fondation Beyeler de Renzo Piano est par exemple un bâtiment que je trouve superbe et qui a formidable­ment bien vieilli. Je fréquente toujours beaucoup les exposition­s. En peinture, j’adore l’art construit: Richard-Paul Lohse, Barnett Newman, Piet Mondrian, Josef Albers, Eisworth Kelly ou Aurélie Nemours. Mais aussi Vassily Kandinsky ou Asger Jorn, avec sa luminosité et sa gaîté incroyable­s. La grande exposition de ses toiles à l’Hermitage était une pure merveille! Dernièreme­nt, j’ai été profondéme­nt ému par l’exposition Zao Wou-Ki chez Gianadda. Et puis je vais beaucoup aux concerts, évidemment…

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 ?? (PHOTO12/ ANN RONAN PICTURE LIBRARY) ?? Zao Wou-Ki (1920-2013) , «6th January 1968», huile sur toile, 1968.
(PHOTO12/ ANN RONAN PICTURE LIBRARY) Zao Wou-Ki (1920-2013) , «6th January 1968», huile sur toile, 1968.
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(MICHAEL NICHOLSON) Gustav Mahler.
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(GETTY IMAGES) Charles Baudelaire.

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