ICO: la Finma accompagne les efforts visant à développer la blockchain
Tout en relevant qu’il n’existe actuellement pas de prescriptions spécifiques s’appliquant aux Initial Coin Offering (ICO), tant sur le plan international qu’au niveau suisse, la Finma donne un certain nombre de lignes directrices sur le traitement prudentiel des ICO. Le présent article vise dans un premier temps à qualifier juridiquement une ICO d’un point de vue contractuel, puis à résumer les lignes directrices communiquées par la Finma en matière réglementaire.
Il s’agit de déterminer si, lors d’une ICO, l’achat d’une pièce de monnaie («coin») ou d’un «token», qui n’a par hypothèse pas de valeur intrinsèque lors de son achat, mais représente seulement un espoir d’une valeur future, constitue un contrat valable selon le droit suisse.
En droit suisse, la vente est un contrat par lequel le vendeur s’oblige à livrer la chose vendue à l’acheteur et à lui en transférer la propriété, moyennant un prix que l’acheteur s’engage à lui payer. La jurisprudence du Tribunal fédéral admet que des droits immatériels ou un avantage peuvent également être vendus. Selon la théorie générale du Code des obligations (CO), le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d’une manière concordante, manifesté leur volonté. En ce sens, un contrat serait ainsi conclu au moment de l’achat d’une monnaie virtuelle (coin).
Le CO prévoit toutefois certaines limites à la liberté contractuelle. A titre d’exemple, la loi exclut les conventions qui contreviennent à une règle de droit impérative ou qui sont contraires aux moeurs, à l’ordre public ou aux droits attachés à la personnalité. Dans le cadre d’un contrat de vente, il n’existe pas de disposition spéciale impérative interdisant l’achat d’une chose sans valeur au moment du paiement du prix. Cela étant, cette problématique est réglée par la partie générale du CO: en cas de disproportion évidente entre la prestation d’une des parties et la contre-prestation de l’autre, si le contrat a été conclu par l’exploitation de la gêne, de la légèreté ou de l’inexpérience d’une des parties, celui-ci pourra être invalidé.
Dans la mesure où les risques liés à l’achat d’une pièce de monnaie ou d’un token sont clairs pour l’acheteur et mentionnés dans la documentation relative à l’ICO, celui-ci aurait en pratique du mal à résilier son acquisition en raison d’une lésion du contrat. Il convient également de souligner que, sauf convention contraire entre les parties, les profits et les risques de la chose passent à l’acquéreur dès la conclusion d’un contrat de vente. L’acheteur sera donc seul à supporter le risque que la monnaie achetée ne prenne jamais aucune valeur. La question de la validité d’une ICO se pose également d’un point de vue réglementaire.
Dans sa récente communication, la Finma rappelle tout d’abord que, lorsqu’une ICO ou la création d’un token correspond à une émission d’un moyen de paiement ou une opération de change, la loi sur le blanchiment d’argent (LBA) s’applique. Autrement dit, la société émettrice qui propose – par le biais d’une ICO – un moyen de paiement ou une opération de change est considérée comme intermédiaire financier et soumise notamment à l’obligation d’être affiliée à un organisme d’autorégulation (OAR). Si les tokens sont considérés comme des valeurs mobilières, une autorisation en vertu de la loi sur les bourses et le commerce de valeurs mobilières (LBVM) est requise. Cela pourrait être le cas par exemple si la valeur du token dépend de l’évolution de la valeur d’un sous-jacent et que le token est considéré comme un produit dérivé. Par ailleurs, en cas d’administration des fonds récoltés en commun par un ou des tiers, la question de l’application de la loi sur les placements collectifs se pose également. La question d’un assujettissement à la loi sur les banques (LB) se pose en particulier lorsque l’ICO entraîne un engagement de l’exploitant de cet ICO envers les souscripteurs.
Enfin, il ne faut pas oublier qu’en cas de marché secondaire organisé, la question de la loi sur l’infrastructure des marchés financiers (LIMF) se pose aussi. Autrement dit, en fonction de la structuration de l’ICO, une ou plusieurs autorisations/affiliations, notamment de l’émetteur, sont requises en vertu de la réglementation suisse, laquelle vise à garantir une protection des investisseurs. En cas de non-respect ou de contournement des lois susmentionnées, des procédures d’enforcement sont ouvertes par la Finma, qui a d’ores et déjà liquidé plusieurs émetteurs ne respectant pas le cadre réglementaire suisse. Compte tenu notamment du risque de liquidation (et des autres sanctions prévues par la réglementation), tant les émetteurs d’ICO que les personnes envisageant de souscrire à une ICO devraient s’assurer au préalable de sa conformité d’un point de vue réglementaire.
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«Lorsqu’une ICO correspond à une émission d’un moyen de paiement ou une opération de change, la loi sur le blanchiment s’applique»