Le Temps

L’oeil de Pékin

Pékin vient de vivre un remaniemen­t quasi complet de ses instances dirigeante­s. Le président chinois, réélu pour cinq ans et au faîte de son pouvoir, n’a pas nommé de dauphin, mais il a placé plusieurs de ses protégés au sein du Politburo

- JULIE ZAUGG, HONGKONG

CHINE Le Congrès du PC chinois a désigné les nouveaux maîtres du pays. Sans dauphin, Xi Jinping est plus puissant que jamais.

La nouvelle compositio­n du Politburo et de son Comité permanent, les deux instances au sommet du pouvoir en Chine, a été révélée mercredi à l’issue du 19e congrès du Parti communiste. Le Comité permanent a subi l’un des plus importants remaniemen­ts de son histoire avec le remplaceme­nt de cinq de ses sept membres. Seuls le président Xi Jinping et son premier ministre Li Keqiang ont conservé leur place.

Parmi les cinq nouveaux, un seul, Li Zhanshu, est un allié de l’homme fort de Pékin. Ces dernières années, il lui a servi de chef d’état-major, prenant en charge certaines visites diplomatiq­ues sensibles. Il s’est par exemple rendu à Moscou en avril pour rencontrer Vladimir Poutine. Il prendra vraisembla­blement la tête du parlement.

Départ inattendu de Wang Qishan

Parmi les autres nouveaux membres du Comité permanent figurent Wang Yang, un proche de la puissante Ligue de la jeunesse communiste que Xi Jinping cherche à mettre au pas, ainsi que Han Zheng, un représenta­nt de la faction de Shanghai dont était issu l’ex-président Jiang Zemin. Wang Huning, un académicie­n qui officie en tant que théoricien du parti depuis près de trente ans, y a également accédé.

Zhao Leji succédera pour sa part à Wang Qishan, le bras droit de Xi Jinping, à la tête de l’instance chargée de sa campagne anti-corruption. Il s’agit d’une surprise: la plupart des observateu­rs s’attendaien­t à ce que Wang Qishan conserve son poste, même s’il a atteint l’âge de la retraite.

La compositio­n du nouveau Comité permanent livre quelques pistes quant aux projets de Xi Jinping pour les cinq ans à venir. Il a choisi de privilégie­r la continuité et la stabilité, tout en faisant des concession­s aux autres factions au sein du parti, sans doute par souci de ne pas mettre en péril les institutio­ns sur lesquelles repose tout son pouvoir. Mais il a aussi omis de désigner un successeur au sein du Comité permanent, comme le voudrait la tradition. Cela lui permettra de régner sans partage, sans avoir à craindre que son dauphin ne lui vole la vedette.

Il a par contre nommé plusieurs de ses protégés au Politburo, qui comporte 25 membres. Il passera les cinq prochaines années à les observer se livrer une lutte acharnée et choisira le meilleur d’entre eux pour lui succéder en 2022, pensent les experts de la Chine. A moins qu’il ne décide d’accomplir lui-même un troisième mandat, ce qui irait à l’encontre de toutes les normes.

Garde rapprochée au Politburo

Le Politburo annoncé mercredi comporte quatre membres nés dans les années 60 ou juste avant, la cohorte dont sera vraisembla­blement issu le prochain leader chinois. Celui qui figure en pole position est Chen Miner, 57 ans. Considéré comme un protégé du président, il a oeuvré à ses côtés dans la province du Zhejiang au début des années 2000. Il a par la suite fait ses preuves en tant que chef du Guizhou, une région pauvre et rurale qu’il a transformé­e en hub pour les data centers. Cet été, il a été nommé à la tête du Chongqing, après la spectacula­ire chute de Sun Zhengcai, un possible successeur de Xi Jinping pris dans les filets de la campagne anti-corruption de ce dernier.

Ding Xuexiang, 55 ans, est un autre protégé du président chinois. Ils se sont rencontrés lorsque ce dernier était en charge du parti à Shanghai. Li Qiang, 58 ans, qui tient les rênes de la dynamique province côtière du Jiangsu et a lui aussi oeuvré aux côtés de Xi Jinping dans le Zhejiang, est considéré comme le troisième candidat au poste de président en 2022. Le nom d’un quatrième homme circule aussi. Mais Hu Chunhua, 54 ans, est un proche de l’ex-président Hu Jintao, ce qui restreint ses chances de succéder à Xi Jinping. Il dirige actuelleme­nt la province du Guangdong, le poumon manufactur­ier du pays.

Outre ces dauphins potentiels, le Politburo comporte 11 proches du président. Parmi ceux-ci figurent le maire de Pékin, Cai Qi; le chef adjoint de la propagande, Huang Kunming, et le patron de la province du Liaoning, Li Xi. Cette instance dirigeante comprend en outre Liu He, un conseiller économique de Xi Jinping. Formé à Harvard, il est considéré comme l’auteur de la politique macroécono­mique de la Chine.

Chen Miner, 57 ans, figure en pole position pour devenir le prochain leader chinois

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(JASON LEE/REUTERS) Xi Jinping se donne cinq ans pour faire émerger un successeur

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